Le pourvoi formé par le Procureur de la République retenait une analyse mêlant ordre public et fraude. Selon cette argumentation, la fraude qui consisterait à faire « usage de droits pour parvenir à un but auquel la situation d'une personne ne lui permet pas de prétendre » serait constituée par le trouble à l'ordre public. Ce trouble à l'ordre public serait en l'espèce le détournement du divorce de son but. L'argumentation était critiquable techniquement en ce qu'elle mettait sur le même plan l'ordre public et la notion de fraude alors qu'il s'agit, nous le verrons, de deux institutions différentes. Elle posait cependant une question juridique intéressante. La loi de 1975 a en effet admis l'existence d'un divorce par consentement mutuel (...)
[...] La question était de savoir s'il y avait eu une fraude à la législation (fraus légis) sur le divorce et le mariage emportant inefficacité de l'opération juridique en principe parfaitement valable. La Cour de cassation rejette le pourvoi fondé sur la violation de la législation du mariage et du divorce. Elle retient en revanche la fraude à l'article 37-1 du Code de la nationalité et exclut donc l'acquisition de la nationalité française par M. Taleb. Un mariage valable: Le divorce, un droit discrétionnaire: Le pourvoi formé par le Procureur de la République retenait une analyse mêlant ordre public et fraude. [...]
[...] Ayant admis qu'ils avaient divorce, le juge ne pouvait que constater la validité de la nouvelle union. En effet, le législateur n'a pas prévu une impossibilité fondée sur l'existence d'un mariage antérieur. Il suffit, pour que le mariage soit valable, que les deux personnes ne soient pas engagées par le lien du mariage, sous réserve du délai de viduité sous certaines conditions. On ne saurait d'ailleurs qu'être critique à l'égard de l'attitude du Procureur de la République. En effet, le pourvoi était en fait une application d'une jurisprudence antérieure sur le mariage simulé. [...]
[...] Au contraire, on ne peut reprocher aux époux Taleb de contourner la loi puisqu'ils sont mariés depuis 1970. Faute d'intention, on passe de la qualification de fraude à celle d'habileté ou de montage juridique qui n'est pas sanctionnable. Une sanction injustifiée: Constatant l'existence d'une fraude, la Cour de cassation en tire toutes les conséquences traditionnelles: si le divorce prononcé et le second mariage qui l'avait suivi demeuraient valables, ce second mariage n'avait pu produire l'effet acquisitif de nationalité frauduleusement recherché En effet, la sanction traditionnelle de la fraude est l'inopposabilité. [...]
[...] Enfin, l'intention serait caractérisée puisque les époux ont divorcé pour contourner l'article 37-1. On doit cependant être critique. On peut estimer que la règle violée est bien l'article 37-1 puisque, sans divorcer, M. Taleb n'entrait pas dans le champ d'application de la loi et ne pouvait pas bénéficier de la nationalité par simple déclaration. Le divorce-mariage constitue la règle obligatoire pour contourner l'article 37-1. Reste l'élément interactionnel. En matière de fraude à la loi, l'intention consiste à atteindre le but de la loi. [...]
[...] La Cour de cassation avait ainsi affirmé qu'il n'était pas possible de trier parmi les effets du mariage. Quant à la validité, la Cour affirmait que le mariage était nul dès lors que le consentement n'avait été donné que pour atteindre un résultat étranger à l'union matrimoniale Tel n'était pas le cas puisque les époux souhaitaient justement renforcer les conséquences du mariage en lui conférant les effets sur la nationalité ajoutés par une législation postérieure. C'est pourquoi le rejet du pourvoi sur ce moyen doit être approuvé. [...]
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