En droit français, la preuve des actes juridiques n'est pas libre. Il existe un formalisme dit probatoire auquel n'échappe pas la preuve de la simulation, qui sera analysée dans une première sous partie. Mais celui-ci connaît des limites qui seront présentées dans une seconde sous partie.
A- Le formalisme probatoire
1) Le grief de la violation des articles 1341 et 1984 du Code civil
Le non respect des règles relatives au formalisme constitue l'argument du pourvoi. Les vendeurs ont reproché à la cour d'appel d'avoir violé les articles 1341 et 1984 du Code civil, en statuant au vu des seuls éléments de fait, alors que, selon le pourvoi, la preuve d'un mandat ne peut être reçue que conformément aux règles générales sur la preuve des conventions et que ces règles sont applicables non seulement dans les rapports du mandant et du mandataire mais encore à l'encontre des tiers qui ont traité avec celui-ci.
Le pourvoi se fonde sur l'existence d'un contrat de mandat conclu entre les vendeurs et l'avocat chargé de percevoir le supplément de prix prévu dans la contre lettre. Il fait alors grief à la cour d'appel de n'avoir pas appliqué l'article 1341 du Code civil, une règle générale applicable à tous les contrats, et notamment au mandat, alors que, selon lui, les juges du fond se seraient à tort fondés sur de seuls éléments de fait.
En effet, les juges du fond ont considéré que la simulation était suffisamment prouvée. En l'espèce, il ressort des éléments de fait que l'existence du mandat n'était pas contestée par les vendeurs. De même, il est vraisemblable que le mandat ait été verbal, car dans le cas de la perception d'un prix occulte, l'écrit ne fait qu'augmenter le risque, déjà existant au demeurant comme le prouve cet arrêt, de preuve de la fraude. Les éléments du dossier, et notamment l'existence évidente d'un mandat, fût il seulement verbal, ont ainsi convaincu les juges du fond de la réalité de la simulation frauduleuse. (...)
[...] La Cour de cassation, en l'espèce, a fait état de l'appréciation souveraine des faits, opérée par les juges du fond, en précisant qu'ayant constaté l'existence d'une fraude en faisant ressortir, par un appréciation souveraine des faits et de la valeur probante des éléments de preuve soumis à son examen, qu'une partie du prix de vente du bien immobilier avait été dissimulée et acquittée, à la demande des époux Y , entre les mains de l'avocat suisse qu'ils avaient mandaté à cet effet, la cour d'appel par ce seul motif et sans encourir les griefs du moyen, légalement justifié sa décision Une preuve plus ou moins aisée En principe, une preuve difficile A la complexité de la cause liée à la multiplicité des actes juridiques s'ajoute celle de la preuve de la fraude dont on sait qu'elle n'est pas évidente. Le régime de la fraude ne pose souvent pas de difficulté. Il est, en effet, empreint de pragmatisme et sévère à l'égard de son auteur. La sanction est la nullité, soit de l'acte, soit de l'opération tout entière. En revanche, soit de l'opération tout entière. En revanche il est souvent très difficile d'apporter la preuve de la fraude; les tribunaux montrant une grande rigueur dans son établissement. [...]
[...] S'agissant des sanctions de la fraude, la règle Fraus omnia corrumpit la fraude corrompt tout démontre la force de la sanction impliquée par l'existence d'une fraude: l'annulation de l'acte tout entier. S'agissant de sa preuve, la fraude est traditionnellement considérée comme un fait juridique, même si elle se réalise à travers un ou plusieurs actes juridiques. La preuve en est ainsi facilitée. La Cour de cassation a rappelé le principe selon lequel, en cas de fraude, la simulation peut être prouvée par tout moyen rejetant ainsi l'argument du pourvoi selon lequel étaient applicables les règles de preuve des actes juridiques. [...]
[...] La Cour de cassation a répondu par l'affirmative. Par l'arrêt ici commenté, elle a rejeté le pourvoi aux motifs qu'en cas de fraude, la simulation peut être prouvée par tout moyen; qu'il en est ainsi de la dissimulation d'une partie du prix d'une vente d'immeuble, laquelle a notamment pour finalité d'éluder l'application des règles fiscales relatives à l'imposition des transactions immobilières; qu'ayant constaté l'existence d'une fraude en faisant ressortir, par une appréciation souveraine des faits et de la valeur probante des éléments de preuve soumis à son examen, qu'une partie du prix de vente du bien immobilier avait été dissimulée et acquittée, à la demande des époux Y., entre les mains de l'avocat suisse qu'ils avaient mandaté à cet effet, la cour d'appel par ce seul motif et sans encourir les griefs du moyen, légalement justifié sa décision Cet arrêt porte sur la preuve de la simulation. [...]
[...] Dans le cas d'une contre lettre majorant le prix de vente dans un but évident de fraude à l'égard de l'administration fiscale, l'article 1321-1 du Code civil, ancien article 1840 du Code général des impôts, prévoit que le vendeur d'un immeuble ne pourra réclamer en justice la fraction de prix dissimulée et l'acheteur, s'il l'a déjà payé, pourra se la faire restituer ; seule la contre lettre étant nulle et de nul effet et l'acte apparent restant valable. Le but de cette disposition est de rendre le déguisement du prix excessivement dangereux pour le vendeur afin de l'en dissuader. Elle instaure en quelque sorte une prime à la délation dans un cas de fraude reconnue. [...]
[...] Les limites De multiples dérogations D'une façon générale, le principe de la nécessité d'un écrit préconstitué connaît des exceptions. C'est une spécificité du droit français: la rigidité du principe est fortement modérée par l'existence de multiples dérogations faisant de plus l'objet d'une interprétation large. Toute d'abord les articles 1347 et 1348 du Code civil prévoient des tempéraments à la rigueur de l'exigence de préconstitution de preuve par écrit. Ensuite, les règles du code civil s'agissant de la preuve du contrat sont également écartées lorsque c'est un tiers qui apporte la preuve du contrat. [...]
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