Commentaire de l'article 1195 du Code civil, législateur, compromis, sécurité des transactions, révision du contrat, arrêt Canal de Crapone, ordonnance du 10 février 2016, imprévision, changement de circonstances, arrêt Huard, accord des parties, liberté contractuelle
"Les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits". Ainsi est clairement affirmé le principe de la force obligatoire du contrat. Dans l'arrêt historique de 1876 Canal de Crapone, la révision pour imprévision avait été fermement écartée par la Cour de cassation, car elle contrevient à la sécurité des transactions et plus généralement à ce principe de force obligatoire du contrat. (ex-article 1134 C.Civ). La cassation a d'abord écarté fermement la révision pour imprévision (Cass,6 mars 1876, Canal de Crapone). Cette affaire concernait un contrat conclu en 1567 par Adam de Crapone qui s'était obligé à construire un canal pour irriguer les terres d'une commune, sous condition du paiement d'une redevance à lui-même et à ses héritiers.
[...] Mais en ayant consacré légalement la possibilité de révision du contrat par le juge ne serait-ce pas toujours une atteinte à la force obligatoire du contrat ? Certes le juge a la possibilité de choisir entre la résolution et la révision du contrat, cependant, on ne sait pas comment est-ce que le juge va faire le choix, on ne sait pas non plus quelle est la limite de son pouvoir. Pareil pour l'appréciation d'un délai raisonnable, la durée exacte du délai raisonnable n'est pas précisée par l'article, le juge fera sans doute une appréciation in concreto. [...]
[...] Concernant les conditions d'exécution, pour éviter les situations dans lesquelles les parties invoquent cet article pour ne plus exécuter leur obligation et donc au regard de la sécurité juridique, la partie doit continuer à exécuter ses obligations durant la renégociation, ce qui empêche les recours visant uniquement à suspendre l'exécution du contrat. L'article 1195 énonce qu'afin de réviser le contrat, il faut qu'il y ait plusieurs conditions qui sont réunies. En premier lieu, il faut un changement de circonstances imprévisibles lors de la conclusion du contrat. Concernant cette première condition, les circonstances désignent l'environnement dans lequel les contractants se sont initialement inscrits et ont inscrit leur accord. Étant donné que n'est pas précisé le type de circonstances visées, elles peuvent être entendues largement. [...]
[...] Contrairement à l'adaptation du contrat par le juge, la résolution ou la révision du contrat par le juge peuvent être demandées de manière unilatérale. Ici, l'article 1195 du Code civil crée une rupture totale avec l'arrêt "canal de Craponne" où la Cour de cassation avait retenu que : "dans aucun cas, il n'appartient aux tribunaux, quelque équitable que puisse apparaître leur décision, de prendre en considération le temps et les circonstances pour modifier les conventions des parties et substituer des clauses nouvelles à celles qui ont été librement acceptées par les contractants". [...]
[...] Nous venons de voir que les parties en dernier ressort peuvent d'un commun accord mettre fin au contrat À présent, nous allons voir qu'en raison de refus ou d'échec de la renégociation, ou encore à défaut d'accord dans un délai raisonnable des parties, le juge pourra adapter, réviser ou mettre fin au contrat pour imprévision Innovation de l'article 1195 - Possibilité d'adapter, réviser ou mettre fin au contrat pour imprévision par le juge : la décision du juge en dernier ressort Tout d'abord, après que les parties ont essayé de résoudre le processus amiablement entre elles, "en cas de refus ou d'échec de la renégociation", elles peuvent demander d'un commun accord au juge de procéder à son adaptation. À la lettre de l'article, est précisée "d'un commun accord", cela veut dire que l'adaptation est possible que si les parties sont d'accord, à défaut d'accord commun, l'adaptation n'est pas possible. On peut dire que le juge devient en quelque sorte, "une troisième partie au contrat" comme le disent certains auteurs. [...]
[...] Article 1195 du Code civil - De quelle manière le législateur a-t-il effectué un compromis entre sécurité des transactions et révision du contrat ? Les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits . Ainsi est clairement affirmé le principe de la force obligatoire du contrat. Dans l'arrêt historique de 1876 Canal de Crapone, la révision pour imprévision avait été fermement écartée par la Cour de cassation, car elle contrevient à la sécurité des transactions et plus généralement à ce principe de force obligatoire du contrat (ex-article 1134 C.Civ). [...]
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