À la différence du chèque qui n'est qu'un instrument de paiement, l'effet de commerce est aussi un instrument de crédit. Il s'agit en fait d'un « titre négociable qui constate au profit du porteur une créance de somme d'argent et sert à son paiement ». Tous les effets de commerce présentent cette particularité que le droit est incorporé au titre, la simple transmission du titre papier entraine la transmission des droits.
Ce mécanisme de droit cambiaire est donc bien plus adapté aux exigences de la vie des affaires que l'est celui du transport de créances de pur droit civil, assez lourd et assez couteux à mettre en place. En effet, l'article 1690 du Code civil prévoit que pour être opposables au débiteur cédé et aux tiers, les cessions de créances de droit commun doivent être soit signifiées par un acte extrajudiciaire, soit acceptées par un acte authentique. La contrepartie de cette souplesse de fonctionnement du titre cambiaire se traduit par un formalisme assez contraignant attaché au titre papier.
La lettre de change est sans doute « l'expression la plus achevée de la technique de l'effet de commerce ». Dans celle-ci, une personne, le tireur, va donner l'ordre à une autre personne, le tiré, de payer à l'échéance une troisième personne appelée le porteur. Ce mécanisme tripartite inventé par les banquiers génois aux alentours du 12e siècle, avait pour principal intérêt de sécuriser les transferts de fonds, mais aussi de permettre une économie de liquide significative de la monnaie puisqu'un seul paiement a lieu, celui du tiré au porteur de la traite.
[...] Le caractère abstrait de la traite est donc justifié à travers l'exigence d'un certain formalisme. C'est cette attention particulière portée à l'apparence qui va matérialiser l'engagement cambiaire des signataires, sans qu'il soit important de s'attacher à l'existence d'une quelconque cause. Cette variable est fondamentale pour protéger les intérêts du porteur étant donné que les parties ne seront pas en mesure de lui opposer les exceptions fondées sur le rapport fondamental B. Un caractère abstrait matérialisé par le principe de l'inopposabilité des exceptions Dès lors qu'une personne appose sa signature sur une lettre de change, il est tenu par le droit cambiaire et ce peu importe le rapport de droit commun. [...]
[...] En effet, elle va lui permettre d'opposer au porteur certaines exceptions tirées du rapport fondamental B. La résurgence de l'opposabilité des exceptions tirées du rapport fondamental Dans certaines hypothèses, le caractère abstrait de la lettre de change peut porter préjudice à celui qui va devoir effectivement payer. En effet, le principe d'inopposabilité des exceptions a pour avantage de sécuriser l'opération et de renforcer la protection du porteur, mais elle est assez lourde à supporter pour le débiteur de l'obligation cambiaire. [...]
[...] Le caractère abstrait de la lettre de change est donc très sécurisant pour le porteur dans la mesure où il a de très fortes garanties d'être payé. Si le tiré est dans l'incapacité de payer, le porteur pourra exercer ces recours contre n'importe quelle signataire en vertu du principe de solidarité prévue à l'Article L.511-44. Il n'a donc pas à être inquiété par une éventuelle exception d'inexécution tirée du rapport fondamental que pourrait soulever la personne appelée en paiement. Il existe cependant certaines hypothèses dans lesquelles ce caractère abstrait, si sécurisant pour le porteur, va s'effacer (II). II. [...]
[...] La jurisprudence l'a illustré à de nombreuses reprises et plus précisément dans un arrêt rendu par la chambre commerciale en date du 22 mai 1991. Le caractère abstrait de la lettre de change fait donc parfois défaut et fragilise la protection normalement garantie au porteur. Mais le mécanisme de l'abstraction ne doit pas agir tel un automate, il doit au contraire faire coïncider sécurité de la traite et protection des parties en présence pour que les exceptions légitimes soient à juste titre opposées. [...]
[...] En effet, l'article L.511-12 du Code de commerce nous dit que le principe d'inopposabilité des exceptions ne joue pas pour le porteur de mauvaise foi qui a agi sciemment au détriment du débiteur. La chambre commerciale de la Cour de cassation est venue apporter des précisions sur cette notion de mauvaise foi dans un arrêt du 26 juin 1956. La mauvaise foi est caractérisée si le porteur a eu conscience, en consentant à l'endossement du titre à son profit, de causer un dommage au débiteur, par l'impossibilité où il le mettait, de se prévaloir vis-à-vis du tireur ou d'un précédent endosseur, d'un moyen de défense issu de ses relations avec ces derniers Une autre exception a été prévue en cas d'absence de circulation du titre. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture