En l'espèce, M. X (défendeur, débiteur) cessa de régler les échéances du prêt que lui avait consenti la SOFAL. Le débiteur fait donc l'objet d'une saisie immobilière engagée par la SOFAL ayant subrogé Les Mutuelles du Mans (demanderesse, créancière) dans tous ses droits et actions contre le défendeur. Entre temps, le débiteur créa une société civile immobilière (SCI) le 19 janvier 1989. Le 23 janvier 1989, le débiteur s'était porté adjudicataire pour le compte de la SCI en formation, d'un immeuble. Le 13 mars 1989, la SCI est définitivement constituée entre le débiteur et son fils. La SCI disposant d'un faible capital et d'aucun patrimoine lors de sa création voit le bien acheté par le débiteur entrer dans son patrimoine alors qu'elle ne produisait pas le contrat de prêt consenti par la BNP, ni même ne pouvait justifier d'aucun remboursement, ni de cette acquisition avec ses fonds propres.
Le problème de droit rapporté devant la Cour suprême est de savoir si la constatation d'une fraude paulienne permet aux juridictions qui en connaissent d'ordonner une mise en vente du bien objet de la fraude aux enchères.
[...] Tous les éléments pour exercer une action paulienne étaient donc réunis selon l'appréciation souveraine des juges du fond, néanmoins si la procédure de mise en état de la fraude présente des caractères de souplesse, elle propose aussi des garanties aux créanciers. L'action paulienne : garantie de l'inopposabilité des actes aux créanciers Le principal effet de l'action paulienne consiste en l'inopposabilité de l'acte frauduleux à l'égard du créancier. L'inopposabilité consiste pour le créancier à agir comme si l'acte frauduleux n'avait jamais eu lieu. [...]
[...] X doit être déclaré inopposable aux Mutuelles du Mans Par ce mécanisme, l'action paulienne entend clairement s'ériger en un moyen de sauvegarde du droit de gage général des créanciers constituant une sûreté réelle conventionnelle à l'avantage des créanciers, sur les biens du débiteur. Néanmoins, l'acte inopposable n'est pas anéanti inter partes, et ne reconstitue pas le patrimoine du débiteur. En l'espèce, la Cour de cassation précise bien que l'admission de l'action paulienne n'a pour effet que d'entraîner le retour du bien dans le patrimoine du débiteur où le créancier demandeur pourra seul éventuellement le saisir Ce qu'il faut entendre par là, c'est surtout qu'en dépit de l'acte inopposable (la vente du bien à la SCI), le patrimoine du débiteur (de la SCI) n'est pas reconstitué, le bien n'y demeure pas mais retourne dans le patrimoine de M. [...]
[...] Passant outre, la possibilité d'être confronté à un patrimoine sans titulaire, la majorité des cas reflète qu'une personne physique ou morale est nécessairement à la tête d'un patrimoine. Le patrimoine est unique à chaque personne, c'est-à-dire qu'une personne ne peut disposer que d'un seul et unique patrimoine. Accepter ce constat, c'est aussi mettre de côté les mécanismes de fiducie ou de tontine n'ayant pas rapport au cas d'espèce. Dans l'affaire que connaît la Cour suprême, un bien sort du patrimoine d'un débiteur, personne physique, pour entrer dans le patrimoine d'une personne morale. [...]
[...] C'est pour cela que la Cour de cassation censure la CA de Paris, car elle avait ordonné la mise en vente aux enchères d'un bien qui se trouvait dans un patrimoine autre que celui du débiteur du créancier. En effet, la CA de Paris s'était, en quelque sorte, ingérée dans deux patrimoines distincts en faveur d'un seul et même bien qui ne pouvait être affecté qu'à l'un des deux patrimoines. Par conséquent, c'est dans une logique conforme au droit que la Cour de cassation décide que le recouvrement du créancier ne peut se faire directement via le patrimoine de la SCI. [...]
[...] Se pose alors la question de savoir si la justice peut être plus efficace si plus expéditive ou si les principes qui la ralentissent sont le gage d'une certaine sécurité juridique. En l'espèce, la lenteur de la procédure porte un préjudice certain au créancier, alors que le débiteur gagne un temps précieux pour pouvoir se retourner. Néanmoins, les mécanismes tels que l'action paulienne restent bienvenus même s'ils peuvent faire entrer les ayant droits dans un dédale juridique des plus complexes. [...]
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