Arrêt de cassation du 30 juin 2021, résiliation unilatérale, convention de compte, droit au compte, établissement de crédit, compte de dépôt, Banque de France, article L 312 1 du Code monétaire et financier, RIB Relevé d'Identité Bancaire, utilisation illicite, dispense de préavis, opération douteuse, fins illégales, principe de non-discrimination, ordonnance n° 2016 1808 du 22 décembre 2016, CMF Code Monétaire et Financier, obligation de motivation, sanctions financières, utilisation atypique, lutte contre le blanchiment d'argent, liberté du banquier, risque financier
Il existe certes « un droit au compte », mais pas d'obligation pour le banquier de conserver un client ad vitam aeternam. Ce constat fait référence aux deux notions fondamentales du droit bancaire : le « droit au compte » du client et la liberté du banquier. La décision de la Cour de cassation du 30 juin 2021 permet de comprendre comment ces deux droits opposés peuvent être conciliés. Plus précisément dans cette affaire, les juges apportent des précisions sur la clôture unilatérale, à l'initiative du banquier, d'un compte ouvert grâce à la procédure du « droit au compte ».
[...] D'un point de vue légal, la banque faisait référence au premier motif légitimant la résiliation unilatérale, mentionné par l'article L.312-1, IV, du CMF, à savoir « l'utilisation du compte pour des opérations que l'organisme a des raisons de soupçonner comme poursuivant des fins illégales ». Étant donné que le client de la banque, la société K. était impliquée dans un circuit économique avec une société iranienne, frappée des sanctions économiques internationales, il était justifié pour la banque de constater un fonctionnement « atypique » du compte. Dans ces circonstances, force est de constater que la banque a rempli son obligation de motivation. À ce sujet, les juges ne font aucune objection. [...]
[...] C'est à l'aune de cette ordonnance, plus précisément de l'article L. 312-1, IV, du code monétaire et financier que se prononcent les juges de la Cour de cassation dans la présente affaire. Ils indiquent tout d'abord que « l'établissement de crédit peut résilier unilatéralement la convention de compte assorti de services bancaires de base, ouvert en application du droit au compte ». En interprétant ces propos, la banque peut toujours, comme elle le pouvait avant, résilier unilatéralement la convention de compte issue d'une procédure du « droit au compte » censée protéger le client. [...]
[...] En effet, la large interprétation de la notion « d'utilisation du compte » peut être génératrice des abus consistant en la multiplication des ruptures unilatérales des conventions de compte sans aucun préavis. Dans une telle perspective, le « droit au compte » se voit d'autant plus menacé. Quoiqu'il en ait des critiques d'une telle approche, la popularité du droit au compte ne fait que diminuer. De ce phénomène témoignent les dernières données statistiques. En réalité, son utilisation annuelle décroît régulièrement (60 093 ouvertures en 2017, 55 979 en 2018, 51 668 en 2019 et 36 056 en 2020). Cependant, ce droit mériterait d'être préservé et protégé. [...]
[...] Par ce raisonnement, les juges admettent une logique de prévention en la matière. Autrement dit, dès qu'il y a un soupçon, en l'occurrence, la communication du RIB à un partenaire commercial frappé des sanctions économiques extraterritoriales pour l'obtention d'un virement, la banque peut agir sans préavis afin de clôturer le compte du client. En effet, la banque n'est pas obligée d'attendre la réalisation de l'opération atypique. Ainsi, les juges du quai de l'Horloge se prononcent en faveur d'une anticipation au détriment du « droit au compte » et au profit de la liberté du banquier, eu égard au risque financier encouru par les banques. [...]
[...] La Cour d'appel de Grenoble ayant donné raison à la société et la banque n'étant pas d'accord avec cette position, un pourvoi en cassation a été formé. Le pourvoi fait grief à l'arrêt d'appel d'avoir considéré, par sa décision du 6 décembre 2018, que la banque n'avait pas régulièrement notifié, ni dans la forme ni au fond, la résiliation du compte de dépôt ouvert au nom de la société K. Il allègue, dans une 7e branche, que l'article L.312-1-IV permet la résiliation de la convention de compte sans préavis si « le client a délibérément utilisé son compte pour des opérations que l'organisme a des raisons de soupçonner comme poursuivant des fins illégales ». [...]
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