Cour de cassation chambre commerciale 7 juin 2006, cession de créances professionnelles, cession Dailly, article L.313-23 du Code monétaire et financier, loi du 2 janvier 1981, dénomination juridique, mention obligatoire d'un bordereau, détermination des créances cédées, établissement de crédit
En l'espèce, plusieurs magasins relevant du même groupe de sociétés ont contracté avec une société. Cette société a cédé ses créances à l'encontre de ces magasins à une banque, cela selon les modalités de la cession Dailly. La société ayant cédé ses créances sera par la suite déclarée en procédure collective. La banque cessionnaire assigne ensuite la société mère du groupe en paiement des diverses créances dont elle est désormais propriétaire, lesquelles correspondent à des prestations exécutées par la société cédante pour les différents magasins appartenant à ce groupe (qui sont les établissements secondaires de la société assignée en paiement).
Pour s'opposer à la demande de paiement de la banque, la société assignée se prévalait d'une part de l'irrégularité des bordereaux, au motif qu'ils ne la mentionnaient pas elle comme débiteur cédé, mais seulement les magasins (ses établissements secondaires), où avaient été effectuées les prestations. Sur cet argument tiré du défaut de mention du débiteur cédé, la société avait été déboutée par la Cour d'appel de Toulouse le 24 juin 2004.
[...] Ce rigorisme traditionnel de la Cour de cassation quant aux mentions obligatoires est donc, en réalité, l'application des conditions de forme strictes que prévoit l'article L. 313-23 du Code monétaire et financier, qui fait la liste de ces mentions. On constate aisément que celui-ci, quant à la mention du débiteur cédé, ne l'évoque qu'au titre de l'exigence de « la désignation ou l'individualisation des créances cédées », laquelle peut « notamment » être réalisée « par l'indication du débiteur, du lieu de paiement, du montant des créances ou de leur évaluation et, s'il y a lieu, de leur échéance ». [...]
[...] L'absence d'incidence du défaut de la mention du débiteur cédé En l'espèce, le bordereau de cession évoquait les magasins de la société assignée en paiement par la banque, et non elle-même. Il est vrai qu'en droit, la dénomination juridique de la société mère est distincte de la dénomination juridique de ses établissements secondaires, ce qui est tout à fait logique étant donné qu'elles sont des personnes morales différentes. Ici, nous ne savons pas si les magasins correspondent à des filiales au sens juridique du terme. [...]
[...] Ainsi, si la Cour semble moins souple en ne prenant pas en considération ces notifications, au regard du raisonnement juridique, cette solution est tout à fait rigoureuse. En outre, il ne serait pas nécessairement plus opportun de prendre en considération les actes de notification. En effet, si le pragmatisme est une caractéristique essentielle du droit des affaires, telle l'est aussi la sécurité juridique. Les parties à l'opération de cession, mais également le tiers assigné en paiement, ont intérêt à ce que les informations relatives à la cession puissent nécessairement être retrouvées dans un seul et même document, à savoir le bordereau. [...]
[...] En tout état de cause, et au regard des commentaires de doctrine relatifs à cet arrêt, il paraît qu'une interprétation plus extensive peut être faite de l'arrêt, laquelle consisterait à en tirer l'enseignement suivant : l'absence de mention de l'identité du débiteur cédé n'entache pas la validité du bordereau si la créance est correctement identifiée. Il paraît alors particulièrement important de saisir le contenu de cette exigence d'identification des créances cédées. II. La précision du contenu de l'exigence de détermination des créances cédées La détermination des créances cédées fait partie des mentions obligatoires. [...]
[...] Cet arrêt précise les contours de cette exigence en ce qu'il rappelle les nombreux éléments pouvant le cas échéant participer de cette détermination L'arrêt semble en outre préciser que le support sur lequel doit être apposée cette identification de la créance est le bordereau A. Les critères nécessaires à l'accomplissement de l'exigence de détermination des créances cédées La Cour de cassation reprend les critères donnés par l'article L. 313-23, et précise explicitement qu'il s'agit d'exemples. Il ne s'agit donc pas d'une définition rigoureuse de cette exigence qui est proposée par les juges, au sens où l'emploi de l'adverbe « tels que » démontre bien une volonté illustrative. [...]
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