Les effets de commerce peuvent être définis comme des titres négociables constatant au profit du porteur l'existence d'une créance à court terme et servant à son paiement (Droit commercial, G. Ripert et R. Roblot). Différents effets de commerce coexistent, parmi eux la lettre de change, également appelée traite, est un titre remis par le tireur au porteur et conférant à ce dernier le droit de se faire payer une certaine somme d'argent par le tiré ou de le transmettre à son tour. En effet, les lettres de change ont vocation à circuler. Ainsi, plutôt que demander le paiement au tiré, le bénéficiaire peut le signer au dos et le nouveau bénéficiaire devient porteur ou endossataire. Ce mécanisme de transmission est appelé « endossement ».
La loi régit ces actes juridiques d'endossement aux articles L511- 8 et suivants du Code du commerce. Toutefois, ces règles n'envisagent que de manière superficielle les conditions permettant la qualification des effets découlant de l'endossement, ainsi que les sanctions en cas de non-respect de ces règles. La jurisprudence a donc été amenée à éclairer cette pratique et étoffer le corps de règles s'y appliquant.
En l'espèce, la chambre commerciale de la cour de cassation, le 24 septembre 2002, a dû se prononcer face à la requête d'une banque, se prévalant de la qualité de porteur de lettres de change, acceptées par le tiré. Dans les faits, des lettres de change entre la société Cadi (tireur) et la société Berpimex (tiré) ont été passées. Par la suite, le tireur, souhaitant faire circuler l'acte, le fait endosser par un premier établissement de crédit (la société Banco de Sabadell) puis par un second (la Société Générale). L'établissement de crédit, premier endossataire, se prévaut ainsi devant les juges, de la qualité de porteur, afin de pouvoir réclamer le paiement, par le tiré, de la lettre de change par lui acceptée.
La chambre commerciale de la cour de cassation a donc dû prononcer afin de déterminer si l'endossement, au regard de la clause à ordre, n'a pas investi la seconde banque d'un simple mandat d'encaissement.
[...] Dans cette hypothèse, l'endosseur reste titulaire des droits résultant du titre. La tentation est donc grande pour certains acteurs de simuler un endossement translatif, plus avantageux pour l'endossataire et plus protecteur également, notamment du point de vue des obligations de garantie renforcées, en présence d'un simple endossement par procuration, sans effet translatif et assimilable à un simple mandat de droit civil. Précisons notamment, que le mandaté n'est pas, en matière de recouvrement de la créance, garant de la solvabilité du débiteur tandis qu'un endosseur augmente, par sa signature, la certitude du paiement. [...]
[...] En effet, nous sommes ici en présence d'un exemple de la théorie de simulation en vertu de laquelle la société générale (deuxième endossataire) semble avoir reçu, par transmission, la propriété de l'effet alors qu'en réalité il ne s'agit probablement que d'un endossement par procuration, assimilable à un mandat de recouvrement ou d'encaissement. Afin d'assurer la sécurité juridique des conventions, au détriment de la volonté des parties, la cour estime que le simple doute quant à la qualité des intervenants, et quant à la qualification de l'endossement, entraîne la qualification de l'acte en endossement translatif. Par voie de conséquence, les intentions des parties sont quelque peu écartées, au profit de la sécurité juridique de l'acte. [...]
[...] En l'espèce, il semblerait que les parties aient préféré agir en vertu d'un endossement par procuration, sans pour autant le dévoiler comme tel aux tiers puisqu'ils lui ont donné l'apparence d'un endossement translatif. B la théorie de la simulation Les endossements de lettres de change peuvent être translatifs ou non translatifs. Dans le premier cas, ils seront soumis à une réglementation particulière, échappant ainsi aux formalités énoncées par l'article 1690 C.Civ concernant la cession ordinaire de créances. En effet, l'endossement permet l'application de la règle d'inopposabilité des exceptions, dérogeant ainsi à la règle suivant laquelle nul ne peut transmettre plus de droits qu'il n'en a lui-même. [...]
[...] Pour autant, le danger d'une telle pratique consiste en ce que les tiers, non informés du subterfuge, restent susceptibles d'endosser à nouveau un acte alors que le présumé concessionnaire n'a aucun droit sur celui-ci étant donné qu'il n'est, en réalité, qu'un simple mandaté, agissant au nom et pour le compte du porteur réel de l'acte, son mandant. La Cour de cassation, dans cet arrêt, ne semble pas blâmer cette pratique. Nous verrons par la suite qu'elle l'encadre en faisant primer la sécurité juridique des parties. [...]
[...] Cette situation apparente étant celle de l'endossement par la Société Générale de la lettre de change. La société Banco de Sabadell ne peut donc agir en paiement de la créance dans la mesure où elle est réputée avoir cédé sa qualité de porteur à l'endossataire de l'acte, à savoir la Société Générale. Dorénavant, c'est la Société Générale qui pourra agir afin d'obtenir le recouvrement de la dette de la société Berpimex. Le fait que la société débitrice, tirée, n'est pas émise de contestation quant à la qualité de porteur du premier endossataire ne semble pas ici entrer en compte. [...]
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