Alfred de Musset, dans Poésies Nouvelles, « La nuit d'octobre » s'écriait :
« Jours de travail ! Seuls jours où j'ai vécu ! »
De nos jours, le mot « travail » connaît une large utilisation : l'ouvrier, le cadre, mais aussi l'enfant à l'école, le peintre devant sa toile, le bois travaillent. Cela illustre la conception d'Alfred de Musset qui assimile le travail à la vie. Ce constat amène deux remarques différentes : d'une part, cette inflation témoigne de l'ampleur du phénomène « travail » en tant qu'activité dans la société actuelle, et d'autre part, on peut se demander si cette extension n'altère pas l'essence même du travail en le banalisant. Le travail renvoie-t-il encore à quelque chose de précis ?
Dans nos sociétés contemporaines industrialisées, le travail est primordial, car c'est autour de lui que tout s'organise. Le travail en tant qu'emploi permet de gagner de l'argent pour consommer et donc pour vivre. Il permet également aux individus d'atteindre des objectifs, d'apprendre la vie en collectivité, d'être reconnu, de se sentir utile. Mais plus généralement, le travail, et notamment le travail intellectuel est inhérent à l'homme raisonnable et créateur. En somme, le travail est la valeur cardinale de nos sociétés humaines.
Le travail, une valeur en voie de disparition est le titre d'un ouvrage paru en 1995 de Dominique Méda, ancienne élève de l'ENA, agrégée de philosophie. Selon Dominique Méda, le statut du travail est en lui-même une question centrale pour nos sociétés occidentales, parce qu'il constitue l'une de leurs dimensions essentielles. Actuellement, le travail est régi, plus que jamais, par l'efficacité, ce qui fait que d'une part l'individu n'a aucune autonomie et d'autre part que le souci de productivité entraînera une inéluctable réduction de besoins en travailleurs. Dominique Méda propose un « desserrement de la contrainte travail » sous forme d'une réduction de la place du travail dans nos vies, en construisant une société basée sur le « service » afin que la différence entre le travail et le non travail s'estompe.
La réflexion de Dominique Méda s'appuie sur le postulat que le fonctionnement « normal » de nos sociétés « le plein emploi à plein temps pour tous » est remis en cause par la diminution et la raréfaction du travail. Il est vrai que l'évolution de la place du travail dans la vie humaine ne cesse de diminuer : en 1848 la semaine de travail était de 84 heures, en 1900 de 70 heures, en 1906 de 60 heures, en 1919 de 48 heures, en 1936 de 40 heures, en 1982 de 39 heures, et depuis 1998 de 35 heures. On peut penser que cette évolution se poursuivra. Verrons-nous la fin du travail ?
La fin du travail est un ouvrage de Jeremy Rikfin paru en 1995. Selon lui : « Jamais l'économie occidentale ne créera suffisamment d'emplois pour équilibrer les réductions d'effectifs entraînées par la révolution de l'information ». Certes, atteindre le plein emploi est impossible. Mais peut-on pour autant parler de la fin du travail, dans une société toute entière fondée sur cette notion ? Est-il possible qu'un jour le travail disparaisse purement et simplement ?
Dans une première partie, nous développerons les raisons et les conséquences de cette centralité. Dans une deuxième partie, nous développerons la notion de travail comme valeur en voie de mutation et non en voie de disparition.
[...] La solidarité développée par le travail, elle-même, apparaît menacée. L'exemple du monde ouvrier reflète cette situation. En effet, ce monde était marqué par des rencontres quotidiennes sur le lieu de travail, les discussions au café, les luttes communes. Mais, cette culture vole en éclat avec la tertiarisation, l'isolement des ouvriers à leur poste de travail et l'affaiblissement des syndicats La précarisation du travail et l'exclusion professionnelle Les emplois précaires se développent de plus en plus (poussée des CDD et des stages). [...]
[...] Dans son ouvrage intitulé Pour en finir avec la fin du travail de 1998, la sociologue dynamite l'idée selon laquelle le travail serait une valeur en voie de disparition. Sans nier le développement de la précarité, qu'elle minore cependant, la sociologue reconnaît que, même s'il s'est complexifié, le travail conserve sa place essentielle dans la vie économique. [...]
[...] Le travail est donc à l'origine d'une légitimité sociale. Le travail et notamment le travail en entreprise joue un rôle de socialisation. En effet, les échanges que suppose la poursuite d'une activité professionnelle sont symboliques. En exerçant une activité professionnelle, l'individu s'intègre à un groupe, avec ses valeurs, ses rites et ses pratiques. L'univers professionnel peut être considéré comme une sous-culture qui contribue au sentiment d'identification. Elle distingue les individus, y compris dans leur apparence extérieure (physique, langage, habillement) et dans leur emploi du temps (type de loisirs). [...]
[...] Les transformations qui affectent le monde du travail semblent avoir une responsabilité très grande dans la fracture sociale qui s'aggrave de nos jours. Il y a donc bien un risque d'une société à plusieurs vitesse : d'un côté les emplois stables, bien rémunérés et bien protégés, de l'autre, le chômage ou les emplois dévalorisés qui conduisent le plus souvent à une disqualification sociale, entre les deux une part de plus en plus importante de la population qui se sent menacée. [...]
[...] Au cœur de l'activité humaine dans les sociétés industrielles modernes, il est une des principales préoccupations contemporaines. Une valeur toujours d'actualité Le père fut sage De leur montrer, avant sa mort, Que le travail est un trésor. La Fontaine, Le laboureur et ses enfants. Le travail est aujourd'hui un bien recherché, car c'est un produit devenu rare. Le développement du chômage de masse met, aujourd'hui, la question du travail au premier plan dans la société. Le chômage actuel se caractérise essentiellement par son ampleur et sa durabilité en dépit des nettes améliorations intervenues depuis 1999. [...]
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