Les nombreux litiges issus du droit du divorce ou encore des baux d'habitation démontrent l'importance reconnue actuellement au logement familial et à sa définition.
Dans le cadre du régime primaire impératif contenu aux articles 212 à 226 du Code civil -c'est-à-dire l'ensemble des règles applicables à tous les époux, relatives à leurs rapports pécuniaires, quel que soit leur régime matrimonial-, les époux se voient imposer des règles destinées à assurer leur interdépendance : parmi celles-ci, les règles relatives à la contribution aux charges du mariage, la solidarité ménagère et enfin, la protection du logement familial.
Celle-ci ne se limite pas au droit des régimes matrimoniaux, comme le montrent, par exemple, les dispositions permettant de réaliser une déclaration d'insaisissabilité sur sa demeure principale (art. L. 526-1 Code comm.). Mais c'est l'article 215 du Code civil qui constitue le fondement d'une protection spécifique.
Introduit dans le Code civil dès 1958, il vise à assurer sa protection, en particulier contre les actes du conjoint qui pourraient aller à l'encontre de l'intérêt de la famille. Ainsi, l'article 215 dispose, dans son alinéa 3 issu de la loi du 13 juillet 1965, que « les époux ne peuvent l'un sans l'autre disposer des droits par lesquels est assuré le logement de la famille, ni des meubles meublants dont il est garni (…) » et prévoit une sanction en cas de non-respect de cette règle : la possibilité de demander la nullité.
La protection instaurée consiste donc en l'interdiction des actes de disposition par un seul des époux, dont le corollaire est l'exigence du consentement des deux époux dans les actes relatifs au logement familial et aux meubles le garnissant ; autrement dit, tout ce qui constitue le cadre de vie habituel de la famille, sa « valeur extrapatrimoniale ». C'est en effet ce qui soude la famille (Terré). Cette attention particulière portée au logement familial se justifie également par le fait qu'il constitue souvent le seul bien de valeur du ménage ; il est donc la « proie » des créanciers.
Les termes de l'article 215.3 amènent cependant à se poser plusieurs questions. Tout d'abord quant au contenu de la notion de logement familial ; des hésitations ont pu avoir lieu en jurisprudence, par exemple dans les cas relatifs aux résidences secondaires : sont-elles protégées par le régime primaire impératif ?
De même, l'on peut s'interroger sur la durée de cette protection ; quid des situations matrimoniales de crise, par exemple en cas de séparation de fait ? En effet, c'est dans ce type de situations que la protection trouve le plus souvent son intérêt.
Selon M. Malaurie et Aynès, la disposition générale de l'article 215 alinéa 3 est celle, du régime primaire, qui a suscité le plus important contentieux.
Il convient donc de s'interroger sur l'étendue de la protection instaurée par le régime primaire impératif et autres dispositions liées. Quel est le domaine réel de la protection du logement familial dans le cadre de l'article 215.3 du Code civil et comment s'applique-t-elle?
Les termes de la loi appellent des précisions quant à l'étendue matérielle de la protection (I), ainsi qu'à ses modalités d'application (II).
[...] Ainsi, la large protection résultant de l'article 215 alinéas complétée par d'autres articles du Code civil, présente certaines failles. Cependant, elle reste efficace par les sanctions qu'elle permet contre les actes entrant dans son champ d'application. II. Une protection assurée par l'exigence du consentement des deux époux Par le biais de l'exigence de codécision le législateur tend à préserver le toit des époux ; il paraît ainsi logique de sanctionner un acte passé en violation de cette règle A. La co-gestion exigée du logement familial Cette règle démontre la volonté du législateur d'assurer l'association des époux dans la vie de tous les jours mais la protection qui en découle est toute relative L'exigence du double consentement Pour assurer à la famille la stabilité du logement familial, la loi dispose que Les époux ne peuvent l'un sans l'autre ; l'idée est d'organiser un partage des pouvoirs quant à la gestion des biens. [...]
[...] La protection du logement familial par les règles du régime primaire impératif Les nombreux litiges issus du droit du divorce ou encore des baux d'habitation démontrent l'importance reconnue actuellement au logement familial et à sa définition. Dans le cadre du régime primaire impératif contenu aux articles 212 à 226 du Code civil -c'est-à-dire l'ensemble des règles applicables à tous les époux, relatives à leurs rapports pécuniaires, quel que soit leur régime matrimonial-, les époux se voient imposer des règles destinées à assurer leur interdépendance : parmi celles-ci, les règles relatives à la contribution aux charges du mariage, la solidarité ménagère et enfin, la protection du logement familial. [...]
[...] L'indisponibilité du logement familial ? Une autre limite à l'application de 215.3 a été développée par la jurisprudence, qui refuse de considérer les dispositions de l'article comme s'opposant à la saisie du logement par un créancier de l'un des époux -dans les limites de chaque RM- (voir 1re civ. 21/06/78 puis 4/07/78). Cela constituerait une insaisissabilité contraire à la loi. La jurisprudence n'admet comme exception que les cas de fraude. À noter que celle-ci est appréciée de façon très restrictive, puisqu'il faut démontrer deux éléments : l'époux avait conscience d'exposer le logement à un risque de saisie, et le cocontractant était au courant de la situation complice de l'époux débiteur. [...]
[...] Ceci se justifie par le fait que le cautionnement en général est une sureté personnelle ; il ne peut donc menacer directement le logement familial. Mais il a quand même une nécessité de protéger le logement, car comme nous l'avons dit c'est souvent le seul bien de valeur du ménage ; d'autant plus que s'il est saisi, la famille se retrouve à la rue. La solution est donc l'indisponibilité : elle consiste à interdire au créancier personnel d'un époux de saisir le logement familial en l'absence du consentement du conjoint à l'engagement à l'origine de la créance. L'indisponibilité est donc relative (Terré). [...]
[...] L'arrêt de principe, rendu par la 1re Chambre civile de la Cour de cassation le 22/10/74 énonce une solution qui peut paraitre sévère, mais néanmoins tout à fait logique, puisque les devoirs du mariage cessent à sa dissolution ; est aussi prise en compte la nécessité de respecter la liberté de tester (sinon les époux devraient faire leur testament ensemble -précisons que cette jurisprudence est tempérée par des dispositions , or du cadre du RPI, cf. art + 764 a 766-). Le cas des baux mérite une attention particulière. La mise à bail d'habitation est en effet classiquement considérée comme un acte d'administration par la loi (ex : règles sur l'indivision). Mais la jurisprudence admet parfois que la protection joue pour un bail comme le démontre un arrêt rendu par la 1re Chambre civile de la Cour de cassation le 16 novembre 2000. [...]
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