Y a-t-il un modèle français de l'évaluation qui s'opposerait au modèle dominant au niveau international, d'origine anglo-saxonne ? Compte tenu de la diversité et du caractère généralement peu structuré des pratiques d'évaluation qui se sont développées au sein de l'administration, et du manque de recul dont on dispose pour faire le bilan du dispositif interministériel, parler de modèle français est pour le moins prématuré. Il est néanmoins d'ores et déjà possible d'identifier des tendances propres à la France en matière de démarches évaluatives et surtout d'usage social de l'évaluation. Connaître ces tendances peut être utile pour apprécier les chances et les conditions le développement d'une pratique qui est née au sein d'une culture politique et administrative très différente de la nôtre et dont l'introduction dans notre pays pose un réel problème d'acculturation. Pour ce faire, on analysera successivement les objets de l'évaluation, la logique de la demande d'évaluation, les modes d'institutionnalisation et de professionnalisation de l'évaluation en France et dans quelques pays où celle-ci a connu un développement plus précoce. Cette étude comparative portera principalement sur les évaluations pratiquées au niveau central de l'administration d'État, les informations disponibles sur les évaluations locales étant trop parcellaires. (...)
[...] De plus, la majeure partie des études universitaires sur l'évaluation traite de l'évaluation de programme. Aux Pays-Bas, la procédure de réexamen (reconsideration procédure), qui consiste en une remise à plat complète de blocs de dépenses publiques débouchant sur des décisions budgétaires, est désignée par Mme Bemelmans- Vidée comme une pratique d'évaluation de politiques, le terme de politique désignant dans ce cas un ensemble de programmes concernant un domaine particulier de l'action gouvernementale. En revanche, la charte du Centre d'évaluation des programmes, organisme créé pour développer la recherche et renseignement des méthodes scientifiques d'évaluation, indique que le champ de ses activités peut se définir par la nature programmatique des politiques, mesures, lois ou autres, qui doivent être évaluées : au minimum, une reconstruction en termes d'objectifs et de moyens doit être possible pour que l'évaluation de programme ait un sens Au Canada, en Australie et en Allemagne, on parle presque exclusivement l'évaluation de programme. [...]
[...] Et cependant, pour chacune d'entre elles, il y a des conséquences que les décideurs voudront connaître. Par exemple : savoir si les politiques ont été correctement appliquées par l'administration et si elles ont eu les effets attendus constituent deux éléments stratégiques de l'information rétrospective Contrairement à ce que cette citation pourrait laisser croire, l'opposition programme/ politique ne se résume pas à une opposition fourniture d'un service public/réglementation. En France, le terme de politique peut aussi bien désigner un ensemble complexe de programmes qu'une politique réglementaire. [...]
[...] Ce qui ne signifie pas que les tentatives faites pour connaître ses effets soient inutiles, bien au contraire. L'effort d'identification des effets et l'interrogation sur la possibilité de les mesurer ont deux types de retombées indirectes : * ils aident à reformuler en termes instrumentaux les objectifs de la politique, ou à souligner le caractère flou et non opérationnel de ces objectifs; * ils produisent des effets didactiques en amenant les décideurs et acteurs de terrain à s'interroger plus concrètement sur les résultats de leurs actions. [...]
[...] Dans la circulaire de 1989, la dimension managériale de l'évaluation et son lien avec la gestion budgétaire sont à peine évoqués par la nécessité d'évaluer l'efficacité du service Le contraste est saisissant avec les textes équivalents émanant de l'administration britannique. Pourtant, le développement récent de l'évaluation en Grande-Bretagne est également lié à un effort de modernisation de l'État. La comparaison entre les deux démarches est instructive : la notion de responsabilité, qui joue un grand rôle dans l'un et l'autre pays, n'y revêt pas exactement la même signification. Les Britanniques mettent l'accent sur la notion d'imputabilité ou la capacité à rendre des comptes (accountability), qui renvoient aux obligations précises du responsable administratif vis-à-vis du pouvoir politique et du Parlement. [...]
[...] Compte tenu de la diversité et du caractère généralement peu structuré des pratiques d'évaluation qui se sont développées au sein de l'administration, et du manque de recul dont on dispose pour faire le bilan du dispositif interministériel, parler de modèle français est pour le moins prématuré. Il est néanmoins d'ores et déjà possible d'identifier des tendances propres à la France en matière de démarches évaluatives et surtout d'usage social de l'évaluation. Connaître ces tendances peut être utile pour apprécier les chances et les conditions le développement d'une pratique qui est née au sein d'une culture politique et administrative très différente de la nôtre et dont l'introduction dans notre pays pose un réel problème d'acculturation. [...]
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