Le Général de Gaulle, dans la conférence de presse du 31 janvier 1964 distingue le pouvoir législatif du pouvoir réglementaire en répartissant ces pouvoirs aux différentes autorités étatiques en vue de leur action pour la France : « Quant à la répartition des pouvoirs, elle a été observée suivant ce que prévoit notre Constitution. Les rôles attribués respectivement : au Président, garant du destin de la France et de celui de la République, chargé par conséquent de graves devoirs et disposant de droits étendus ; au Gouvernement, nommé par le chef de l'Etat, siégeant autour de lui pour la détermination et la mise en œuvre de la politique et dirigeant l'administration ; au Parlement, exerçant le pouvoir législatif et contrôlant l'action du ministère, ont été remplis ainsi que l'exigeait la volonté du pays, les conditions où nous nous trouvions, l'obligation de mener les affaires d'une manière ferme, active et continue ». Chaque corps de l'Etat se voit donc attribuer un certain domaine de compétence auquel est joint des moyens pour « mener » à bien « les affaires » de l'Etat. François Mitterrand, quant à lui, se penche plus particulièrement sur le cas du Gouvernement dans un message au Parlement le 8 avril 1986 : « Le Gouvernement de son côté, a pour charge, aux termes de l'article 20, de déterminer et de conduire la politique de la Nation. Il assume, sous réserve des prérogatives du Président de la République et de la confiance de l'Assemblée, la mise en œuvre des décisions qui l'engagent devant les Français. Cette responsabilité est la sienne ». Ainsi, le Gouvernement, en charge « de déterminer et de conduire la politique de la Nation », se voit donc conférer par la Constitution l'exercice du pouvoir réglementaire pour assurer sa tâche. Cependant, il est capital de préciser la composition du Gouvernement. Le terme « Gouvernement » est très clair : ce dernier est, entre autres, composé du Premier ministre et de ses ministres.
Cependant, il en va différemment pour le terme « les ministres » du sujet qui soulève une certaine ambiguïté : le terme « ministres » doit-il être pris au sens de « Gouvernement » (incluant ainsi le Premier ministre) ou bien au sens strict (sans inclure la personne du Premier ministre) ? Autrement dit, le Premier ministre est-il considéré comme partie intégrante des « ministres » ? Nous présenterons ce sujet en considération d'une réponse positive à l'égard de cette question pour au moins trois raisons.
Premièrement, sous une interprétation purement littérale, le terme « Premier ministre » signifie « le premier des ministres ». Par conséquent, le Premier ministre est donc un ministre avec statut particulier, et donc le terme « ministres » sera compris au sens large et associera de facto la personne du Premier ministre.
Deuxièmement, le terme « ministres » n'exclu pas d'emblée la personne du Premier ministre. Le contraire amènerait à amputer (par une interprétation (trop) restrictive du champ expansif qu'implique cette dénomination prise au pluriel) le sens général et donc non restrictif du terme « ministres » qui peut et doit être pris en compte.
Troisièmement, l'action au sein de l'Etat des ministres (stricto sensu) est détaillée dans les mêmes articles de la Constitution que l'action du Premier ministre (articles 20 à 23). Cela insinue que le Premier ministre mène son action en corrélation avec celle de ses ministres. Ceci expose le phénomène d'interdépendance existant entre le Premier ministre et ses ministres qui résulte du fait que le Premier ministre, par délégation ou partage de son pouvoir, offre à ses ministres la jouissance du pouvoir réglementaire. Il conviendra donc d'associer la qualification « Premier ministre » et celle de « ministres » (stricto sensu) puisqu'elles sont complémentaires (et donc indissociables, inséparables), et ainsi de traiter les pouvoirs primo-ministériels et ministériels sous la dénomination de pouvoir réglementaire « des ministres » (au sens large). Par conséquent, le Premier ministre sera considéré comme partie intégrante des « ministres » lorsqu'on parlera d'eux au sens large du terme et revêtira donc un sens synonyme à « Gouvernement ».
[Il faut tout de même noter que dans un souci de clarté dans les dénominations (Premier ministre / ministres stricto sensu / ministres au sens large) ainsi que dans celui de marquer des différences de forme des compétences réglementaires en fonction de son titulaire, le pouvoir réglementaire du Premier ministre et le pouvoir réglementaire des ministres (au sens strict du terme) seront abordés séparément dans le développement (respectivement dans les « A) » pour le Premier ministre et dans les « B) » pour les ministres stricto sensu) mais restent englobés sous la dénomination générale de « ministres » tel que l'annonce le sujet.]
Le terme « et » du sujet sera, quant à lui, pris au sens d'une notion de relation entre les ministres et le pouvoir réglementaire. Ainsi, le « et » signifie que les ministres sont titulaires du pouvoir réglementaire ou compétents pour exercer ce pouvoir.
Enfin, le terme « le pouvoir réglementaire » du sujet est pris au sens de l'article 37 de la Constitution (c'est à dire un pouvoir différent du pouvoir législatif) et aux sens des articles 20 et 21 de la Constitution (c'est à dire un pouvoir pris comme moyen pour le Gouvernement « de déterminer et de conduire la politique de la Nation ») et prend donc des formes différentes selon l'utilisation qu'en font ses titulaires.
Concernant la compétence des ministres (au sens large) pour exercer le pouvoir réglementaire, il faut soulever l'apport de deux courants. D'un côté, les textes, et tout particulièrement la Constitution, ont conféré aux ministres (au sens large) dès 1958 un certain pouvoir réglementaire. D'un autre côté, la jurisprudence au XXème siècle est venue compléter et/ou consacrer cette compétence des ministres (au sens large), telle qu'on la connaît aujourd'hui.
Autrement dit, les constituants de 1958, dans un souci purement théorique, ont réparti les compétences en matière réglementaire soit au Premier ministre, soit à ses ministres. Cependant, cette répartition purement textuelle et constitutionnelle se révèle comme étant fortement déséquilibrée au profit du chef du Gouvernement. Les ministres étaient ainsi restreints pour pouvoir assumer leur devoir « de déterminer et de conduire la politique de la Nation » en tant que membre du Gouvernement. C'est ainsi qu'au regard de la pratique, la jurisprudence à effectuer un travail d'affinage en rééquilibrant les pouvoirs des ministres par rapport à ceux du Premier ministre, de manière à ne pas exclure les ministres de l'accomplissement de leur tâche par un manque de moyens. Ce rééquilibrage reste tout de même inégalitaire puisque le Premier ministre est la seule institution à pour disposer du pouvoir réglementaire par principe (confère article 21 de la Constitution).
Par conséquent, il conviendra donc de se demander en quoi les ministres (au sens large) sont-ils titulaires du pouvoir réglementaire ?
Comme énoncé précédemment, cette titularisation des ministres (au sens large), sous diverses formes d'application du pouvoir réglementaire, est d'abord issue d'une source textuelle (I) avant d'être complétée et/ou consacrée par des sources jurisprudentielles (II).
[...] François Mitterrand, quant à lui, se penche plus particulièrement sur le cas du Gouvernement dans un message au Parlement le 8 avril 1986 : Le Gouvernement de son côté, a pour charge, aux termes de l'article 20, de déterminer et de conduire la politique de la Nation. Il assume, sous réserve des prérogatives du Président de la République et de la confiance de l'Assemblée, la mise en œuvre des décisions qui l'engagent devant les Français. Cette responsabilité est la sienne Ainsi, le Gouvernement, en charge de déterminer et de conduire la politique de la Nation se voit donc conférer par la Constitution l'exercice du pouvoir réglementaire pour assurer sa tâche. Cependant, il est capital de préciser la composition du Gouvernement. [...]
[...] La jurisprudence reconnaît en 1986 ce pouvoir réglementaire mais le limite assemblée juin 2000, Association Choisir la vie et autres ; CC janvier 1990). Le Conseil constitutionnel reconnaît également que le législateur, en vertu de l'article 21 de la Constitution, habilite les ministres à exercer le pouvoir réglementaire en vue de prendre des mesures d'application d'une loi à condition que cette habilitation ne concerne que des mesures de portée limitée tant par leur champ d'application que par leur contenu (CC septembre 1986, Liberté de communication). [...]
[...] C'est ainsi que même si elles sont gonflées par l'apport de la jurisprudence, les compétences réglementaires des ministres restent bien moindres que celles attribuées au chef du Gouvernement. [...]
[...] Ce rééquilibrage reste tout de même inégalitaire puisque le Premier ministre est la seule institution à pour disposer du pouvoir réglementaire par principe (confère article 21 de la Constitution). Par conséquent, il conviendra donc de se demander en quoi les ministres (au sens large) sont-ils titulaires du pouvoir réglementaire ? Comme énoncé précédemment, cette titularisation des ministres (au sens large), sous diverses formes d'application du pouvoir réglementaire, est d'abord issue d'une source textuelle avant d'être complétée et/ou consacrée par des sources jurisprudentielles (II). [...]
[...] De plus, un tel pouvoir aux ministres envisagerait la possibilité d'éventuelles contradictions issues des normes ministérielles prises à tout va. Ainsi, la jurisprudence souhaite avant tout conserver l'unicité de l'action étatique par voie de règlement Section octobre 1961, Société Duchêne ; CE mai 1969, Société distillerie Brabant). A défaut, les ministres sont dotés d'un pouvoir pararéglementaire (Bertrand Seiller) : ils obtiennent le pouvoir par le Conseil d'Etat d'édicter des directives françaises dans le but d'ordonner à leurs autorités inférieures des orientations, des grandes lignes d'action à respecter section décembre 1970, Crédit foncier de France). [...]
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