Aborder cette question, c'est déjà mettre l'accent sur une des lacunes les plus choquantes du droit. Cette imprévoyance du droit n'est malheureusement pas la seule ainsi que nous allons le constater.
N'ayant pas été nécessairement formés à prendre en compte le tabou de l'inceste comme un commandement fondateur de toute vie sociale, les juristes en mésestiment parfois le rôle. Ainsi en est-il en matière d'adoption entre membres de la même famille, parfois demandées au mépris de l'Interdit fondamental. Les enjeux de certaines demandes en justice ne sont pas toujours perçus par le juge (I). Plus grave encore, le législateur prend le risque de laisser perdurer ou de créer des situations susceptibles à plus ou moins long terme d'aboutir à un inceste (II). Ces deux situations nous invitent à une réflexion sur les difficultés de prise de conscience de la problématique de l'inceste et sur l'avenir du principe d'Interdit en matière juridique.
[...] L'enfant, le couple. 21e éd PUF, coll. Thémis. [...]
[...] L'enfant serait devenu le fils adoptif de son grand-père et le demi-frère adoptif de la fille de celui-ci, son ex-mère. Sa famille d'origine se serait transformée. Par conséquent, dans l'hypothèse du décès du grand-père, l'ex- petit-fils, actuel fils adoptif, viendrait à la succession en concours avec sa propre ex-mère, du même rang qu'elle, en tant que frère adoptif. Sur le plan fantasmatique, ce qui est ainsi proposé à l'enfant, c'est de disputer une place d'enfant auprès du même père pour lui et pour sa mère. [...]
[...] Devenus adultes, ils peuvent se marier entre eux, ou avec un membre de la famille de leur géniteur, voire avec le géniteur lui-même . Même en ayant une vision élargie des prohibitions en matière de mariage et donc en admettant que les empêchements à mariage peuvent découler d'une simple parenté de fait, on ne peut empêcher la réalisation d'une telle union incestueuse, puisque les principaux intéressés se voient refuser tout accès à la connaissance de la réalité de leur filiation biologique. Les médecins, qui pratiquent les P.M.A., reconnaissent que ce risque est réel. [...]
[...] Il n'en reste pas moins que, sur le terrain des principes, cette prise de risque est contestable. C'est dans le domaine de la procréation médicalement assistée que le laxisme du législateur est le plus grave, car il n'est pas seulement théorique. Rappelons en effet que le mécanisme voulu par le législateur a été celui du gommage de l'origine biologique. Dans le cadre du don de gamètes, la loi impose, au départ, d'identifier le donneur. Mais ensuite, tout est organisé pour que le donneur ne soit pas identifiable (art. L. 673- 6 c. [...]
[...] Ces deux enfants, en toute ignorance des procédés de leur conception, se rencontrent, se marient et ont eux-mêmes un enfant. Celui-ci n'est pas né d'une union incestueuse mais se trouve pourtant conçu par deux parents qui ont le même père. Doit-on ou non parler pour les deux parents d'un mariage incestueux ? Leur enfant est-il un enfant incestueux ? Nous avons émis un postulat, à savoir que celui et celle qui sont nés des gamètes du même auteur violait l'Interdit de l'inceste. [...]
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