Bien qu'ils concernent la procédure pénale, ces trois textes méritent, à des degrés divers, qu'on s'y attarde ici en raison de l'ampleur de leurs enjeux pour tout citoyen et tout juriste, même civiliste. On peut en effet considérer qu'en ces textes, pris en application de la loi n° 98-468 du 17 juin 1998 relative à la prévention et à la répression des infractions sexuelles ainsi qu'à la protection des mineurs et dont le but premier était de prévenir la récidive se cristallisent nombre de contradictions de notre société : d'un côté, une volonté croissante de protection de sujets supposés faibles, notamment des femmes et des enfants, d'où la sévérité accrue à l'endroit de la délinquante sexuelle, de l'autre, le souci de ne pas simplement réprimer les délinquants mais également de les soigner, le délinquant sexuel échappant à la dualité criminologique classique entre le fou et l'individu dangereux ; d'une part, le goût immodéré de notre société pour la vérité biologique, manifeste dans des domaines aussi divers que le droit de la filiation ou la recherche historique (par exemple, sur la résolution, par l'ADN, des mystères entourant la mort de Louis XVII et de Nicolas II, V. Le Monde, 21 avr. 2000), d'autre part, sa non moins grande terreur des possibles incidences liberticides de la transparence d'un réseau qui permettrait de tout savoir sur la vie privée de chacun.
Au-delà de l'optimisme que suscite la perspective d'une alliance sereine entre justice et technique, on est assailli par le doute. Laissant de côté certaines questions de technique juridique liées au manque de précision du décret mais qui pourraient sans doute être réglées au moyen de circulaires d'application, on appréciera le bien-fondé et les conséquences de l'introduction d'un tel outil dans notre droit, d'une part en montrant que son efficacité comme mode de preuve est incontestable mais ponctuelle (I), d'autre part en insistant sur la nécessité, pour prévenir le reproche d'un fichier liberticide, de dissiper certaines ambiguïtés du fonctionnement du fichier en son état actuel (II). Précisons que ces quelques remarques s'alimentent à une réflexion déjà abondante chez les juristes anglais, le droit d'Outre-Manche s'étant doté, par une loi de 1995, d'un mécanisme comparable au fichier français, mais à visée plus large puisqu'il n'est pas limité aux seules infractions sexuelles.
[...] Ainsi, il paraît raisonnable, au stade de l'appréciation de la preuve, de ne pas traiter l'empreinte génétique avec plus de respect qu'une autre, hors de son strict champ de pertinence. En revanche, il est permis de se demander si la constitution du fichier et, partant, l'admissibilité de la preuve en résultant, satisfont toutes les exigences de protection des citoyens. II. - Un fichier liberticide ? Des ambiguïtés malencontreuses . Nul doute que le fichier corresponde aux finalités essentielles du droit pénal : disculper les innocents, et prévenir plus rapidement les infractions. [...]
[...] Il y a donc une certaine hypocrisie à prendre prétexte d'une absence de fiabilité totale pour être réservé sur l'usage des empreintes génétiques, d'autant plus que c'est en somme la première fois qu'un mode de preuve intègre et quantifie sa propre marge d'erreur, ce qui permet d'objectiver la force de persuasion de ce type de preuve. C'est pourquoi il faut en comprendre l'objet et la méthodologie avant de déterminer quel peut être son rôle comme mode de preuve dans le procès pénal A. - Objet et méthodologie de la preuve par empreintes génétiques . Il faut d'entrée de jeu insister sur la méthode qui est au fondement de la preuve par empreintes génétiques, à savoir une comparaison, elle-même probabiliste. [...]
[...] section 63 de la loi). En second lieu, il semble qu'ici, comme d'ailleurs en matière civile, à propos des actions en établissement ou en contestation de filiation, on ne formule pas toujours les questions de la façon la plus juste. Il paraît en effet curieux de prétendre que l'intégrité corporelle est susceptible d'être atteinte par le prélèvement d'un cheveu ou de cellules de la peau. Plutôt que l'intégrité corporelle, ce qui paraît en jeu c'est l'intimité de la vie privée et, partant, la légitimité de l'analyse plutôt que celle du prélèvement (et encore M. [...]
[...] Dickinson, dans laquelle la preuve par ADN a permis d'innocenter un suspect ; l'affaire G. George, à l'occasion de laquelle on a déploré l'absence d'un fichier qui aurait peut-être aidé la police à retrouver plus rapidement le coupable. Pourtant, quelle que soit son utilité sociale, il apparaît qu'un tel fichier, en raison même de sa performance, n'est acceptable, du point de vue des libertés de chacun, que s'il satisfait certains critères. Or, sans être ouvertement liberticide, le fichier, en l'état actuel des textes, nous semble comporter des ambiguïtés qu'il serait d'autant plus nécessaire de dissiper qu'elles portent sur des problèmes qui vont au-delà du seul droit pénal. [...]
[...] 53-14 ; sur le problème général de la détermination de la durée de conservation des données contenues dans les fichiers de police). Le fichier est mis en oeuvre par la direction centrale de la police judiciaire du ministère de l'Intérieur et il est placé sous le contrôle d'un magistrat du parquet, hors hiérarchie, nommé pour trois ans par arrêté du garde des Sceaux et assisté par un comité de trois membres (art. R. 53-9 et R. 53- 16). Les articles R. [...]
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