De sa promulgation en 1804 par la loi du 30 ventôse an XII à la chute de l'Empire en 1815 et bien ultérieurement, le Code civil va conquérir l'Europe. Elaboré sous l'impulsion de Bonaparte, Premier consul, il reçoit le nom de Code Napoléon par une loi de 1807 et a bénéficié d'un immense rayonnement. Il demeure l'idéaltype d'un code moderne (même si, bien sûr, quelques articles ont dû être actualisés et d'autres supprimés) et s'appuie sur quatre idées essentielles qui, à leur époque, étaient largement nouvelles et loin d'être naturellement admises : l'unité du droit dans l'ensemble du territoire (ce qui sonnait le glas de tout droit coutumier, territorialement restreint par essence), l'unité de la source juridique (la loi émanant d'un législateur, laissant ainsi une fonction uniquement secondaire au juge, contrairement aux pays de Common Law), la séparation du droit, de la morale et de la religion et enfin, la séparation du droit d'avec la politique.
Aussi brillante que l'œuvre des rédacteurs du code a pu être (on peut par exemple penser à Stendhal qui en lisait quelque articles chaque jour), il ne faut pas oublier que son expansion a commencé sous le signe des conquêtes napoléoniennes. Il serait toutefois injuste de ne voir dans son adoption en Europe, puis dans le monde, que le seul effet des pressions politiques. En effet, le Code jouissait légitimement d'un prestige véritablement considérable.
C'est dans cette optique que son exportation constitue un phénomène majeur dans l'Histoire du droit. Car si d'autres codifications en droit civil ont vu le jour (que ce soit en Bavière avec le code de 1756, en Prusse avec le code de 1794 ou en Autriche avec le code de 1811), aucun n'a connu le rayonnement du Code Napoléon. On peut d'ailleurs avoir en tête les mots du professeur canadien Beaulieu qui observait dans les années 30 que « pareille expansion des lois d'un peuple n'a eu d'égale que la diffusion des lois romaines » ou encore plus récemment aux mots de Zweigert et Kötz qui, dans leur Introduction au droit comparé, parlent du Code Napoléon comme « le plus important du point de vue intellectuel et du point de vue historique le plus fécond ».
[...] On peut lire ceci dans L'influence du Code civil dans le monde, Travaux de la Semaine internationale de droit, Association Henri Capitant des Amis de la culture juridique française et Société de législation comparée On retrouve une idée similaire chez le professeur d'Oxford Lawson, où on peut lire (dans le même ouvrage) : L'influence du Code Napoléon a été assez grande en Angleterre pendant le siècle dernier, mais elle s'est fait sentir indirectement à travers la philosophie du droit et de la doctrine En 1814, en Italie, le Code disparaît en tant que loi positive (sauf dans la principauté de Luque), mais il va très rapidement inspirer des codifications dans plusieurs Etats de l'Italie préunitaire, des Etats monarchiques qui ne partagent l'idéologie impériales mais qui s'inspirent de la codification de Napoléon. On a par exemple les lois civiles de Naples, le Code civil des principautés de Parme et Plaisance, le Code civil piémontais, ou encore le code de Modène. En 1859, dans une période de transition, le Code Napoléon est provisoirement appliqué et une fois le royaume d'Italie organisé et presque unifié (à l'exception de Rome et Venise), un processus de codification mène à l'émergence du Code civil italien en 1865. Il est en partie inspiré du code Napoléon. [...]
[...] Une expansion de cette nature a donc une temporalité bien définie, à savoir de 1804 à 1815. Il fut ainsi introduit au Luxembourg, en Suisse (pour les cantons de Genève et du Jura bernois), en Pologne, en Belgique qui, cédée à la France par l'Autriche en 1797 avec le traité de Campoformio, y fut soumise dès 1804, aux Pays-Bas, en Allemagne et en Italie. Je vais brièvement revenir les exemples néerlandais, allemands, italiens et sur le modèle belge paradoxal et donc très intéressant et révélateur de quelque chose. [...]
[...] Cela est dû au fait que les ordres juridiques étaient indépendants, ce qui a empêché Napoléon de décréter l'implantation du Code civil. d. L'exemple italien En Italie continentale dans les Républiques sœurs une partie du droit français a été imitée sous la pression des armées françaises. Plus tard, dans la Lombardie et la Vénétie (qui constituent le Royaume d'Italie, un royaume dont Napoléon est le roi), à l'exception du code de procédure pénale de Romagnosi, le droit français est imposé pour mettre fin à quelques tensions et autres contestations. [...]
[...] Conclusion En conclusion, je vais revenir brièvement sur le succès symbolique de l'expansion du Code Napoléon. En effet, à mes yeux, dans une optique de théorie des sources du droit, il semble précipiter la défaite des sources réelles (et particulièrement la coutume) par rapport aux sources formelles, comme la loi. Alors que la coutume était une source dogmatique, antiscientifique, territorialement restreinte et à l'application lente, on se rend compte qu'avec le transplant du Code Napoléon un peu partout dans le monde, on trouve une source universelle, en ce sens qu'elle n'est pas dogmatique, applicable partout et immédiatement, et surtout scientifiquement étudiable. [...]
[...] On peut d'ailleurs avoir en tête les mots du professeur canadien Beaulieu qui observait dans les années 30 que pareille expansion des lois d'un peuple n'a eu d'égale que la diffusion des lois romaines ou encore plus récemment aux mots de Zweigert et Kötz qui, dans leur Introduction au droit comparé, parlent du Code Napoléon comme le plus important du point de vue intellectuel et du point de vue historique le plus fécond Je vais profiter de cette présentation pour m'intéresser aux deux types d'expansion dont il a pu faire l'objet. Je commencerai par m'intéresser à son expansion par annexion (pendant l'Empire) puis, dans un second temps, je reviendrai sur son expansion par inspiration (après la chute de l'Empire). Expansion par annexion a. Généralités L'expansion par annexion consiste en une introduction forcée du Code dans un territoire conquis. Elle s'explique bien sûr par les conquêtes militaires napoléoniennes multiples. En effet, bien des pays conquis, voire annexés par Napoléon, sont tombés sous l'emprise de l'homme et de son code. [...]
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