François-Xavier Lucas et Marc Senechal ont pu écrire qu'« Entre la fiducie sûreté efficace mais qui ruine toute chance de redressement et la sauvegarde dont on attend qu'elle fasse des miracles, il va falloir choisir ». Cette déclaration pessimiste révèle l'opposition, la concurrence, qui a pu se constituer entre la matière des procédures collectives et celle des sûretés. Il est important de revenir à la genèse afin de cerner cette opposition.
Le législateur dans les années 1980 et 1990 a profondément retouché le droit des procédures collectives. Afin de parachever ces réformes, une loi du 26 juillet 2005 instaure la procédure de sauvegarde. Elle est présentée comme le fer de lance des procédures collectives. La sauvegarde permet d'offrir aux entreprises en difficultés une solution alternative pouvant échapper au redressement ou à la liquidation judiciaire (...)
[...] Il semble que le droit des procédures collectives et le droit des sûretés aient des objectifs antinomiques. Chacune des institutions qui en sont issues, que ce soit la sauvegarde comme la fiducie sûreté, ne semble pouvoir se développer qu'au détriment de l'autre. Etant la plus récente, nous pouvons nous interroger sur la place qu'occupe la fiducie au sein des procédures collectives. Nous répondrons à ce problème en envisageant dans un premier temps la difficulté de conciliation des procédures collectives et de la fiducie pour ensuite aborder les problèmes pragmatiques liés à la mise en oeuvre de la fiducie (II). [...]
[...] La fiducie est un contrat consensuel qui peut faire l'objet de stipulations conventionnelles. Ainsi depuis la loi du 4 août 2008, on peut prévoir dans le contrat le maintient de la jouissance des biens au constituant, ou encore prévoir que ce dernier devra payer le créancier dès l'ouverture d'une procédure collective. S'agissant du dénouement de la fiducie. Même si la procédure d'insolvabilité du fiduciaire ne touche que son patrimoine personnel et non fiduciaire, le juge pourra dessaisir un fiduciaire sous procédure collective. [...]
[...] La liquidation semble être la seule alternative. Mais si on envisage la fiducie sûreté sans dépossession : le bien continue à être exploité par le constituant et permet de conserver les biens pour une poursuite d'activité et un éventuel plan de redressement. La loi du 4 août 2008 a introduit la possibilité d'un maintient de la jouissance des biens au profit du constituant. Cette hypothèse pourrait régler le conflit entre sûreté avec ou sans dépossession. Ainsi, des dispositions conventionnelles permettent de laisser ou non la libre disposition des biens gagés au constituant débiteur. [...]
[...] Ce serait le cas avec un droit de rétention fictif. Si le plan de sauvegarde échoue, le créancier fiduciaire retrouvera le bien gagé et ne sera pas affecté par la liquidation du constituant. Le droit de rétention du créancier résiste aux effets de la procédure collective. Toutefois ce droit rétention portant sur un gage sans dépossession est inopposable pendant l'exécution du plan mais opposable pendant la liquidation. Ce n'est que si les biens ont été laissés à la disposition du débiteur que la fiducie sera affectée par la procédure collective et paralysée pendant l'exécution du plan. [...]
[...] Il faut trouver un équilibre entre redressement et sûreté. Si le législateur accorde à l'un il doit le retirer à l'autre, d'où l'opposition entre sauvegarde et fiducie. En l'état actuel, une fiducie portant sur une sûreté avec dépossession constitue un frein au redressement du constituant débiteur en procédure collective. Si les biens sont entre les mains des créanciers fiduciaires, le débiteur ne pourra pas connaître un redressement de sa situation. Il n'aura plus de garantie pour d'éventuels nouveaux créanciers, confiants dans ses chances de rétablissement. [...]
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