Dans L'esprit des lois, Montesquieu explique que « les juges de la Nation ne sont (…) que la bouche qui prononce les paroles de la loi ; des êtres inanimés qui n'en peuvent modérer ni la force ni la rigueur. » Il résume ainsi la place qui doit être conférée à la loi dans tout un régime démocratique. Montesquieu et Beccaria ont en effet posé, dès le XVIIIe siècle, les bases du principe de légalité, tel que nous le connaissons aujourd'hui.
Par principe de légalité des délits et des peines, il convient d'entendre que nul ne peut être condamné pour un fait qui, au moment où il l'a commis, n'était pas constitutif d'une infraction au regard de la loi en vigueur. Et, par extension, nul ne peut être condamné à une peine non prévue par le droit au moment où l'infraction a été commise. Ce principe de légalité peut être résumé par l'adage latin « Nullum crimen, nulla paena sine lege. »
Quelle est l'effectivité du respect du principe de légalité ? En d'autres termes, dans quelle mesure le principe de légalité des délits et des peines s'applique-t-il aujourd'hui, dans notre système juridique ? Cela revient donc à s'interroger tant sur la permanence de ce principe, majeur au sein de tout Etat démocratique, que sur les différentes atteintes qu'il a subies. Mis en évidence au XVIIIe siècle, le principe de légalité fut l'une des idées centrales du travail de l'Assemblée Nationale Constituante qui le consacra par la Déclaration des Droits de l'Homme de 1789 et la Constitution de 1791.
Par conséquent, il convient de mettre en évidence, dans un premier temps, le principe de légalité comme un élément central de notre droit (I). Dans un second temps, il est important de modérer cette affirmation, en soulignant un certain nombre d'atteintes portées à ce principe (II).
[...] En considérant le droit pénal, nous pouvons constater que le Code Pénal n'est pas l'unique source de l'incrimination et de la sanction pénale. Par exemple, l'article 221-6-1 du Code de la Route pose une sanction relative au délit d'homicide involontairement commis à l'occasion de la conduite d'un véhicule terrestre à moteur. Pour connaître le droit en vigueur, le citoyen devrait donc se référer, en matière pénale, à différents codes, différents types de normes. En conséquence, le principe de légalité n'accomplit plus réellement sa fonction d'avertissement. [...]
[...] Ainsi, le Code Pénal en vigueur sous l'Allemagne nazie se contentait de disposer que sera puni quiconque commettra un délit que la loi déclare punissable ou qui méritera une peine d'après le sain esprit du peuple. C'est pourquoi, si l'on considère le régime français, le principe de légalité y par essence, un rôle majeur. La Ve République suit le principe de séparation des pouvoirs. Le Parlement élabore les lois et le pouvoir judiciaire s'exerce de manière indépendante, par l'intermédiaire des différentes juridictions. En matière pénale, le juge est lié par les incriminations et les peines prévues par la loi, notamment au sein du Code Pénal. [...]
[...] De cette manière, le pouvoir exécutif pouvait créer des normes, sur délégation du Parlement. La Parlement demeurait le seul compétent en théorie mais, en pratique, il abandonnait une partie du pouvoir législatif à l'exécutif. La Constitution de 1958 a consacré cette pratique en attribuant à l'exécutif un pouvoir réglementaire autonome, chargeant le législatif et l'exécutif d'élaborer des lois ou règlements dans leurs domaines respectifs. Les articles 34 et 37 de la Constitution définissent ainsi les compétences de chacun et officialisent par là même la fin de la domination totale de la loi. [...]
[...] D'autre part, outre la loi, la jurisprudence a très fréquemment fait appliquer ce principe. Son appartenance à la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen fait du Conseil Constitutionnel le premier gardien du principe de la légalité des délits et des peines. Il peut par exemple émettre une réserve d'interprétation, qui s'imposera aux autres juridictions en vertu de l'article 62 de la Constitution, s'il considère qu'un texte n'est pas conforme aux exigences de clarté et d'intelligibilité qu'impose le principe de légalité (Décision du 19-20 janvier 1981). [...]
[...] Ce sont dans ces textes que le principe de légalité s'est imposé en premier lieu. L'article 8 de la Déclaration de 1789 dispose ainsi que nul ne peut être puni qu'en vertu d'une loi établie et promulguée antérieurement au délit, et légalement appliquée. Ce texte a acquis, outre sa valeur symbolique, une véritable valeur juridique. De puis 1946, elle est contenue dans le Préambule de la Constitution et, sous l'empire de la Constitution de 1958, le Conseil Constitutionnel peut sanctionner toute loi qui ne la respecterait pas. [...]
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