L'autonomie de la volonté a régné en maître absolu tout au long du XIXe siècle et d'une bonne partie du XXe siècle. Cette théorie a porté une réponse simple et uniforme à la question de l'intangibilité du contrat. Toutes les dispositions du contrat étaient intangibles parce qu'elles avaient été voulues. La doctrine contemporaine (Ghestin) a mis en évidence que des fondements objectifs tels l'utile et le juste expliquaient davantage la force obligatoire du contrat que la volonté des contrats de se lier. Dans ces conditions, la force obligatoire du contrat, qui a pour corollaire l'intangibilité de l'acte ayant trait à son contenu et l'irrévocabilité de l'acte ayant trait à son existence, peut être assouplie pour des raisons de justice et d'utilité sociale.
Cependant, pendant longtemps, l'assouplissement de l'intangibilité du contrat a été réalisé par des dispositions spéciales dérogatoires par rapport au droit commun tel le droit de la consommation. Cela signifie que le droit commun a longtemps été perçu au travers de l'art. 1134, un sanctuaire pour l'intangibilité du contrat. Aujourd'hui, cette ligne de partage entre le droit commun qui protège l'intangibilité et les droits spéciaux qui l'assouplissent, n'est plus vraie car le juge a su se servir du droit commun en interprétant de façon audacieuse certains textes du Code civil pour assouplir la rigueur de l'intangibilité. Bien sûr, le principe exprimé à l'art. 1134 al. 1er conserve toute sa place mais des exigences de sécurité juridique impliquent que les atteintes à l'intangibilité restent exceptionnelles.
En définitive, dans quelles mesures le droit protège et assouplie l'intangibilité du contrat ? En principe, le droit commun protège ou tout au moins est respectueux du droit commun du contrat (I), exceptionnellement il peut y porter atteinte (II).
[...] Lorsque la clause est claire et précise, la Cour de cassation veille à ce que les juges du fond ne dénaturent pas le sens de cette clause (contrôle de la dénaturation posé dans l'arrêt Foucauld–Coulombe, 1872). En dehors des cas limitativement prévus par la loi, le juge ne peut pas rescinder ni même réviser un contrat lésionnaire (l'art s'y oppose). Lorsque le déséquilibre apparaît au cours de l'exécution du contrat, la Cour de cassation interdit au juge du fond de réviser le contrat même en cas d'imprévision (jurisprudence Canal de Craponne, 1876). [...]
[...] Cet arrêt a été confirmé plusieurs fois notamment dans celui du 30 mai 2006. Le recours à l'économie du contrat : Dans un arrêt du 15 fév la Cour de cassation a annulé une clause expresse de divisibilité de deux contrats car elle contredit l'économie générale des conventions (but contractuel que se proposent d'atteindre les contractants). Bibliographie - GHESTIN J., Traité de droit civil, LGDJ, le contrat : la formation et effets, 4e édition - BENABENT A., Droit civil, Les obligations, Montchrestien, Domat, 12e éd - FLOUR, AUBERT et SAVAUX, Les obligations L'acte juridique Le fait juridique, Armand Colin, 11e éd - MALAURIE, AYNES et STOFFEL-MUNCK, Les obligations, Defrénois, 3e éd - TERRE, SIMLER et LEQUETTE, Les obligations, Précis Dalloz, 9e éd, 2005. [...]
[...] I Le droit commun respectueux de l'intangibilité du contrat A. L'intangibilité protégée par le droit commun du contrat Le principe : L'intangibilité est un corollaire de la force obligatoire du contrat ; le principe signifie que l'enveloppe de droit et d'obligation que contient le contrat est définitivement fixé au jour de la conclusion et il est alors intouchable Les manifestations du principe : - A l'égard des parties : toute modification unilatérale du contrat sera privée d'effets et constituera même une violation contractuelle susceptible de sanction. [...]
[...] Il ne s'agit donc pas d'une atteinte à l'intangibilité du contrat. L'art al.3 a permis au juge de façon positive de faire naître des obligations à la charge des parties, en particulier l'obligation de renégocier le contrat (arrêt Huard nov 1992 : l'exigence de bonne foi contraint un fournisseur à renégocier avec son distributeur le prix que ce dernier paye pour lui permettre de pratiquer des prix concurrentiels Il ne s'agit pas ici véritablement de sanctionner une déloyauté, mais surtout d'assouplir la rigueur de la règle que la Cour de cassation a posée dans l'arrêt Canal de Craponne. [...]
[...] Droit commun et intangibilité du contrat I LE DROIT COMMUN RESPECTUEUX DE L'INTANGIBILITE DU CONTRAT A. L'intangibilité protégée par le droit commun du contrat B. L'intangibilité du contrat contournée par le droit commun II LE DROIT COMMUN LIMITANT L'INTANGIBILITE DU CONTRAT A. La modification du contrat par le juge B. L'éviction d'une clause par le juge L'autonomie de la volonté a régné en maître absolu tout au long du XIXe siècle et d'une bonne partie du XXe siècle. Cette théorie a porté une réponse simple et uniforme à la question de l'intangibilité du contrat. [...]
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