L'exercice de l'action civile en matière d'abus de biens sociaux

Extraits

[...] En effet, pendant longtemps une jurisprudence rigoureuse s'était opposée à la constitution de partie civile des associés ou actionnaires en cas d'abus de biens sociaux, considérant que seule la société subissait un préjudice propre[156]. Puis, la Chambre criminelle a progressivement opéré un revirement en admettant l'action individuelle des associés, au motif qu'un abus de biens porte atteinte non seulement au patrimoine social mais encore au patrimoine propre de chaque associé[157]. Le plaignant n'avait pas à rapporter la preuve de ses allégations ; sa constitution de partie civile était recevable devant la juridiction d'instruction dès lors que les circonstances sur lesquelles elle s'appuie permettent au juge d'admettre comme possible l'existence du préjudice allégué et la relation directe de celui-ci avec une infraction à la loi pénale[158] Mais surtout, elle l'admettait devant les juridictions de jugement en décidant que le préjudice des associés consistait, essentiellement, en une privation de bénéfice ou perte de valeur de leurs actions, qui découlaient directement de l'infraction, au motif que, les abus de biens sociaux portent atteinte non seulement aux intérêts des associés, mais aussi à ceux des tiers qui contractent avec elles[159] Cette position favorable à l'action civile a conduit la jurisprudence à admettre qu'un actionnaire d'une société mère était recevable à se constituer partie civile pour des faits d'abus de biens commis au détriment de sa filiale[160]. [...]

[...] REBUT. Idem Cass. crim janv Bull. crim. 18 ; D Jur note H. MATSOPOULOU et Pan obs. P. DELEBECQUE, P. JOURDAIN et D. MAZEAUD. [100] Cass. crim oct Bull. crim. [...]

[...] Mais avant de pouvoir bénéficier des facilités d'instruction permises par la voie pénale, certaines conditions particulières à la constitution de partie civile en matière d'abus de biens sociaux devront être remplies. II] Les principes régissant la constitution de partie civile en matière d'abus de biens sociaux Comme toute action en justice, l'action civile doit répondre à certaines conditions pour être recevable. L'étendue de la recevabilité de l'action civile dépend de l'interprétation donnée par la jurisprudence à ses conditions. Ainsi l'appréciation des conditions que sont le préjudice personnel et direct résultant de l'infraction déterminera l'étendue plus ou moins large de la recevabilité de l'action civile. [...]

[...] Les limitations préférables à l'exercice de l'action sociale ut singuli II] L'irrecevabilité de l'action civile des autres victimes d'abus de biens sociaux A. L'action individuelle des associés ou actionnaires 1. Le refus catégorique de réparer le préjudice direct et personnel 2. Le tempérament tiré de l'existence d'un préjudice distinct B. L'action civile des tiers 1. L'action des créanciers sociaux 2. L'action des salariés et syndicats CONCLUSION BIBLIOGRAPHIE SELECTIVE L'exercice de l'action civile en matière d'abus de biens sociaux Naissance du droit pénal des sociétés Le droit pénal des sociétés est né de la nécessité initiale de réprimer les comportements gravement malhonnêtes tels que les émissions fictives, les manipulations de cours ou encore la répartition de dividendes fictifs. [...]

[...] De nombreux auteurs se sont d'ailleurs vivement opposés à cette appréciation jurisprudentielle de l'action sociale qui contiendrait les ferments d'une anarchie sociale[151] De plus, les associés disposent d'un droit propre qui ne nécessite pas la carence des organes sociaux puisque les actions concomitantes sont admises par la Cour. Mais, dans l'hypothèse où les dirigeants sont encore en fonction et gèrent, administrent et dirigent la société, l'exercice de l'action civile ut singuli ne devrait pas être recevable. C'est aux dirigeants qu'il doit appartenir d'agir en priorité et leur carence devrait être une condition à l'exercice de l'action sociale ut singuli. [...]