Le mécanisme de QPC tel qu'issu de la Loi organique du 10 décembre 2009, suscita une vive bataille juridique entre le caractère prioritaire du mécanisme et son blocage subséquent de la procédure de renvoi préjudiciel, violant ainsi le principe de primauté de droit de l'Union. Retour sur les épisodes de ce conflit et la solution qui en découla, désormais celle du droit positif.
[...] La question prioritaire de constitutionnalité (QPC), récent dispositif né de la révision constitutionnelle de juillet 2008 et promulgué par la Loi organique du 10 décembre 2009, permet au justiciable d'invoquer, lors d'un procès et par une procédure incidente, l'inconstitutionnalité d'une loi qui lui est opposée. Ce contrôle de la Constitution a posteriori, présent dans les esprits depuis les débuts de la Ve République, remporte assurément un grand succès : en 2011, pour la seule Cour de Cassation, 467 dossiers ont été présentés devant le juge.
Cela étant, elle devait se confronter à un autre dispositif, qui lui permet depuis le Traité de Rome (art. 177 TCE, devenu art. 267 TFUE) d'inviter le juge national à demander à la Cour de Justice de l'Union Européenne (CJ) son avis (il s'agit donc d'une procédure non-contentieuse) sur ce que veut dire le droit de l'Union dans l'application qui en est faite devant la juridiction interne. Par ce renvoi, la CJ vérifiera ainsi la compatibilité d'une législation nationale avec le droit de l'Union (et non la validité).
Or, on sait que le droit de l'Union est régi par un principe de primauté, qui, impliquant qu'il prévale sur l'ordre juridique interne, lui permet d'assumer sa vocation supranationale . Il a ainsi été jugé qu'aucune disposition de procédure, même d'ordre constitutionnel, ne peut être invoquée pour contourner l'application du droit de l'Union Européenne : c'est le fameux arrêt CJCE 9 mars 1978 Simmenthal. (...)
[...] Le Pourhiet, L'allégeance des juges nationaux au juge européen, Constitutions 2010 p Primauté du droit de l'Union versus priorité constitutionnelle ou quand la Cour de cassation demande aux juges de Luxembourg de trancher, Constitutions 2010 p P. Fombeur, Question prioritaire de constitutionnalité, droit constitutionnel et droit de l'Union européenne, D p P. Cassia, E. Sauliner-Cassia, Imbroglio autour de la question prioritaire de constitutionnalité, D p A. Levade, Renvoi préjudiciel versus Question prioritaire de constitutionnalité : la Cour de cassation cherche le conflit , D p P. Sargos, QPC, la parole à la Cour de cassation D p C. Kleitz, La Cour de cassation se rebiffe , Gaz. Pal avril 2010. [...]
[...] Une décision devait alors être rendue par la CJ pour répondre à l'audacieux renvoi préjudiciel de la Cour de cassation, et juger de la compatibilité du mécanisme de QPC avec le Droit de l'Union. Dans l'attente certainement, dans la crainte assurément, la jurisprudence interne, tant administrative que judiciaire et constitutionnelle, opéra quelques aménagements plus juridiquement correctes de leur lecture de la procédure de QPC. Dans sa décision Loi sur les Jeux en ligne du 22 mai 2010, le Conseil Constitutionnel ajusta son arrêt de 2009 sur la conformité de la Loi organique en estimant que le renvoi préjudiciel pourrait intervenir non pas après le mécanisme de QPC, mais à tout moment L'adoucissement de la ‘‘révolte'' prétorienne était lancé. [...]
[...] La Cour de cassation envoie la QPC se faire voir à Luxembourg : c'est ce que l'on pouvait sur un blog, qui fut l'un des très nombreux commentateurs de l'arrêt du 16 avril 2010, fort retentissant en ce qu'il réussit le prodige de transformer une QPC en renvoi préjudiciel. Voici une liste des principaux articles de commentaires de cet arrêt ; la lecture des titres est évocatrice de la fougue passionnelle que la décision suscita : Ph. Manin, La question prioritaire de constitutionnalité et le droit de l'Union européenne, AJDA 2010 p D. [...]
[...] Comprendre : La question prioritaire de constitutionnalité et le droit de l'Union européenne. Cet article estampillé ‘‘Comprendre'' propose une synthèse concise et précise de la question de l'opposition entre QPC et renvoi préjudiciel, présentant un état de la jurisprudence et détaillant les notes importantes sur les arrêts principaux (C. Cass avril 2010, CJUE 22 juin 2010 Melki). Il y avait longtemps qu'un pareil tumulte n'avait secoué les prétoires Le mécanisme de QPC tel qu'issu de la Loi organique du 10 décembre 2009, suscita une vive bataille juridique entre le caractère prioritaire du mécanisme et son blocage subséquent de la procédure de renvoi préjudiciel, violant ainsi le principe de primauté de droit de l'Union. [...]
[...] On sait que le juge constitutionnel ne peut en aucun cas contrôler la validité d'un acte du droit dérivé de l'Union, cette compétence étant exclusivement réservée à la Cour (arrêt CJCE 27 octobre 1987 Foto Frost). Ainsi quand la situation se présente, quand la juridiction pose une question préjudicielle à la Cour de justice elle devra au préalable l'interroger sur la validité de la directive au regard du droit primaire. Le Conseil Constitutionnel, qui exclut par principe de son contrôle de constitutionnalité les dispositions législatives se bornant à transposer mot pour mot une directive précises et inconditionnelles (CC 10 juin 2004 Loi pour la confiance dans l'économie numérique), estime depuis cette même décision qu'un tel moyen, qui soulève l'inconstitutionnalité d'une loi portant transposition fidèle d'une directive, n'est recevable que si elle viole une règle ou un principe inhérent à l'identité constitutionnelle française sauf consentement du pouvoir constituant. [...]
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