Ce qui relève ou non du domaine de l'injure à une religion, de par l'usage détournée d'images symboliques, est évidemment sujet à débats et polémiques ; entre nécessité de respect de la sensibilité religieuse des uns et liberté d'expression des autres. Le problème s'est posé récemment vis-à-vis de la religion catholique, concernant l'usage à des fins publicitaires d'une image dévoyée de la Cène... C'est ce dont il est question dans le présent arrêt rendu par la 1ère Chambre civile de la Cour de cassation (...)
[...] A cette vague de contestation, s'opposait naturellement la liberté d'expression de la presse, nécessaire à toute société démocratique et laïque. Une volonté de faire primer la liberté d'expression en raison de la variété des corps de personnes au sens de l'article 29 alinéa 1er de la loi du 29 juillet 1881, ou volonté d'éviter tout risque de polémique. C'est aussi probablement dans le souci d'éviter toute polémique ou trouble à l'ordre social, dont le pendant serait une «inégalité de traitement» des religions, que la Cour suprême française n'a pas sanctionné cet usage dévoyé d'un symbole du Christianisme. [...]
[...] Entorse au syllogisme et prise en compte de l'objectif de la composition En prenant une telle décision, la 1ère Chambre civile fait une entorse au principe du syllogisme juridique. En effet, l'article 29 alinéa 2 qualifie d'injure la seule expression outrageante, et non, comme semble l'indiquer la Cour de façon inédite, l'expression qui aurait un objectif outrageux. Pour la Cour, si cette composition avait eu un tel objectif, alors cette parodie de la forme aurait été considérée comme une injure, mais puisqu'elle suivait un objectif commercial, semble-t-il, cela n'était pas le cas. [...]
[...] Devant la Cour de cassation, la question qui se posait très simplement était de savoir si il y avait injure ou non. En d'autres termes, l'utilisation dévoyée, travestie, et à grande échelle d'un des principaux symboles de la foi catholique à des fins publicitaires et commerciales constituait-t-elle une injure envers ladite religion? La première chambre civile, ne voyant dans cette affiche qu'une seule parodie de la forme donnée à la représentation de la Cène qui n'avait pas pour objectif d'outrager les fidèles de confession catholique, ni de les atteindre dans leur considération en raison de leur obédience a considéré que l'injure n'était pas constituée, considérant en l'espèce qu'il y avait absence d'attaque personnelle et directe dirigée contre un groupe de personnes en raison de leur appartenance religieuse Cette décision appelle de nombreux commentaires ; les textes invoqués sont non-équivoques sur la notion d'injure, pourtant la Cour refuse cette qualification. [...]
[...] Cela va à l'encontre de la lettre de l'article 29 de la loi du 29 juillet 1881. Une application simple du principe du syllogisme conduisait inéluctablement à la qualification d'injure. Dans ces conditions, cette décision ne manque pas de soulever des critiques et des débats. En effet, le raisonnement utilisé par le juge sort de l'ordinaire, mais la logique sociologique n'a-t-elle finalement pas primé ? II Une solution inédite et critiquable quoique se justifiant implicitement par un intérêt légitime Il semblerait que la Cour ait tenu absolument à éviter les débordements médiatiques ; mais cela, au prix d'une décision discutable Requalification, redéfinition : entre arrêt de règlement et juge du fait ? [...]
[...] Le caractère non-équivoque des textes appliqués par les juges du fond La simplicité des textes de Loi invoqués L'association demanderesse de l'interdiction de publication et de diffusion de l'affiche litigieuse invoque, à l'appui de sa prétention, les dispositions de la loi du 29 juillet 1881 portant protection et encadrement du droit de la presse et autres publications, et plus exactement les articles 29 alinéa 2 et 33 alinéa 3. L'alinéa 2 de l'article 29 de la loi du 29 juillet 1881 donne une définition légale de l'injure. Il dispose que toute expression outrageante, termes de mépris ou invective qui ne renferme l'imputation d'aucun fait est une injure C'est à la lumière des dispositions du 1er alinéa du même article que l'alinéa 2 peut être mieux compris. [...]
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