Dissertation de droit dont le sujet est : Quelle place pour le juge dans le domaine contractuel ? Comment la pratique du droit, qui consacre depuis plus d'un siècle le rôle croissant du juge dans le domaine du contrat, a-t-elle pu et dû, légitimement ou non, s'opposer à la théorie traditionnelle de l'autosuffisance du contrat, conséquence directe de l'autonomie des volontés, qui excluait par avance le juge du domaine contractuel ?
[...] Alors que le juge devait être la bouche qui prononce les paroles du contrat, celui-ci tenant lieu de loi ; voici qu'il s'autorise non seulement à l'interpréter, mais encore à le modifier, le réviser ou le neutraliser. C'est aujourd'hui une réalité : le juge agit sur le contrat, et son rôle dans ce domaine est en plein essor. On peut le regretter ou s'en féliciter, mais il paraît clair que l'intervention du juge introduit de la souplesse dans le contrat, permet de prendre plus en compte le facteur humain et offre au contrat la possibilité de se renouveler, de s'adapter, assurant ainsi sa viabilité et sa pérennité. [...]
[...] Il doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée De l'interprétation à la création : l'accroissement des pouvoirs du juge sur le contrat et les contractants Il s'agit ici de voir comment, à la faveur des évolutions les plus récentes du droit pratique des obligations, les pouvoirs du juge en matière contractuelle sont sortis du simple domaine de l'interprétation pour pénétrer véritablement dans le domaine de la création : en créant ou modérant des obligations, en révisant à son gré les contrats jugés défaillants, le juge s'est mis à dire du droit contractuel, à créer du droit en matière de contrat. Le juge jouit donc aujourd'hui d'un pouvoir fort sur le contrat comme sur les contractants. [...]
[...] C'est le sens de la décision 97-388, du 20 mars 1997, dans laquelle le Conseil Constitutionnel précise qu'il ne résulte ni de l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ni d'aucune autre norme de valeur constitutionnelle un principe constitutionnel dit de l'autonomie de la volonté Ce principe est en effet critiqué sur le terrain des réalités économiques et sociales, l'autonomie de la volonté et son corollaire juridique, la liberté contractuelle, étant bien loin de garantir la justice socio-économique. Au contraire, on voit aujourd'hui dans le contrat un moyen potentiel d'asservissement des personnes : entre le fort et le faible, c'est la volonté qui asservit et la loi qui libère pour reprendre les mots de Lacordaire. La souveraineté du contrat doit donc être limitée par la loi, mais aussi et surtout par le juge. [...]
[...] Lorsque l'article 1156 dispose que l'on doit dans les conventions rechercher quelle a été la commune intention des parties contractantes, plutôt que de s'arrêter au sens littéral des termes lorsque l'article 1158 ajoute que les termes susceptibles de deux sens doivent être pris dans le sens qui convient le plus à la matière du contrat l'article 1159 que ce qui est ambigu s'interprète par ce qui est d'usage dans le pays où le contrat est passé ; enfin, l'article 1161, que toutes les clauses des conventions s'interprètent les unes par les autres, en donnant à chacune le sens qui résulte de l'acte entier ; comment ne pas penser, en toute bonne fois, qu'il faudra nécessairement qu'un juge se charge d'apprécier ce qui n'est pas écrit, de lire entre les lignes, bref, d'effectuer un travail d'interprétation indispensable à la bonne application des termes du contrat ? Comment ne pas penser, même, que ce juge devra nécessairement jouer un rôle de plus en plus important dans le domaine du contrat, sortir de la simple interprétation pour créer du droit, dès lors qu'une marge de libre appréciation lui est laissée ? Un juge ne peut faire les choses à moitié : soit il demeurait absolument exclu du contrat, ce qui était inenvisageable, soit il y était totalement présent. [...]
[...] Tel est le principe essentiel de l'effet relatif des contrats posé à l'article 1165. Toutefois, certaines obligations font exception à cette règle : c'est le cas des conventions collectives de travail, qui s'étendent au-delà des seules parties contractantes. Ces accords conclus entre des organisations syndicales de salariés et un groupement d'employeurs ont une double nature juridique, à la fois contractuelle et réglementaire et s'étendent, outre aux seules parties contractantes, à tous les salariés des entreprises entrant dans leur champ d'application (d'où leur effet normatif) Le peu de place laissée théoriquement au juge en matière contractuelle Nous aborderons ici la question du peu de place laissée au juge dans le domaine du contrat, non seulement parce que le juge est a priori, et par définition, en dehors du champ contractuel, qui relève des seuls contractants ; mais encore parce que, lorsque le juge entre dans le champ contractuel, c'est pour être soumis théoriquement au contrat. [...]
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