Le second semestre que nous abordons avec ce premier enregistrement est entièrement consacré à la Ve république sous tous ses aspects, et bien entendu, et de manière tout à fait logique, il convient d'examiner en tout premier lieu la manière dont cette Ve république s'est installée.
Il faut bien sûr évoquer l'écroulement de la IVe République. Si l'on est passé d'une République à l'autre, c'est parce que cette IVe République était affrontée à un problème qu'elle traînait depuis des années : le problème colonial, ou plutôt la décolonisation, qu'elle ne parvenait pas à effectuer sans vagues.
Le problème algérien tout particulièrement, a précipité la fin de plusieurs gouvernements. Notamment, le 15 avril 1958, le gouvernement de Félix Gaillard, qui venait de démontrer son impuissance à se faire obéir de l'armée, sa faiblesse aussi dans le différend franco-tunisien, est renversé.
La crise dure des semaines. Après plusieurs tours de piste infructueux d'hommes politiques, c'est finalement Pierre Pflimlin qui est pressenti et qui accepte.
Mais il passe pour un libéral, et de l'autre côté de la Méditerranée, à Alger l'émeute gronde.
Le 13 mai 1958, l'émeute gronde et s'empare avec la complicité du service d'ordre, du siège des pouvoirs publics, où s'installe un comité de salut public composé d'émeutiers et de militaires.
Dès que la nouvelle est connue à Paris, un vent de panique souffle au Palais Bourbon et les députés investissent dans la hâte Pierre Pflimlin à l'aube du 14 mai.
C'est alors que le général de Gaulle entre en scène.
Le 15 mai, achevant sa traversée du désert, le général, bien que ses partisans eussent réuni moins de 4 % des voix lors des dernières législatives de janvier 1956, saisit la balle au bond, et publie une déclaration aux termes de laquelle il se déclare prêt à assumer les pouvoirs de la République.
Quelques jours plus tard, le 19 mai il explique sa position dans une conférence de presse rassurante, puis selon ses termes, il rentre dans son village pour se tenir à la disposition du pays.
Dès lors, la classe politique dans son ensemble, va considérer que le retour aux affaires du général de Gaulle est la moins mauvaise des situations.
Les uns après les autres, les dirigeants vont prendre langue avec le général de Gaulle et pour finir, après quelques jours de conciliabules, Pierre Pflimlin va remettre sa démission, bien qu'il n'ait pas été renversé par l'Assemblée Nationale, une nouvelle fois la Constitution est violée, mais il faut faire place au général de Gaulle.
Le Président de la République, René Coty, appelle alors le général de Gaulle à former le gouvernement, et leste cette candidature d'un message au Parlement d'une constitutionnalité douteuse, puisque c'est un chantage à la démission au cas où l'investiture serait refusée » au plus illustre des Français », pour reprendre l'expression du Président de la République.
Le gouvernement de Gaulle est prestement constitué, le général s'y entoure de dignitaires de la IVe république, Messieurs Mollet, Pinay, Pflimlin ou Jacquinot.
Ce gouvernement est investi, le 1er juin 1958 par 329 voix contre 224, les opposants comptent la totalité des députés communistes, la moitié des socialistes, 1/3 des radicaux, plus quelques personnalités isolées de la gauche comme Pierre Mendès France ou François Mitterrand.
Le gouvernement de Gaulle, notons-le, sera le dernier de la IVe république.
Celle-ci continuait juridiquement, mais il était évident que politiquement elle était déjà morte.
Avant de se séparer, le Parlement va une dernière fois méconnaître l'article 13 de la Constitution qui interdisait les délégations, en confiant les pleins pouvoirs au gouvernement, puis, s'atteler à remplacer les institutions sous couleur de les réviser. (...)
[...] Cette inégalité politique ne se traduit pas sur le plan du statut, et du statut juridique, constitutionnel et pénal des membres du gouvernement. Ce statut des membres du gouvernement est marqué notamment par un régime d'incompatibilités. Par un régime d'incompatibilités au pluriel, c'est-à-dire qu'il y a plusieurs formes d'incompatibilités. D'abord il y a une règle essentielle sous la Ve république, autre innovation qui faisait que le régime n'était pas un régime parlementaire tout à fait ordinaire, tout à fait classique, c'est la règle posée à l'article 23 de la constitution : elle précise que la fonction ministérielle, c'est-à-dire celles exercées par l'ensemble des membres du gouvernement, sous-entendu le premier ministre comme les ministres, comme les secrétaires d'État, que cette fonction est incompatible avec toute autre activité publique et privée. [...]
[...] Il n'est pas le supérieur du Conseil d'Etat ni de la Cour de cassation. Il se situe dans un autre terrain, nettement en dehors des juridictions. Dès lors, celles-ci, le Conseil d'Etat ou la Cour de cassation, qualifiées de juridictions suprêmes, peuvent elles faire la sourde oreille, ne pas entendre les recommandations du CC, ne pas mettre en oeuvre les principes dégagés par les décisions du CC. A cette question, le constituant a apporté une réponse, ou du moins un début de réponse, puisque l'article 62 indique que les décisions du CC s'imposent aux pouvoirs publics, et à toutes les autorités administratives et juridictionnelles. [...]
[...] Il n'y a qu'un seul cas de démission forcée dans la constitution. C'est celle qui est prévue à l'article 50 de la constitution, et qui prévoit que lorsqu'un gouvernement est mis en minorité à la suite d'une question de confiance, ou à la suite du vote d'une motion de censure, il doit démissionner. Dans cette hypothèse-là, nous sommes dans un cas de figure qui est celui du régime parlementaire, un gouvernement mis en minorité doit démissionner et là il n'a pas la liberté de s'accrocher à sa fonction. [...]
[...] D'autres exemples ont déjà été évoqués, M. Pompidou en 1968, M. Chaban-Delmas en 1972, M. Mauroy en 1984, M. Michel Rocard en 1991, où Mme Édith cresson en 1992, les exemples ne manquent pas et on peut mettre en avant, l'exemple encore plus caractéristique de M. Chaban-Delmas en 1972 : M. Chaban-Delmas était, ce n'était un secret pour personne en rivalité politique et d'idée avec le président de la république, car il n'avait pas tout à fait les mêmes conceptions de l'évolution de la société française. [...]
[...] Il faut aussi signaler que la nouvelle Constitution autorisait le gouvernement, de par l'article 92, à mettre en place des lois organiques, ou réviser, améliorer toutes sortes de procédures juridiques par la voie d'ordonnance. Ces ordonnances pour lesquelles aucune ratification n'était prévue, n'ont de ce fait subi aucun contrôle de constitutionnalité. Le gouvernement a très largement utilisé cette possibilité, plus de 300 ordonnances ont ainsi été publiées, certaines d'entre elles intéressent encore la vie quotidienne des Français. S'agissant de la désignation des organes constitutionnels, on va commencer par l'Assemblée Nationale. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture