Au 18ème siècle, Pigeau affirmait que « pour obtenir justice, il faut réclamer, on doit ensuite instruire le juge de sa prétention, lorsqu'il est éclairé, il doit décider, enfin si le condamné ne veut pas exécuter cette décision, il faut l'y contraindre. La procédure civile est donc composée de quatre parties principales : la demande, l'instruction, le jugement et l'exécution du jugement ». La tradition historique a pendant longtemps considéré le droit de l'exécution comme un élément de la procédure civile. Qu'en est-il aujourd'hui? La place des procédures civiles d'exécution est une question qui fait encore débat aujourd'hui.
Les procédures civiles d'exécution désignent l'ensemble des voies de droit qui sont mises à la disposition des créanciers pour leur permettre d'obtenir ce qui leur est dû, au besoin par la coercition. Il convient de préciser que le terme procédure doit s'entendre non pas comme une instance judiciaire mais, de façon plus large, comme « une façon d'avancer » en accomplissant des actes qui ne sont pas nécessairement judiciaires .
Les procédures civiles d'exécution ont connu une évolution marquante. Dans les systèmes juridiques primitifs, l'exécution se faisait sur la personne même du débiteur. C'est ainsi qu'au début du droit romain, le créancier impayé pouvait enchaîner son débiteur et le faire vendre au marché aux esclaves, lui et sa famille, jusqu'à complet paiement de sa dette. Sous l'Ancien Régime, diverses saisies sur le patrimoine du débiteur sont apparues (saisie-exécution, saisie-arrêt…). Le Code de procédure civile de 1806 marqua une avancée significative en codifiant les trois grandes saisies exécutoires : la saisie-exécution, la saisie-arrêt et la saisie immobilière. Ainsi, « les voies d'exécution », comme on le disait à l'époque, ont été réglementées par le Code de procédure civile de 1806 dans ses articles 517 à 779 sous un Livre 5ème intitulé « L'exécution des jugements ». Ce système subsista pendant près de deux siècles. En 1975, le nouveau code de procédure civile fut également doté de cinq parties dont la cinquième partie était intitulée « Voies d'exécution ». Ce Livre V était destiné à contenir les règles relatives aux procédures civiles d'exécution cependant, ce travail de codification n'a jamais été réalisé, ainsi ce titre est toujours vide trente ans plus tard.
Depuis la réforme de 1991 et 1992 sur les procédures civiles mobilières, le droit français des procédures civiles d'exécution est scindé en deux parties. D'une part, les principes généraux et les procédures d'exécution mobilières sont régis par la loi du 9 juillet 1991 et le décret du 31 décembre 1992. D'autre part, la saisie immobilière est régie par l'ordonnance du 21 avril 2006 et par le décret du 27 juillet 2006. Ainsi, des difficultés proviennent de cet éparpillement des sources dans cette matière. De plus, il apparaît opportun de mettre en exergue le paradoxe suivant : le Livre V du nouveau code de procédure civile est vide alors qu'on constate un éparpillement des sources des procédures civiles d'exécution. Ce constat est d'autant plus préoccupant au regard du célèbre adage « nul n'est censé ignorer la loi ». En effet, on peut penser que la codification des procédures civiles d'exécution dans un même code permettrait de rendre la matière plus accessible et plus lisible.
De plus, l'enjeu de la codification des procédures civiles d'exécution est central au regard des exigences européennes. En effet, la Cour européenne des droits de l'homme, dans un arrêt Hornsby contre Grèce du 19 mars 1997, a considéré que « l'exécution d'un jugement ou arrêt doit être considérée comme faisant partie intégrante du procès au sens de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales de 1950 ». Il n'y a donc pas de procès équitable si le droit constaté par un tribunal ne peut pas être effectivement mis en œuvre par le bénéficiaire du jugement. L'Etat a donc pour obligation d'organiser l'exécution forcée des décisions de justice ce qui est tout l‘objet des procédures civiles d‘exécution. Cependant, il convient de se demander pourquoi ces procédures ne sont pas codifiées dans un code. D'autant qu'au moment de la codification du nouveau code de procédure civile en 1975, l'idée première était d'insérer les textes relatifs aux procédures civiles d'exécution dans le Livre V de ce code. Or, encore aujourd'hui, le Livre V est laissé en blanc. Ce constat quelque peu déroutant soulève de nombreuses interrogations. Faut-il codifier les procédures civiles d'exécution dans le Livre V du nouveau code de procédure civile? Est-il souhaitable de créer un nouveau code ? Quelle place finalement l'exécution des jugements tient-elle dans notre droit ?
Il apparaît opportun, dans un premier temps, de présenter une solution possible, qui serait la codification des procédures civiles d'exécution dans le Livre V du nouveau code de procédure civile (I). Dans un second temps, il s'agira de mettre en évidence que cette solution n'est peut-être pas la mieux adaptée. En effet, au regard du caractère singulier des procédures civiles d'exécution, il conviendra de proposer la création d'un nouveau code : le « Code de l'exécution ». (II).
[...] L'exigence d'une loi accessible et compréhensible par tous a d'ailleurs été élevée au rang d'objectif à valeur constitutionnelle. La codification permet ainsi de gagner en démocratie et en sécurité. Le fait de regrouper, classer l'ensemble des dispositions relatives aux procédures civiles d'exécution dans un même code apparaît nécessaire. Cela permettrait d'introduire plus de cohérence dans les procédures civiles d'exécution. En effet, la codification d'une matière va bien au-delà de l'empilement des textes. De plus, les procédures civiles d'exécution se prêtent véritablement à une codification dans un seul et même code. [...]
[...] On peut d'ailleurs remarquer que la Cour de Strasbourg, dans l'arrêt Hornsby, va dans ce sens en considérant que la procédure forme un ensemble qui s'achève, non pas à la date du prononcé du jugement, mais à celle de son exécution. C'est un élément du procès équitable. La procédure civile et les procédures civiles d'exécution entretiennent donc des relations étroites ce qui explique la création du Livre consacré aux voies d'exécution, lors de l'élaboration du nouveau code de procédure civile. Ce code semble adapté à la codification des procédures civiles d'exécution car ce code a été élaboré avec un souci pédagogique. [...]
[...] Comment et où faut-il codifier les procédures civiles d'exécution ? Au 18ème siècle, Pigeau affirmait que pour obtenir justice, il faut réclamer, on doit ensuite instruire le juge de sa prétention, lorsqu'il est éclairé, il doit décider, enfin si le condamnéé ne veut pas exécuter cette décision, il faut l'y contraindre. La procédure civile est donc composée de quatre parties principales : la demande, l'instruction, le jugement et l'exécution du jugement La tradition historique a pendant longtemps considéré le droit de l'exécution comme un élément de la procédure civile. [...]
[...] Rappelons à ce sujet qu'une saisie n'est pas un procès, elle est consécutive à celui-ci. La saisie mobilière, par exemple, est un acte extrajudiciaire en l'absence d'incidents. Or, si on codifie les procédures civiles d'exécution dans le nouveau code de procédure civile, qui est un code dont l'objet propre est de régir les procédures judiciaires, on serait en contradiction avec la philosophie de la réforme de 1991. De plus, il apparaît opportun d'insister sur le fait que les procédures civiles d'exécution ne sont pas nécessairement judiciaires. [...]
[...] Le deuxième titre serait consacré aux saisies de biens incorporels avec la saisie attribution d'une part et les procédures spéciales de saisies de créances d‘autre part. Dans ces procédures spéciales, on inclurait les saisies pour le recouvrement des pensions alimentaires, les saisies des rémunérations du travail et enfin la saisie des droits d'associés et des valeurs mobilières. La fin du code serait consacrée aux saisies conservatoires (Titre à la saisie immobilière (Titre et aux procédures de distribution (Titre 5). Cette structure d'un Code de l'exécution est un exemple parmi d'autres, l'essentiel étant que le déroulement de chaque mesure d'exécution soit clairement énoncé. [...]
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