Initialement prévu pour sanctionner les abus de puissance économique, le délit civil de rupture brutale d'une relation commerciale établie est aujourd'hui précisé. Tant le législateur que la jurisprudence ont élargi son champ d'application. Issu de la loi Galland du 1er juillet 1996, le nouvel article L.442-6-I-5° du Code de commerce, tel que modifié par la loi NRE du 15 mai 2001, puis par une loi du 3 janvier 2003, édicte une véritable obligation de loyauté dans la rupture de relations commerciales établies avec un partenaire économique.
C'est à ce délit qu'avait affaire la chambre commerciale de la Cour de Cassation dans cet arrêt du 6 février 2007.
En l'espèce, l'association LCR, qui a pour objet la promotion de manifestations et d'artistes de cirques, collabore depuis 1996 avec la société Favand, qui exploite l'activité du Musée des arts forains, pour l'organisation en ce lieu de manifestations privées et de communications événementielles animées par des artistes. En mai 1999, l'association LCR assigne la société Favand en paiement de dommages-intérêts sur le fondement de l'article L. 442-6 I 5 du code de commerce pour rupture brutale de leurs relations commerciales.
La Cour d'appel déclare l'association LCR irrecevable en son action, au motif que si les associations peuvent accomplir, à titre occasionnel, des actes de commerce pour la réalisation de leur objet associatif, il ne saurait être admis, sauf à pervertir le sens de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association, qu'une association accomplisse, à titre habituel et quasi exclusif, des prestations commerciales.
Se pose alors à la Haute Juridiction le problème de savoir si une association qui entretient des relations commerciales de longue date avec une société peut engager la responsabilité de cette dernière pour rupture brutale de leurs relations commerciales.
La Chambre commerciale répond au visa de l'article L.442-6-I-5°du Code de Commerce: engage sa responsabilité tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers, qui rompt brutalement une relation commerciale établie, peut être mis en œuvre quelque soit le statut juridique de la victime du comportement incriminé. Elle casse et annule l'arrêt de la Cour d'appel pour violation de ce texte.
Au travers de cet arrêt, la Cour de Cassation nous propose une interprétation extensive de la notion de relation commerciale (I) et marque l'avènement de la sanction de sa rupture(II).
[...] Le législateur a étendu ce principe aux relations commerciales établies par le biais de l'article L.442-6-I-5°du Code de Commerce. Les dispositions du Code de commerce visent à la fois la rupture totale, qui se traduit par la cessation pure et simple des commandes ou des livraisons et la rupture partielle. La rupture partielle est difficile à caractériser. La jurisprudence a jugé, par exemple, qu'une diminution effective des commandes, et, par conséquent, du chiffre d'affaires, constitue une rupture partielle brutale, sous réserve d'être substantielle. [...]
[...] Par là, elle affirme une interprétation extensive de cet article et de la notion de relation commerciale établie. En effet elle permet à toute victime quel que soit son statut juridique d'obtenir réparation pour rupture brutale d'une relation commerciale. II.L'avènement de la sanction de la rupture d'une relation commerciale La relation commerciale est souvent une relation qui s'inscrit dans le temps. Les parties peuvent se libérer à tout moment à condition de respecter un délai de préavis. Si le contractant passe outre ce délai, on parle de rupture abusive(A). [...]
[...] Ainsi elle peut couvrir les situations les plus diverses. Par ailleurs, on retrouve la volonté d'interpréter de manière extensive l'article L.442-6-I-5°du Code de Commerce également chez les juges du fond. A titre d'exemple, la Cour d'Appel de Douai qui, dans un arrêt du 15 mars 2001, a admis "que les termes mêmes de la loi ne permettent pas d'instaurer des réserves ou des exceptions selon le type de marché ou de contrat". Et c'est dans cette logique que la Cour de Cassation a retenu que l'obligation de respecter un préavis d'une durée suffisante s'applique à toute relation établie, que celle-ci porte sur la fourniture d'un produit ou d'une prestation de service, et que la victime contracte pour son usage professionnel ou personnel. [...]
[...] Au travers de cet arrêt, la Cour de Cassation nous propose une interprétation extensive de la notion de relation commerciale et marque l'avènement de la sanction de sa rupture(II) I. Une interprétation extensive de la notion de relation commerciale Le problème posé dans cet arrêt est celui de savoir si le statut juridique des partenaires d'une relation commerciale a une incidence. La Haute Juridiction tout en précisant le caractère commercial de la relation établie démontre qu'une telle relation est définie par la nature de l'activité exercée par les parties et non par leur statut juridique A. [...]
[...] Et, selon la Cour, c'est la connexité entre les partenaires et l'activité économique qui donnent naissance à une relation commerciale. Donc l'activité économique n'est pas déterminée en fonction de la personne mais en fonction de son contenu. La Cour applique ce principe en l'espèce. Ainsi, ni le statut juridique, ni le mode de financement de l'entité victime de la rupture, ni le but qu'elle poursuit ne sauraient avoir pour effet d'écarter la qualification de relation commerciale dès lors qu'elle entretient des rapports économiques avec l'auteur. [...]
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