En 1990, un an avant son décès, un homme de quatre-vingt-quinze ans et qui vit avec son épouse, institue légataire universelle une femme de soixante-quatre ans sa cadette. Cette jeune femme est la maîtresse du vieil homme depuis ses dix huit ans.
La Cour d'appel par un premier arrêt du 5 janvier 1995 annule le legs au motif que celui-ci est contraire aux bonnes mœurs. Cet arrêt a été cassé par un arrêt de la première chambre civile du 25 janvier 2000.
La Cour d'appel résiste dans un premier temps à la Cour de cassation en annulant de nouveau le legs au motif cette fois que la libéralité n'était rien d'autre qu'une rémunération pour des « faveurs sexuelles ». En effet dans un document retrouvé dans le testament, la jeune femme annonce clairement « Pas d'argent, pas d'amour »…
L'Assemblée plénière de la Cour de cassation prononce alors une nouvelle cassation par l'arrêt commenté du 29 octobre 2004. L'attendu de principe est lapidaire et dénué de tout principe « N'est pas nulle comme ayant une cause contraire aux bonnes mœurs la libéralité consentie à l'occasion d'une relation adultère ».
La cause de la libéralité testamentaire faite par un homme marié à la personne avec laquelle il entretient des relations adultères est-elle nulle comme contraire aux bonnes moeurs ?
L'annulation reconnue au contrat au motif de l'illicéité de la cause s'applique-t-elle aux libéralités ?
Si dans son arrêt la Cour de cassation commence par rappeler la conformité aux bonnes mœurs d' « une libéralité consentie à l'occasion d'une relation adultère » (I), elle rejette ensuite le développement juridique de la Cour d'appel lié à la cause du contrat (II).
[...] La définition des bonnes et des mauvaises mœurs dépend de ce qui paraît être communément acceptable selon les lois de la société et l'état de l'opinion à une époque donnée. Etaient traditionnellement visés les pratiques sexuelles déviantes et les jeux d'argent ; pourraient être aujourd'hui incriminés : l'atteinte au respect des personnes ou à la dignité humaine, les comportements de nature à nuire à la santé ou l'éducation de la jeunesse. La définition des bonnes moeurs est sujette à débats. [...]
[...] Mais la notion subsiste dans notre droit. Le juge décide au terme d'un débat contradictoire, selon l'évolution de la société et les valeurs unanimement admises, quelles sont aujourd'hui en France les bonnes mœurs Leur rôle est donc de conformer le droit positif à l'évolution morale de la société. La Cour d'appel en 1995 est choquée par les faits de l'espèce. Ici un quasi grabataire s'offrant les faveurs d'une jeune fille moyennant finance. Le vieil homme, en grande difficulté financière vend dans un premier temps son véhicule avant de consentir par testament une partie de son patrimoine déshéritant au passage son épouse après 69 années de vie commune. [...]
[...] Commentaire Cour de Cassation 29 octobre 2004 En 1990, un an avant son décès, un homme de quatre-vingt-quinze ans et qui vit avec son épouse, institue légataire universelle une femme de soixante- quatre ans sa cadette. Cette jeune femme est la maîtresse du vieil homme depuis ses dix-huit ans. La Cour d'appel par un premier arrêt du 5 janvier 1995 annule le legs au motif que celui-ci est contraire aux bonnes mœurs. Cet arrêt a été cassé par un arrêt de la première chambre civile du 25 janvier 2000. [...]
[...] Le doute est donc posé de savoir si il existe un contrôle de la cause d'une libéralité. La Cour de cassation répond de manière lapidaire en affirmant que la Cour d'appel s'égare en cherchant du côté de la cause de la libéralité car on ne contrôle pas licéité d'une telle cause mais seulement la cause du contrat. L'évolution jurisprudentielle L'arrêt de la Cour de cassation du 29 octobre 2004 annonce une progression vis-à-vis de l'arrêt rendu en 1999 au sujet des libéralités adultérines. [...]
[...] Non seulement il conforte cette jurisprudence dans un premier temps, mais il apporte une modification dans un second temps. Si dans l'arrêt de 1999, les libéralités visant à créer une situation adultérine sont prohibées, il en est tout autrement dans celui de 2004 où plus aucune condition restrictive n'est apportée aux libéralités adultérines. Un individu peut consentir une libéralité dans le but de s'octroyer des faveurs et non plus seulement pour les maintenir ce qui rend cette jurisprudence beaucoup plus souple que la précédente. [...]
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