Dans son arrêt rendu le 15 décembre 2010, la première chambre de la Cour de cassation décide que la disparition de la cause ayant déterminé l'auteur de la libéralité n'entraîne pas sa caducité.
En l'espèce, un couple fait, par acte notarié du 19 mai 1994, donation à deux de ses enfants d'un fonds de commerce évalué à 600000 francs. Par testament authentique du 5 avril 1995, et afin de rétablir l'inégalité créée par la première donation, les époux décident de léguer à leurs deux autres fils la plus forte quotité disponible dont ils pouvaient disposer en leur faveur, rétablissant ainsi l'équilibre entre les héritiers. Par acte notarié établi en 1996 et pour des raisons inconnues, les deux enfants donataires font donation à leurs parents du fonds de commerce dont ils avaient été eux-mêmes précédemment gratifiés en 1994. Les parents décèdent respectivement en 1998 et en 2004. Par acte du 22 juin 2004, les enfants donataires-donateurs du fonds de commerce assignent leurs deux frères en caducité des testaments dressés le 5 avril 1995 en raison de l'absence de cause résultant de la restitution en 1996 du fond de commerce à leurs parents. Les juges du fond reçoivent leur demande. En effet, la cour d'appel de Bastia dans un arrêt rendu le 25 février 2009 a décidé que les testaments du couple étaient caducs; ces actes indiquant expressément la volonté de leurs auteurs d'assurer l'égalité entre leurs quatre héritiers la cause avait disparu avec la restitution en 1996 du fonds de commerce. Les deux seconds fils se pourvoient alors en cassation.
La disparition de la cause motivant une libéralité entraine-t-elle sa caducité ?
[...] Ce fut d'ailleurs la logique des juges du fond qui ont, dans le cas d'espèce, retenu que la disparition de la cause de la libéralité ayant motivé les parents testateurs devait emporter l'anéantissement des testaments. Rejet de la caducité du testament privé de cause Cependant, la Cour de cassation écarte ce raisonnement et fournit dans son arrêt une nouvelle appréciation de la cause du testament. La première chambre civile, dans son dernier attendu, rejette l'idée selon laquelle le legs deviendrait inopérant lorsque le motif le déterminant disparait du vivant du testateur. [...]
[...] Par acte notarié établi en 1996 et pour des raisons inconnues, les deux enfants donataires font donation à leurs parents du fonds de commerce dont ils avaient été eux-mêmes précédemment gratifiés en 1994. Les parents décèdent respectivement en 1998 et en 2004. Par acte du 22 juin 2004, les enfants donataires-donateurs du fonds de commerce assignent leurs deux frères en caducité des testaments dressés le 5 avril 1995 en raison de l'absence de cause résultant de la restitution en 1996 du fond de commerce à leurs parents. [...]
[...] C'est là la conclusion des Hauts magistrats. Substitutions de cause et souci d'interprétation de la volonté du testateur La non-révocation par l'auteur du legs de ses dispositions testamentaires nous pousse à procéder à une fiction juridique: on suppose que le testateur sachant que la cause initiale qui l'a déterminé à disposer a disparu et qui décide néanmoins de persister dans son intention a trouvé une nouvelle cause à son testament, cette nouvelle cause venant se substituer à la première qui a disparu. [...]
[...] Question de la nullité du testament sans cause La Haute juridiction a rendu le 15 décembre 2010 une solution inédite qui vient nous éclairer sur la notion de cause de l'obligation en matière de testament. Elle limite la caducité du legs uniquement aux cas légaux prévus par la loi et rejette la caducité du testament dont la cause a disparu du vivant du testateur Restriction des motifs de caducité du legs à ceux prévus par la loi Les juges de la cour d'appel de Bastia prononcent dans leur arrêt du 25 février 2009 la caducité du testament au motif qu'il était désormais dépourvu de cause du fait de la restitution de la donation de 1996. [...]
[...] D'ailleurs, la première chambre civile de la Cour de cassation a jugé dans son arrêt du 30 novembre 2004 que la faculté de révoquer un testament constituait un droit discrétionnaire exclusif de toute action en responsabilité Le testateur est donc libre de révoquer son legs à tout instant. En outre, l'article 476 du Code civil dispose que testament fait antérieurement à l'ouverture de la tutelle reste valable à moins qu'il ne soit établi que, depuis cette ouverture, la cause qui avait déterminé le testateur à disposer a disparu Autrement dit, lorsque le testateur devient incapable, il perd la capacité de révoquer son testament au profit de ses héritiers qui peuvent alors demander l'anéantissement d'un legs dont la cause aurait disparu. [...]
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