Selon M. Alain BENABENT, "si l'exigence d'une causalité est évidente à comprendre, sa définition plus précise est l'une des questions les plus insaisissables" du droit positif français. En effet, pour qualifier quelqu'un de responsable d'un dommage, il faut que ce dommage soit la conséquence de sa faute : il doit exister un lien de cause à effet, dont la preuve pèse sur le demandeur à l'action en responsabilité. Cependant, il est rare qu'un dommage soit le résultat d'un fait générateur unique ; comme le montre l'arrêt rendu la deuxième chambre civile de la Cour de Cassation, réunie en date du 27 janvier 2000, la multiplicité des causes complique la détermination d'un tel lien de causalité. En l'espèce, suite à un accident de la circulation dont Mme LEGENDRE est reconnue responsable, M. LALIGAND est victime de blessures à la colonne vertébrale rendant nécessaire une intervention chirurgicale. Durant cette opération, son œil gauche est lésé, ce qui entraîne une cécité partielle ; la victime (et son épouse) va donc agir en responsabilité délictuelle contre Mme LEGENDRE et son assureur. Pour débouter le demandeur de son action en réparation du préjudice causé par l'accident, incluant la lésion oculaire, la Cour d'Appel retient que cette atteinte à l'œil est uniquement le fruit de l'intervention chirurgicale. La question qui se présente aux magistrats de la Cour de Cassation est donc de savoir si : un accident de la circulation peut-il être la cause du dommage dû à une intervention chirurgicale ultérieure et nécessaire ? La deuxième chambre civile accueille le pourvoi de la victime et condamne sévèrement les juges du fond en leur opposant une violation de l'Art.1382 CCiv. ; selon la Cour suprême, l'accident en est la cause "directe et certaine" puisqu'il avait rendu nécessaire l'opération, de telle sorte que sans ce dernier, le dommage ne serait pas produit. Cet arrêt n'est pas un arrêt de principe, il n'est pas possible d'en tirer une conclusion, une généralisation, puisque sur le sujet de la causalité, la jurisprudence varie, et se fait au cas par cas. L'arrêt est donc intéressant du point de vue qu'il illustre, comme bien d'autres d'ailleurs, le problème "insaisissable" et insoluble "sans chance sérieuse de dissiper le brouillard inhérent à la matière", comme l'écrit DURRY dans La Revue Trimestrielle de 1997 du rapport causal. Ainsi, cet arrêt Civ.2, 27 janvier 2000 illustre parfaitement les propos de M.BENABENT : il affirme l'exigence de la causalité (I) et montre le caractère protéiforme de la détermination du lien de causalité (II) en exposant, et opposant, deux conceptions.
[...] La deuxième chambre civile accueille le pourvoi de la victime et condamne sévèrement les juges du fond en leur opposant une violation de l'Art.1382 CCiv. ; selon la Cour suprême, l'accident en est la cause "directe et certaine" puisqu'il avait rendu nécessaire l'opération, de telle sorte que sans ce dernier, le dommage ne serait pas produit. Cet arrêt n'est pas un arrêt de principe, il n'est pas possible d'en tirer une conclusion, une généralisation, puisque sur le sujet de la causalité, la jurisprudence varie, et se fait au cas par cas. [...]
[...] Ce qui semble logique. La Cour suprême va censurer la décision des juges du fond et admettre que l'accident est la cause "directe" de la cécité partielle, mais ne va pourtant pas fonder son arrêt sur la loi du 5 juillet 1985; effectivement, le visa de la décision est l'Art.1382 CCiv. qui exige expressément un lien de causalité : "tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer". [...]
[...] Ce choix semble cependant logique d'un point de vue de la pure casuistique, il est donc possible de penser que cette considération qui a inspiré la Cour dans son arrêt d'annulation. B - L'alternative d'une interprétation stricto sensu La Cour d'Appel a tenu à dégager parmi les différents facteurs du dommage, la cause que l'on pourrait qualifier d'efficiente. Les juges ont ainsi conclu que ce n'était pas l'accident en tant que tel qui avait conduit à la cécité partielle, mais l'opération chirurgicale bien qu'elle eût été rendue nécessaire par l'accident de la circulation. [...]
[...] Cette condition nécessaire de causalité résulte de dispositions législatives et est donc appliqué par les juges non sans difficulté A - Une exigence législative Le demandeur au pourvoi avait initialement fondé sa demande en réparation sur le fondement de la loi du 5 juillet 1985 relative aux accidents de la circulation. Celle-ci précise implicitement en son article premier la nécessité d'un lien de causalité entre l'accident et le dommage : "victimes d'un accident de la circulation". Mais en déboutant l'intimé, la Cour d'Appel va rejeter son application : puisque la lésion oculaire n'est due qu'à l'opération, et non à l'accident, la loi sus citée est "sans incidence". [...]
[...] En effet, pour qualifier quelqu'un de responsable d'un dommage, il faut que ce dommage soit la conséquence de sa faute : il doit exister un lien de cause à effet, dont la preuve pèse sur le demandeur à l'action en responsabilité. Cependant, il est rare qu'un dommage soit le résultat d'un fait générateur unique ; comme le montre l'arrêt rendu la deuxième chambre civile de la Cour de Cassation, réunie en date du 27 janvier 2000, la multiplicité des causes complique la détermination d'un tel lien de causalité. En l'espèce, suite à un accident de la circulation dont Mme LEGENDRE est reconnue responsable, M. LALIGAND est victime de blessures à la colonne vertébrale rendant nécessaire une intervention chirurgicale. [...]
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