Le Gros Robert, dictionnaire dont la réputation n'est plus à faire, définit la discrimination de façon assez succincte : « action de distinguer selon des critères définis ». Soit. A défaut d'être riche d'enseignement, la définition a le mérite d'être claire. Si on l'applique au droit du travail et, en particulier, au syndicalisme, la discrimination syndicale pourrait se définir comme l'action consistant à défavoriser un salarié en raison de son appartenance à un syndicat ou de ses activités syndicales. La discrimination est donc une rupture d'égalité en contradiction avec l'article Premier de la DDHC qui dispose que « les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droit ». En refusant de l'embaucher, en ne renouvelant pas son contrat, en ralentissant sa carrière, en lui refusant une augmentation… l'employeur peu scrupuleux pourra traiter un salarié moins favorablement qu'un autre sur le seul critère de ses activités syndicales.
Mais parfois, il peut arriver que certains délégués syndicaux invoquent la discrimination pour obtenir réparation d'un préjudice qui n'a en réalité rien de discriminatoire. D'où la nécessité d'établir des limites, de définir clairement ce qu'est la discrimination et, surtout, d'appliquer une méthode qui permettra de savoir s'il y a ou non pratique discriminatoire. C'est précisément ce que fait la chambre sociale de la Cour de cassation dans cet arrêt rendu le 29 juin 2005 :
En l'espèce, M. A, délégué syndical à la société IBM France, secrétaire d'un comité d'établissement et membre du comité central d'entreprise, a imputé à son employeur une pratique discriminatoire dans la prise en charge de certains de ses frais de déplacement et lui a réclamé une somme en référé prud'homal.
[...] Il espère être remboursé sur le fondement d'une discrimination qui n'existe pas puisqu'il n'y a pas ici de différence de traitement avec les autres salariés placés dans une situation similaire. Heureusement, les juges de la Cour suprême ne se laissent pas prendre au piège et rejettent vigoureusement la requête du salarié en cassant l'arrêt de la Cour d'appel qui lui était favorable. On ne peut que saluer la décision de la chambre sociale de la Cour de cassation qui encadre de manière assez stricte le droit d'invoquer la discrimination syndicale : chambre sociale et non pas socialiste. [...]
[...] D'autres facteurs peuvent entrer en compte pour justifier une différence de traitement par rapport à d'autres salariés : disponibilité du salarié, présence et investissement dans l'entreprise, dynamisme, compétence Aussi, dans l'hypothèse où deux salariés ne bénéficient pas des mêmes avantages ou du même déroulement de carrière bien qu'ils soient placés dans des situations similaires, l'employeur doit être en mesure de présenter des éléments objectifs susceptibles d'expliquer pourquoi (voir à cet égard : CA Paris, 18e chambre février 2005 : l'employeur ne justifie pas par des éléments objectifs le caractère moins favorable de l'évolution de la carrière d'une salariée appartenant à un syndicat par rapport à la quasi- totalité de ses collègues se trouvant dans une situation comparable. De même : CA Lyon, chambre sociale décembre 2004). La discrimination syndicale repose donc sur une différence de traitement, soit par rapport à la situation d'autres salariés (mais d'autres éléments peuvent expliquer cette différence de traitement), soit par rapport à une situation antérieure (mais il faut alors que cette différence de traitement par rapport à une situation antérieure soit concomitante à une différence de traitement par rapport à d'autres salariés). [...]
[...] Cet arrêt opère donc clairement un rejet du critère unique fondé sur la seule différence de traitement par rapport à une situation antérieure. II. Discrimination/Non-discrimination : des difficultés d'établir une frontière On a vu que la discrimination repose sur une différence de traitement. Mais cette différence de traitement peut être difficile à déterminer. C'est pourquoi la jurisprudence a effectué un aménagement de la charge de la preuve favorable au salarié Pourtant, la Cour de cassation rappelle ici que si le salarié s'estimant victime de mesures discriminatoires a le droit d'invoquer la discrimination, il ne saurait faire un usage abusif de ce droit A. [...]
[...] R 516-31 ainsi que les articles L 122-45 aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire en raison de ses activités syndicales et L 412-2 Il est interdit à tout employeur de prendre en considération l'appartenance à un syndicat ou l'exercice d'une activité syndicale pour arrêter ses décisions en ce qui concerne notamment l'embauchage, la conduite et la répartition du travail, la formation professionnelle, l'avancement, la rémunération et l'octroi d'avantages sociaux, les mesures de discipline et de congédiement Toute mesure prise par l'employeur contrairement aux dispositions des alinéas précédents est considérée comme abusive et donne lieu à des dommages et intérêts du Code du travail. La question était ici de savoir s'il y avait eu ou non discrimination de la part de l'employeur qui refusait de rembourser les frais de déplacement d'un salarié délégué syndical. En d'autres termes, et de manière plus générale, dans quelle mesure un acte de l'employeur peut-il être considéré comme discriminatoire? Et surtout, de quelle manière peut-on déterminer s'il y a eu discrimination sur le fondement de l'activité syndicale ? [...]
[...] C'est précisément ce que fait la chambre sociale de la Cour de cassation dans cet arrêt rendu le 29 juin 2005 : En l'espèce, M. délégué syndical à la société IBM France, secrétaire d'un comité d'établissement et membre du comité central d'entreprise, a imputé à son employeur une pratique discriminatoire dans la prise en charge de certains de ses frais de déplacement et lui a réclamé une somme en référé prud'homal. Si l'on ignore le jugement rendu par le Conseil des prud'hommes, on sait en revanche que par un arrêt du 25 février 2004, la Cour d'appel de Montpellier décide d'allouer des sommes en guise de réparation d'un trouble manifestement illicite à M. [...]
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