Les romains considéraient le dol avant tout comme une « machination », c'est à dire un ensemble d'actes matériels, depuis la définition donnée par la jurisprudence du dol a été considérablement élargie et recouvre des comportements beaucoup plus subtils et moins ostentatoires.
Ainsi, un arrêt de rejet de la Troisième Chambre civile de la Cour de Cassation en date du 2 octobre 1974 se prononce sur l'invocation d'une réticence dolosive en vue de l'annulation d'un contrat de vente pour vice du consentement.
Un contrat de vente sur immeuble est conclu, sous condition suspensive de l'octroi d'un prêt par un organisme financier à l'acheteur. Ce dernier verse alors un acompte de 1000 francs. Il est stipulé dans le contrat que l'acheteur supporterait les servitudes passives de toute nature des biens en question et qu'en cas de désistement de l'acheteur, le vendeur aurait la faculté d'exiger la réalisation de la vente ou de conserver l'acompte à titre de dédit. L'acheteur fait par la suite connaître au notaire que le prêt envisagé n'a pas été obtenu et indique qu'il renonce à l'acquisition car il a appris la prochaine installation d'une porcherie à cent mètres du bien immobilier.
L'acheteur demande alors la restitution de l'acompte devant la Cour d'appel de Riom en faisant valoir que s'il avait été informé de l'installation d'une porcherie à proximité, il n'aurait jamais accepté en raison des inconvénients. Les juges du fond lui donnent raison dans un arrêt du 1er mars 1973 et condamne le vendeur à restituer l'acompte. En effet, ils écartent l'application de la clause de non-garantie des servitudes passives insérée au contrat car selon eux, il y avait eu réticence dolosive, c'est-à-dire que le vendeur a gardé sciemment le silence en dissimulant à l'acheteur un fait, l'installation de la porcherie, qui, s'il en avait été informé, l'aurait empêché de contracter. Il s'agit donc d'un dol vice du consentement qui est sanctionné par la nullité du contrat. Pour justifier sa décision, la Cour n'oublie pas de montrer que le vendeur n'ignorait pas ce fait puisque aussitôt informé de la protestation de l'acheteur, il a indiqué la date de l'arrêté préfectoral autorisant cette porcherie et a affirmé que l'acheteur était censé en connaître son existence. Si l'acheteur devait le savoir alors le vendeur lui-même ne devait pas l'ignorer.
Mais le vendeur forme un pourvoi en cassation contre cette décision. Il avance un certain nombre d'arguments. Premièrement la Cour d'appel n'a pas apporté la preuve de l'existence d'un certain nombre de conditions constitutives de la réticence dolosive comme le caractère intentionnel du silence, l'existence d'une erreur provoquée par ce silence, l'existence de manœuvres, l'ignorance de l'acheteur, la qualité substantielle de l'élément dissimulé, le caractère déterminant du comportement du vendeur sur le consentement de l'acheteur ni même seulement le lien de causalité entre les deux. Ensuite, le demandeur au pourvoi reproche à l'arrêt d'avoir refusé d'appliquer la clause du contrat qui prévoyait qu'en cas de désistement de l'acheteur, le vendeur pourrait de toute façon exiger la réalisation de la vente ou garder l'acompte à titre de dédit et que l'acheteur prendrait les immeubles dans leur état actuel et supporterait les servitudes passives de toute nature pouvant grever ces immeubles.
La question de droit ainsi posée à la Haute juridiction est donc de savoir si la simple réticence alors même qu'elle ne porte pas sur une qualité substantielle du contrat peut être considérée comme dolosive et entraîner la nullité du contrat en tant que vice du consentement.
A cette question, la Cour suprême répond par la positive en rejetant le pourvoi. Elle estime que le dol peut être constitué par le silence d'une partie dissimulant à son cocontractant un fait qui, s'il avait été connu de lui, l'aurait empêché de contracter, elle affirme donc le principe de la réticence dolosive, et que si l'erreur provoquée par le dol a été déterminante dans le consentement du cocontractant alors peu importe si elle ne porte pas sur une qualité substantielle de la chose. Sans le dire expressément, la Cour de cassation admet également la réticence dolosive quand il existe dans le contrat une clause contraignant le cocontractant à réaliser le contrat ou à laisser un acompte. Ainsi, si elle admet le dol, cela signifie que le contrat est frappé de nullité et de cette façon en l'espèce le vendeur est tenu de restituer l'acompte.
Si l'intérêt de la notion de réticence dolosive est d'élargir les cas de dol et par là même de nullité pour vice du consentement (I), il semble en découler la consécration d'une obligation de loyauté et d'information. (II)
[...] Cependant, la partie lésée pouvait invoquer une erreur sur la substance grâce à l'article 1110 du Code civil. L‘autre aspect de la défense du vendeur concerne également la preuve du caractère dolosif de cette réticence ainsi les juges du fond n'ont pas cherché à caractériser la réticence, ni même à établir le lien de causalité existant entre le consentement de l'acheteur et le comportement du vendeur et encore moins son caractère déterminant. En outre, le demandeur au pourvoi soutient que le dol ne peut pas être pris en compte si l'erreur provoquée ne porte pas sur une qualité substantielle de l'objet du contrat. [...]
[...] Pour le vendeur, il appartient à la Cour de cassation de faire une interprétation stricte de l'article 1116 du Code civil qui dispose que le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manœuvres pratiquées par l'une des parties sont telles qu'il est évident que sans elles l'autre partie n'aurait pas contracté Or, en l'espèce, leur simple silence ne pouvait être considéré comme une manœuvre. En l'occurrence, avant l'arrêt du 19 mai 1958 cet argument aurait été recevable. [...]
[...] Les juges du fond lui donnent raison dans un arrêt du 1er mars 1973 et condamne le vendeur à restituer l'acompte. En effet, ils écartent l'application de la clause de non-garantie des servitudes passives insérée au contrat car selon eux, il y avait eu réticence dolosive, c'est-à- dire que le vendeur a gardé sciemment le silence en dissimulant à l'acheteur un fait, l'installation de la porcherie, qui, s'il en avait été informé, l'aurait empêché de contracter. Il s'agit donc d'un dol vice du consentement qui est sanctionné par la nullité du contrat. [...]
[...] Par exemple dans l'arrêt de la Troisième Chambre civile de la Cour de cassation datant du 20 mars 1996, la Haute juridiction affirme dans son attendu de principe qu'il appartenait aux vendeurs d'informer l'acquéreur, quelque soit l'utilisation envisagée pour l'immeuble, de la situation juridique de la propriété vis-à-vis de l'exercice du droit de chasse. Mais la jurisprudence considère qu'il faut qu'une confiance mutuelle existe entre les contractants. De même, l'arrêt de la Troisième Chambre civile du 29 novembre 2000 affirme que l'absence de déclaration par le vendeur de l'interdiction préfectorale d'habiter dans l'immeuble vendu était constitutive d'une réticence dolosive de nature à vicier le consentement. [...]
[...] C'est le cas spécialement en matière d'assurance mais également en droit maritime. Elle est par principe plus lourde quand il s'agit d'un professionnel surtout quand il s'adresse au profane ou autrement dit au consommateur. Ce principe vise à protéger le consommateur. Cependant, il faut préciser que cette règle a des limites, le consommateur ne peut par exemple s'en prévaloir pour être dédommagé du préjudice qu'à causé pour lui l'absence d'information sur les conséquences nocives du tabac. En l'espèce, le vendeur a bien manqué à son obligation de renseigner l'acheteur. [...]
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