La volonté contractuelle survit-elle au décès de son auteur ? Il paraît évident que la réponse doit être modulée selon le degré d'avancement de la volonté du défunt. C'est ce que nous invite à différencier l'arrêt du 10 mai 1989 rendu par la 3ème chambre civile de la Cour de cassation.
Le 12 juillet 1981, un compromis de vente avait été notifié au titulaire d'un droit de préemption, la SAFER. Cette dernière prétendait la vente conclue à son bénéfice bien que son acceptation fût notifiée après la mort de la pollicitante, Mme Girard. Mme Planel, l'héritière a assigné la SAFER pour faire constater que le droit de préemption était devenu caduc. La Cour d'Appel de Lyon par un arrêt du 8 juillet 1987 a débouté la SAFER de leur action en considérant que les prétentions nouvelles de Mme Planel ouvraient un délai de deux mois à la SAFER pour faire connaître son acceptation ou son refus. La SAFER a alors formé un pourvoi en cassation. A l'appui de celui-ci elle soutient tout d'abord que l'héritière ne pouvait pas se dégager unilatéralement delà vente formée par l'échange des consentements entre la pollicitante et la SAFER. Elle considère ensuite, que l'assignation par Mme Planel ne constitue pas un acte renouvelant la procédure, la SAFER n'avait pas à réitérer dans les deux mois de cette assignation la préemption exercée. Enfin, elle estime que la Cour d'Appel ne pouvait déclarer que la préemption était caduque ayant validé qu'elle rendait la vente parfaite.
Les juges de la Cour de Cassation ont dû se poser la question de savoir si en l'absence de délai et en cas de décès du pollicitant avant que l'offre n'ai été acceptée par le bénéficiaire, l'offre est elle caduque ou transmise aux ayants droit du pollicitant ?
Par son arrêt du 10 mai 1989, la Cour de cassation casse l'arrêt de la Cour d'appel de Lyon en énonçant clairement que la notification de la vente au préempteur potentiel ne constitue à son égard qu'une simple offre et non pas une promesse de vente. Elle considère ensuite que l'acceptation posthume de la SAFER n'a pas pu parfaire l'esquisse contractuelle de Mme Girard et que l'offre était ainsi devenue caduque.
Il s'agit de savoir si la formation de la vente était avant que n'intervint le décès de la pollicitante, en état ou non d'être conclue par la seule acceptation ultérieure de son destinataire. Pour mesurer les conséquences juridiques de la mort de la pollicitante et de l'absence de délai sur la genèse contractuelle (II), il faut avant tout qualifier les manifestations de volontés qui existaient avant le décès (II).
[...] S'installe alors un doute quant à savoir si la notification s'analyse en une simple offre de contracter ou en une promesse de contrat. Dans cette dernière hypothèse, Mme Girard tenue par sa promesse de vendre, n'aurait qu'à subir la levée d'option de la SAFER, dans le délai légal, par quoi celui-là se substituerait à l'acquéreur conditionnel dans un contrat déjà conclu. Or, en l'espèce, tel n'est pas l'opinion de la Cour de Cassation. Elle énonce clairement que la notification de la vente au préempteur potentiel ne constitue à son égard "qu'une simple offre" et non pas "une promesse de vente". [...]
[...] L'arrêt du 10 mai 1989 rendu par la Cour de Cassation laisse supposer que même dans la configuration d'un délai, exprès ou tacite, pour l'acceptation de l'offre, celle-ci n'en peut pas moins être dénoncée à tout moment. En effet, le pollicitant qui révoque son offre avant l'expiration du délai expose sa responsabilité délictuelle mais les tribunaux n'admettent pas que le contrat ne puisse se former en dépit d'une révocation hâtive. L'acceptation d'une offre révoquée ne fait donc jamais un contrat. [...]
[...] Dans son arrêt de 1989, la troisième chambre civile de la Cour de cassation est revenue à la jurisprudence traditionnelle puisqu'elle refuse de voir dans l'offre un véritable engagement créateur autonome d'obligation. Contrairement à l'arrêt de 1983, la Cour de Cassation considère que la notification du compromis au titulaire du droit de préemption ne doit pas s'analyser en une promesse de contrat. Cette dernière se recommande de ce que les termes de la notification sont d'un contrat auquel, par hypothèse, le vendeur a déjà donné son accord. [...]
[...] A l'appui de celui-ci elle soutient tout d'abord que l'héritière ne pouvait pas se dégager unilatéralement delà vente formée par l'échange des consentements entre la pollicitante et la SAFER. Elle considère ensuite, que l'assignation par Mme Planel ne constitue pas un acte renouvelant la procédure, la SAFER n'avait pas à réitérer dans les deux mois de cette assignation la préemption exercée. Enfin, elle estime que la Cour d'Appel ne pouvait déclarer que la préemption était caduque ayant validé qu'elle rendait la vente parfaite. [...]
[...] Le prétendu préempteur n'a pu utilement acquiescer à une offre devenue caduque la caducité de l'offre s'explique également par l'absence de délai assurant son maintien La caducité de l'offre du fait du décès du pollicitant La SAFER, titulaire du droit de préemption, argue que la publication n'avait pas été rétractée avant le décès de Mme Girard. Elle soutient que son acceptation aurait rendu parfait l'échange des consentements. Pour la Cour de cassation, l'offre était devenue caduque par l'effet du décès de la propriétaire. Étant caduque, l'offre ne pouvait être l'objet d'une acceptation de son destinataire. La solution de la Cour paraît très nette. On a vu précédemment que l'offre de contracter désigne un acte unilatéral dépourvu de force obligatoire pour son auteur. Elle peut engager son auteur, mais ne le lie pas. [...]
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