Mardi 17 novembre, un collégien a été arrêté par la police de Beauvais (Oise). Le jeune garçon de 13 ans projetant de tuer ses professeurs, s'est emparé du fusil de ses parents, l'a chargé de 25 cartouches et s'est rendu sur le chemin de son établissement. Durant le trajet, le jeune garçon aurait renoncé à commettre son projet en se séparant de l'arme et en la jetant dans un champ. Il semble alors dans un premier temps intéressant de remarquer que l'enfant échappera d'une part à la condamnation d'homicides volontaires car les éléments constitutifs de l'infraction ne sont point réunis. Cependant peut-il se voir condamner pour tentative d'homicide volontaire ? Pour qu'il y ait condamnation, il faut qu'il y ait d'une part un commencement d'exécution et d'autre part une interruption involontaire. S'il est avéré qu'il ait vraisemblablement eu désistement volontaire, alors le jeune collégien échappera très certainement à la sanction pénale. Cependant, les juges se préoccuperont de savoir ce qu'elle a été la cause prépondérante du désistement. Nous sommes donc en présence d'une tentative interrompue par une interruption volontaire. Qu'en est-il cependant d'une tentative infructueuse, tentative durant laquelle le délinquant a réuni tous les éléments constitutifs de l'infraction mais le résultat qu'il espérait ne s'est pas produit ? C'est ce que précise l'arrêt PERDEREAU du 16 janvier 1986, rendu par la Chambre Criminelle de la Cour de cassation.
En l'espèce, Monsieur WILLEKENS a été tué à la suite d'une rixe. Son assaillant, Monsieur CHARAUX, l'a d'abord assommé à coup de barre de fer puis a appuyé ladite barre de tout son poids contre le cou de Monsieur WILLEKENS, provoquant son étouffement. Il a ensuite abandonné le corps. Le lendemain, Monsieur PERDEREAU, pensant que Monsieur WILLEKENS vivait toujours, l'a frappé à coups de bouteille et étranglé avec un lien torsadé, dans l'ignorance qu'il était déjà mort.
La Chambre d'accusation de la Cour d'appel de Paris rend un arrêt le 11 juillet 1985 en renvoyant Monsieur PERDEREAU devant la Cour d'assises de l'ESSONNE sous l'accusation de tentative d'homicide volontaire. Le demandeur, Monsieur PERDEREAU intente un pourvoi en cassation. La Chambre criminelle de la Cour de cassation casse et annule l'arrêt de la Chambre de l'accusation, dans un arrêt du 16 janvier 1986.
Le demandeur, au soutien de son pourvoi, invoque des contradictions apparentes ressortant de l'arrêt de la Chambre d'accusation et manifestant un défaut de cohérence général de l'arrêt visé. D'une part, le demandeur observe que la Chambre d'accusation a renvoyé le prévenu en retenant que des actes de violences avaient été commis avec une barre de fer, puis affirme que cet acte a été commis avec un lien torsadé. Ensuite, corollaire de cette contradiction, le demandeur invoque l'impossibilité pour la Chambre d'accusation de statuer sur de nouvelles charges (coups et strangulations avec une barre de fer). Enfin, le demandeur précise que ne pouvait constituer une tentative d'homicide volontaire, les violences commises sur un cadavre, même si l'intention demeurait.
L'arrêt attaqué fonde sa décision en reconnaissant la tentative d'homicide volontaire, en observant dans ses motifs qu'il y a eu un commencement d'exécution dans l'action de frapper la victime sur le crâne à coups de bouteille et en l'étranglant avec un lien torsadé , et que cette tentative n'a manqué son action que par suite de « circonstances indépendantes » de la volonté de son auteur. Cependant, la Chambre d'accusation se contredit en affirmant dans le dispositif de l'arrêt du 11 juillet 1985 que la tentative d'homicide volontaire est à retenir car le commencement d'exécution est caractérisé par l'action de frapper avec la barre de fer et de procéder à une strangulation avec celle-ci. La situation caractérisant le commencement d'exécution est alors différente tant dans les motifs que dans le dispositif. Pour cette raison, la Chambre criminelle de la Cour de cassation casse l'arrêt en observant cette contradiction et en l'assimilant à un défaut de motifs.
[...] Le problème du crime impossible La tentative infructueuse est une tentative durant laquelle le délinquant a accompli tous les éléments constitutifs de l'infraction mais le résultat espéré ne s'est pas produit. Le résultat sera infructueux d'une part si l'infraction est manquée, d'autre part si l'infraction est impossible. L'infraction manquée suggère que le délinquant n'eût pas été suffisamment habile pour permettre la consommation de l'infraction, c'est le cas par exemple d'un meurtre qui échoue par maladresse. Dans le cas d'une infraction manquée, il y aura responsabilité pénale du délinquant, assimilée au cas d'une tentative interrompue. [...]
[...] La solution retenue par la Chambre d'accusation de la Cour d'appel de Paris tend donc à conformer l'orientation jurisprudentielle. Le prévenu est alors condamné pour tentative d'homicide volontaire. Cependant, on peut poursuivre notre réflexion en s'interrogeant sur la valeur d'une telle condamnation. II) Critique de l'arrêt PERDEREAU L'arrêt PERDEREAU du 16 janvier 1986 s'inscrit dans la jurisprudence contemporaine en matière d'infraction impossible, il préconise alors une répression systématique pour une infraction impossible, solution qui demeure critiquable car elle a pour corollaire d'affaiblir le principe de légalité des délits et des peines Une répression impossible pour une infraction impossible L'article 121-5 du Code pénal dispose que La tentative est constituée dès lors que, manifestée par un commencement d'exécution, elle n'a été suspendue, ou n'a manqué son effet qu'en raison de circonstances indépendantes de la volonté de son auteur En l'espèce il est indéniable que la tentative n'a pas été suspendue par un désistement volontaire ou involontaire. [...]
[...] Le législateur n'a point incriminé un tel comportement. Comme le rappelle le Professeur Didier REBUT (Université Panthéon-Assas Paris on observe une dérive subjectiviste de la Chambre criminelle qui aboutit à transgresser le principe de légalité. Ainsi l'objet de l'homicide volontaire sur une personne déjà morte n'est pas déterminé par le Code pénal. [...]
[...] Que lui reste-t-il alors si ce n'est l'intention de donner la mort, initialement découverte chez Monsieur PERDEREAU ? L'intention semble alors le seul élément qui motive la jurisprudence dans le cas d'infraction impossible, pour sanctionner le délinquant. Comme le précise Danièle MAYER et Claude GAZOUNAUD (D.1986, Jur, page 267), cet arrêt témoigne le dilemme posé régulièrement devant le juge pénal, à savoir le choix entre laisser impunis des agissements révélant un état socialement dangereux conformément au principe de légalité, ou à l'inverse, sacrifier des principes fondamentaux du Droit pénal garants de la liberté individuelle Pourtant, le choix opéré par le juge répressif dans l'affaire PERDEREAU est sans appel et témoigne d'un déclin certain du principe de légalité. [...]
[...] La Chambre criminelle de la Cour de cassation casse et annule l'arrêt de la Chambre de l'accusation, dans un arrêt du 16 janvier 1986. Le demandeur, au soutien de son pourvoi, invoque des contradictions apparentes ressortant de l'arrêt de la Chambre d'accusation et manifestant un défaut de cohérence général de l'arrêt visé. D'une part, le demandeur observe que la Chambre d'accusation a renvoyé le prévenu en retenant que des actes de violence avaient été commis avec une barre de fer, puis affirme que cet acte a été commis avec un lien torsadé. [...]
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