Par acte authentique du 24 janvier 2001, la SCI Le parc des Renardières vend un appartement à la SCI Audrey. Il est important de préciser que cet appartement est situé au rez-de-chaussée d'un immeuble, qu'il dispose d'un jardin privatif et surtout, d'une belle vue sur un espace vert appartenant à la commune. La vente est donc conclue entre les deux sociétés. Mais, par la suite, la SCI Audrey apprend que la commune de Courbevoie, propriétaire de l'espace vert, décide d'y construire un logement de gardiens. La SCI Audrey qui n'était pas au courant de ce projet décide alors d'assigner le vendeur en réduction du prix de vente en invoquant des manoeuvres dolosives ayant consisté en la dissimulation dudit projet. La SCI Audrey estime que si elle avait été au courant de ce projet de construction et donc de l'obstruction de la vue de l'appartement qu'elle allait acquérir alors elle n'en aurait pas donné le même prix. La demande de l'acheteur est donc la réduction du prix de vente.
Ainsi, la SCI Audrey assigne la SCI Le Parc des Renardières. La Cour d'appel condamne le vendeur à payer à la SCI Audrey 15000 Euros à titre de dommages et intérêts. La SCI Le parc des Renardières se pourvoi alors en cassation, elle veut faire annuler la décision de la Cour d'appel car elle estime que le dol n'est pas justifié, puisque la preuve d'un élément intentionnel n'a pas été rapporté.
La question qui est posée à la Cour de cassation est donc la suivante : Un juge peut-il accorder des dommages et intérêts pour la faute consistant en une réticence dolosive sans avoir à caractériser l'élément intentionnel du silence ? (...)
[...] En effet, dans la définition de base du dol, si les manœuvres n'avaient pas eu lieu, le contrat n'aurait pas été conclu. En l'espèce, si le vendeur n'avait pas gardé le silence sur le projet de construction, la SCI Audrey aurait-elle refusé d'acheter l'appartement ? Il semble que non. En revanche, elle l'aurait payé à un prix moins élevé, puisque que la vue semblait être un élément déterminant du prix. Pour cette raison, la SCI Audrey demande une indemnisation et non l'annulation du contrat. [...]
[...] La réponse de la Cour de cassation est affirmative. Elle rejette le pourvoi, ce qui signifie qu'elle est d'accord avec la décision de la Cour d'appel de Versailles, en date du 19 janvier 2009 : la Cour d'appel qui n'était pas saisie d'une demande tendant à l'annulation de la vente a pu, sans avoir à se prononcer expressément sur le caractère intentionnel de la réticence qu'elle constatait et qui s'analysait aussi en un manquement à l'obligation précontractuelle d'information du vendeur, allouer des dommages et intérêts à l'acquéreur en réparation du préjudice subit Ainsi, la Cour de cassation réaffirme les éléments constitutifs du dol, tout en apportant une innovation : le dol sans intention elle justifie ensuite la sanction à l'aide de deux fondements juridiques (II). [...]
[...] En effet, la Cour de cassation qualifie la faute du vendeur de deux façons. C'est à la fois un manquement à l'obligation précontractuelle d'information mais aussi un dol par réticence. La sanction de la première se comprend parfaitement à travers l'article 1382. Mais, comment sanction la réticence dolosive si la preuve du caractère intentionnel de cette dernière n'est pas rapportée ? En effet, dans la définition du dol, l'élément intentionnel est fondamental. Mais, n'existe-t-il qu'un seul type de dol ? [...]
[...] En effet, un arrêt de la Cour de cassation en date du 22 juin 2005 explique que même si le dol est incident, on peut demander une annulation. Or, ici la Cour de cassation sous entend l'inverse. On peut alors se poser la question suivante : pourquoi la Cour de cassation n'utilise pas le terme dol incident ? Il semble qu'elle ne souhaite pas le nommer clairement puisqu'une partie de la doctrine ne reconnait pas cette distinction faite entre dol incident et dol principal. [...]
[...] Il y a une double qualification, un mélange des termes. On se trouve donc à la frontière entre le droit contractuel (réticence dolosive) et le droit délictuel (manquement à l'obligation précontractuelle d'information). La Cour de cassation ne remet pas en cause les éléments matériels du dol : il faut qu'il y ait des manœuvres. Ici, il s'agit du silence qui a déjà été reconnu précédemment par la jurisprudence. Mais, il faut aussi un lien entre ces manœuvres et le consentement. B. [...]
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