Le droit des transports a toujours enrichi le droit des obligations, qu'il s'agisse de cession de créance, de délégation ou encore de prescription. La jurisprudence en fournit un nouvel exemple par cet arrêt rendu le 30 mars 2005 par la Chambre commerciale de la Cour de cassation.
En l'espèce, deux entreprises de transport, la société Els et la société Leray, étaient réciproquement créancières et débitrices, au titre de diverses prestations de déplacement effectuées, pour la première, sur une période allant d'octobre 1999 à juin 2000 et pour la deuxième, d'août 1999 à juin 2000. La société Els agit en paiement contre l'autre société, laquelle fait alors valoir la compensation de cette dette de prix avec sa propre créance de prix. La société Els lui oppose la prescription annale de l'article L. 133-6 du Code de commerce, arguant alors qu'il était trop tard puisque la créance était prescrite, selon elle, depuis juin 2000 (...)
[...] C'est ce qu'elle avait valablement fait valoir dans ses conclusions du 26 avril 2001, dans lesquelles elle avait invoqué la compensation, et donc exprimé une demande. La compensation ayant épuisé son effet extinctif, et la société Els lui ayant opposé la prescription annale, la société Leray s'est donc fondée sur son effet interruptif de prescription. La question qui s'est alors posée pour l'excédent de la dette la plus élevée fut la suivante : qu'est ce qui vient interrompre la prescription ? [...]
[...] Mais la Chambre commerciale, décidant de s'en tenir au texte de l'article 1290 du Code civil, donne une solution inédite. Elle vient préciser, afin de dissiper toute confusion son bénéfice pouvant être invoqué à tout moment Il faut entendre par la que le bénéfice de la compensation peut être invoqué même hors délai de prescription, et donc que l'invocation, ou la demande, comme le dit l'arrêt, de compensation, n'est pas susceptible de prescription. La compensation existe donc bien, mais comment déterminer son existence et donc l'extinction de la prescription ? [...]
[...] Bremond propose alors une justification à l'attachement de l'effet interruptif à la compensation elle même. Selon lui, puisque la compensation est un double paiement abrégé, il convient alors de considérer qu'en payant sa dette, même partiellement, le débiteur, c'est-à-dire en l'espèce la société Els, la reconnait tacitement et intégralement. En l'espèce, d'une part la société Els a appris qu'à son insu une compensation avait été opérée et qu'elle a ainsi tacitement reconnu la dette qui pesait sur elle, et, d'autre part, la société Leray a appris que sa demande reconventionnelle fut formulée dans un délai qu'elle ignorait. [...]
[...] En l'espèce, en invoquant la compensation par voie reconventionnelle, la société Leray fait valoir une prétention dont l'admission par le juge consacrera incidemment sa créance non compensée. Ceci étant incompatible avec la prescription en cours, force est de constater en l'espèce une citation de justice qui, sans rétroactivité, interrompt la prescription. Ainsi, cette solution a put être qualifiée d'empreinte d'un artifice difficile à justifier. [...]
[...] Celui ci reprochait à la Chambre commerciale de ne pas tenir compte du caractère automatique de la compensation légale, pourtant expressément affirmé par le Code civil. En effet, son article 1290 dispose que la compensation s'opère de plein droit par la seule force de la loi même à l'insu des débiteurs ; les deux dettes s'éteignent réciproquement, à l'instant où elles se trouvent exister à la fois, jusqu'à concurrence de leur quotité respective Il découle de ce texte que, une fois invoqué, le mécanisme légal opère à la date de réunion de ses conditions. [...]
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