L’infraction commise par le salarié pendant le temps de travail
Lorsque le salarié conduit un véhicule de son entreprise et s’il commet une ou plusieurs infractions au Code de la route, alors celles-ci peuvent résulter sur une faute disciplinaire qui pourrait justifier un licenciement. Ceci étant dit, il faut souligner le fait qu’une simple infraction ne saurait être de nature à enclencher une procédure de licenciement. Il conviendra, pour l’employeur, de motiver sa décision et surtout de s’appuyer sur le comportement du salarié pour que sa décision soit utilement motivée. Ainsi, par exemple, pour le cas où le retrait du permis a été décidé à la suite d’un comportement dangereux de la part du salarié, que ce comportement le soit pour autrui ou pour lui-même, son licenciement pourra être motivé par une faute grave qui, dans la pratique, a l’effet de le priver d’indemnités de rupture. Il peut s’agir d’une conduite en état d’ébriété (cf. en ce sens, Cass. soc., 30/09/2023, n°12-17.182).Ce sont finalement les circonstances de l’espèce qui peuvent, ou non, permettre de justifier ce licenciement pour cause réelle et sérieuse ou pour faute grave.
Incidence d'un retrait de permis sur le contrat de travail
L’infraction commise par le salarié hors de son temps de travail
Il convient immédiatement de retenir qu’il ne sera pas possible pour l’employeur de décider d’une sanction disciplinaire à l’encontre de son salarié dans l’hypothèse d’une infraction commise en dehors de son temps de travail, infraction qui entrainerait pourtant la suspension voire le retrait de son permis.En effet, la Cour de cassation a considéré qu’il s’agit là d’un fait qui est exclusivement commis dans la vie privée du salarié et que celui-ci ne saurait utilement résulter sur une sanction disciplinaire. Si l’employeur décidait d’actionner la procédure de licenciement et que celui-ci aboutissait, alors il serait considéré comme abusif (cf. Cass. soc., 03/05/2011, n°09-67.464).
Toutefois, l’employeur n’est pas entièrement démuni face à cette situation. En effet, si le salarié perd son permis de conduire, et que cette perte résulte pour lui sur une impossibilité totale ou partielle d’exécuter son travail, alors celui-ci et son employeur pourront s’accorder pour que le contrat de travail soit maintenu pendant cette période (il pourra s’agir d’une réaffectation temporaire par exemple). Le licenciement sera néanmoins justifié légalement si la perte de ce permis résulte sur une impossibilité objective d’exécution de ses missions. Le licenciement est envisagé si l’exécution du travail implique la conduite d’un véhicule ; cependant, si le contrat de travail n’y est pas principalement lié, dans ce cas, la perte du permis ne pourrait constituer le fondement d’un licenciement.
Comment l’employeur se doit-il de motiver le licenciement ?
Pour le cas où la perte du permis de conduire n’est pas la conséquence d’une faute de la part du salarié, alors le licenciement disciplinaire ne peut être envisagé. Toutefois il faut préciser que si cette perte résulte sur des déséquilibres objectifs dans le cadre du fonctionnement de l’entreprise, ici, l’employeur pourra arguer de la justification du licenciement du salarié concerné. L’employeur devra alors démontrer que le bon fonctionnement de l’entreprise est impacté négativement et objectivement par cette suspension ou cette perte de permis.Si l’employeur prononce ce licenciement, par principe, le salarié dispose du droit à son préavis ainsi qu’à l’indemnité de licenciement correspondante. Néanmoins, et par exception, si cette exécution du préavis n’est pas possible, du fait même de cette perte ou suspension de permis de conduire et alors que celui-ci est obligatoire à l’exécution des fonctions du salarié, alors ce dernier ne pourra pas bénéficier de l’indemnité compensatrice (cf. Cass. soc., 28/02/2018, n°17-11.334).
Quid de l’inaptitude du salarié ?
Imaginons que le retrait du permis de conduire du salarié, ou sa suspension, est le résultat de problèmes médicaux de celui-ci, alors son employeur devra l’inviter à consulter un médecin du travail. Il reviendra à ce dernier de proposer une adaptation du poste de travail du salarié, ou bien de le déclarer comme inapte, physiquement, à occuper ses missions. Il reviendra à l’employeur de rechercher s’il existe, dans l’entreprise, un poste de travail qui conviendrait aux conditions du salarié, éventuellement après consultation du CSE. Si cela n’est pas concluant, l’employeur doit alors expliquer par écrit, qui sera remis au salarié, les raisons pour lesquelles son reclassement n’est pas possible. Selon les dispositions des articles L. 1226-2 et suivants, et L. 1226-10 et suivants du Code du travail, il sera possible pour l’employeur d’actionner une procédure de licenciement pour inaptitude physique et impossibilité de reclassement du salarié.Le licenciement du salarié déclaré inapte à occuper son emploi par le médecin du travail
Quid enfin du relevé de points ?
Est-il possible pour l’employeur de demander à son salarié le relevé de points de ce dernier ?Dans l’hypothèse où l’activité professionnelle du salarié commande que ce dernier conduise un véhicule, alors son employeur sera en mesure de demander qu’il justifie la détention effective de son permis de conduire. Toutefois, le permis de conduire en question doit en relation avec la catégorie de véhicule effectivement utilisé par le salarié. En vérité, il n’apparait pas possible pour l’employeur de demander le relevé de points du salarié (cf. les dispositions contenues au sein de l’article L. 223-7 du Code de la route) même s’il est en mesure de prévoir, dans le contrat de travail ou bien dans le règlement intérieur de l’entreprise, que la vérification de la détention du permis de conduire peut être effectuée et que le salarié est contraint d’informer son employeur de la perte ou de la suspension de son permis de conduire.