I. Définition

La responsabilité délictuelle se définit le plus souvent comme étant le cas de responsabilité sanctionnant tout dommage naissant de situation non régie par un contrat entre l'auteur du dommage et la victime. Afin de mieux cerner la notion, il est essentiel de retracer son historique.
En effet, en France, la responsabilité délictuelle a subi l'influence du droit romain, du droit barbare et de la loi salique. Puis ce droit français s'est inspiré des canonistes et ce ne fut qu'au 17e siècle avec Domat qu'apparaît une théorie générale de la responsabilité délictuelle. Cette théorie a inspiré les rédacteurs du Code civil. Avec l'avènement du Code civil, la responsabilité civile fut définitivement séparée de la responsabilité pénale. Plusieurs facteurs ont contribué à l'évolution de la responsabilité délictuelle, et le plus important de ces facteurs est la Révolution industrielle et le développement des transports. Effectivement, suite à la révolution industrielle, « le danger est partout » et il est nécessaire d'indemniser plus largement. Pour cela depuis le 20e siècle, le régime de la responsabilité répond à la nécessité d'indemniser les victimes et au phénomène de socialisation des risques.

Il ne faut pas oublier de mentionner que la responsabilité délictuelle se divise en trois régimes spéciaux : la responsabilité du fait personnel, du fait d'autrui et du fait des choses. Souvent, la responsabilité du fait personnel est envisagée comme étant « le droit commun de la responsabilité délictuelle ».

II. Conditions

Le système de la responsabilité délictuelle consacrée par le Code civil est une responsabilité basée sur la faute.

A- La faute
En 1804 la faute était constatée subjectivement et donc supposerait un comportement fautif de l'individu. Cette faute trouve son siège à l'article 1382 ancien du Code civil devenu l'article 1240 « tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ». Elle se définit selon cet article comme étant un fait illicite causé de manière intentionnelle.
De plus, l'article 1241 affirme que la faute pourrait être une négligence ou une imprudence, ce sont des fautes moins graves que les fautes intentionnelles que l'on trouve à l'article 1240. Donc la faute pourrait être le résultat d'un fait involontaire, non intentionnel.
En ce qui concerne la responsabilité du fait d'autrui si l'on suit aux articles 124 et s., on remarque que la faute pourrait être un défaut de surveillance. Néanmoins, dans ce type de responsabilité (du fait d'autrui), la faute n'est pas à prouver vu qu'il y a une présomption simple de faute.

Il ne faut pas oublier de mentionner que suite à la théorie de socialisation des risques, on commence à admettre une responsabilité objective, sans nécessité de prouver la faute. Ce sont des régimes spéciaux de responsabilité de par la loi comme le régime spécial des accidents de la circulation et des accidents du travail.

La deuxième condition est le dommage/préjudice. Notion aussi évolutive.


B- Le dommage/le préjudice
Souvent, la notion de préjudice et de dommage est considérée comme étant synonyme néanmoins, certains auteurs ont soutenu que ce seraient des faux synonymes vu que le dommage signifie l'atteinte subie alors que le préjudice en serait la conséquence.
Le préjudice est un élément de la responsabilité délictuelle. Sans elle, aucune action en responsabilité délictuelle ne peut être retenue.
Il peut être patrimonial et donc résulter d'une atteinte corporelle. Ce seraient les préjudices résultant de l'atteinte portée à l'intégrité physique de la personne. Parmi ces préjudices, on peut avoir par exemple les frais hospitaliers, médicaux…
Les préjudices peuvent être patrimoniaux résultant d'une atteinte à un droit matériel comme la perte éprouvée et le gain manqué.
Le préjudice peut être extrapatrimonial et donc il pourrait constituer une souffrance éprouvée. Ce type de préjudice peut résulter d'une atteinte à l'intégrité physique (physiologique, prix de la douleur -morale ou physique, esthétique, d'agrément, sexuel, d'accompagnement, d'établissement, permanent exceptionnel ou préjudice d'anxiété). Ce même préjudice extrapatrimonial peut résulter de l'atteinte au droit de la personnalité comme le droit à l'image, à l'honneur…

Pour que le préjudice soit réparable, celui-ci doit être certain et incontesté. Un préjudice éventuel ne pourrait être indemnisé. Ceci dit, le préjudice futur peut être réparé lorsqu'il constitue la prolongation d'un état de choses actuel. En ce qui concerne la perte de la chance, celle-ci est considérée comme préjudice certain et donc peut être réparée.

De plus, une autre condition s'ajoute : le dommage doit être personnel et direct. En d'autres termes, la victime doit l'avoir subi directement. Néanmoins, il est fréquent d'admettre l'indemnisation pour une victime par ricochet et ceci depuis l'arrêt Dangereux de 1970.

Finalement, le préjudice pour être réparable, il doit être licite. Pendant longtemps, la jurisprudence civile avait refusé tout droit à la concubine de réclamer des dommages-intérêts. Toutefois, avec l'arrêt Dangereux de 1970, il est permis d'indemniser désormais la concubine. Donc, pour certains, suite à cet arrêt, cette condition de licéité n'est plus réellement une condition d'indemnisation. Pourtant La Cour de cassation continue d'opter la notion intérêt licite (préjudice illicite) et non plus intérêt légitiment protégé.

Afin de repérer le préjudice, il serait plus facile de s'aider de la nomenclature de Dintilhac.

C- Le lien de causalité entre faute et dommage
Pour pouvoir retenir la responsabilité délictuelle, il faudrait établir le lien de causalité entre la faute et le dommage. Afin d'apprécier la théorie de lien de causalité, les juges peuvent adopter deux approches :
- La théorie de l'équivalence des conditions : on retient que tous les éléments sans lesquels le dommage ne se serait donc pas produit seraient des causes du dommage.
- La théorie de la causalité adéquate : seul, est retenu comme étant la cause du dommage, l'événement qui normalement aurait mené au résultat survenu.
Ce lien de causalité doit être prouvé afin que la victime puisse obtenir réparation.


Source : Droit civil 2e année « Les obligations », Dalloz, Stéphanie Porchy-Simon, édition 2014