En France, la responsabilité contractuelle ne figure pas dans le Code civil de 1804, mais correspond plutôt à une construction doctrinale élaborée à partir de dispositions éparses de ce code (par exemple l’article 1147 de Code civil). Cette notion a été largement contestée, et après la réforme de 2016 on ne retrouve toujours pas de consécration formelle de la notion de responsabilité contractuelle. Ainsi, par définition, la responsabilité contractuelle serait une responsabilité engagée lorsqu’un préjudice résulte de l’inexécution d’un contrat. Le débiteur semble avoir un choix entre exécuter ses obligations en nature ou verser au créancier une indemnité qui lui procurerait une satisfaction équivalente. Or c’est assez critiquable et ce choix semble aller à l’encontre de la force obligatoire du contrat, car celle-ci exige normalement une exécution en nature et à défaut par équivalent. De plus, cette responsabilité contractuelle semble se rapprocher de la responsabilité délictuelle. En effet, la responsabilité délictuelle fait allusion au cas où il n’existe aucun contrat entre l’auteur du dommage et la victime. Malgré ce rapprochement entre ces 2 types de responsabilités civiles qui toutes deux visent la réparation d’un dommage subi, la différence réside dans leurs régimes juridiques respectifs.

Il serait dès lors intéressant d’étudier dans un premier temps les critères de distinction de ces différents types de responsabilités (I) pour ensuite étudier l’intérêt de la distinction (II).

I-  Les critères de distinction

A-   A priori, des conditions de mise en œuvre indifférenciée

Que ce soit pour la responsabilité délictuelle ou bien pour la responsabilité contractuelle, a priori trois conditions cumulatives sont exigées (« a priori », car la responsabilité objective est à prendre en considération).

Ces trois conditions sont : la faute, le dommage certain et le lien de causalité.

Pour le dommage, dans ces deux types de responsabilités, il doit être juridiquement réparable, certain, légitime et direct. La réparation d’un préjudice éventuel est en principe exclu.

Pour la faute, celle-ci est retenue dans les deux responsabilités, quel que soit son degré de gravité. Néanmoins, la faute est envisagée différemment dans les différents types de responsabilités (voir infra).

Finalement, un lien de causalité est exigé afin de pouvoir invoquer la responsabilité délictuelle/contractuelle. Par lien de causalité on entend qu’il existe un lien entre le fait dommageable et le dommage. Deux théories du lien de causalité sont adoptées dans les deux systèmes : la théorie de la causalité adéquate (qui suppose que le fait dommageable soit la cause sine qua non du dommage) ou la théorie de l’équivalence des conditions (qui suppose que toutes les circonstances qui ont pu mener au dommage doivent être considérées).


B-   Les spécificités de chaque système

En ce qui concerne la responsabilité contractuelle, celle-ci repose sur la force obligatoire des contrats, et donc suppose dans un premier temps l’existence d’un lien contractuel entre débiteur qui ne s’est pas exécuté et créancier. Néanmoins, avant de pouvoir engager la responsabilité contractuelle du débiteur, il incombe au créancier de le mettre en demeure de s’exécuter. Si cette dernière demeure infructueuse, il est possible de demander l’exécution forcée du contrat et le cas échéant une réparation par équivalent qui suppose des dommages-intérêts en guise de réparation. Pour la responsabilité délictuelle, le principe qui le régit est le principe de la réparation de tout dommage causé à autrui (article 1240 Code civil). Il n’est nullement question de liens contractuels. Ainsi, la mise en demeure n’est pas exigée afin de pouvoir retenir une responsabilité.

De plus, du point de vue de la faute, celle-ci réside pour la responsabilité contractuelle dans l’inexécution d’une obligation librement assumée. Néanmoins, il faudra distinguer obligations de moyens et obligations de résultat afin de déterminer cette dernière. Pour la responsabilité délictuelle, la condition de faute est de moins en moins exigée, puisque cette responsabilité tend à se fonder sur le risque et la garantie et cela pour assurer une meilleure réparation.

Pour le dommage, c’est uniquement le dommage prévisible qui est réparable lorsqu’il s’agit de responsabilité contractuelle, limite non reconnue en matière délictuelle.


II- Le régime : enjeu de la distinction

La responsabilité délictuelle est composée de trois différents régimes qui s’appliquent selon la situation délictuelle : on retrouve la responsabilité du fait d’autrui, du fait personnel et du fait des choses. Alors que pour la responsabilité contractuelle on ne retrouve pas cette diversité de régime.

D’un autre point de vue, la limitation de la réparation au dommage prévu applicable en matière contractuelle est un enjeu important, mais aussi, l’admission des clauses limitatives de responsabilité est un enjeu important. En principe pour la responsabilité délictuelle, cette limitation n’est pas admise (toutefois dans le projet de réforme, on tend vers l’admission de cette limitation).

De plus, en matière de responsabilité contractuelle, l’option de compétence est assez avantageuse.

Finalement, un dernier enjeu est à présenter : la prescription est décennale en matière de responsabilité délictuelle alors qu’en matière de responsabilité contractuelle il s’agit d’une prescription trentenaire. Cependant après la loi du 17 juin 2008, cette prescription est réduite à 5 ans pour toute action de responsabilité civile.



Sources : Dalloz