Il n'y a pas de responsabilité pour autrui sur ce fondement mais le patron est jugé responsable pour faute car dans une telle circonstance, l'homme raisonnable n'aurait pas adopté ce comportement et aurait appelé la police.
Attention, le texte n'utilise pas le terme d'employeur et d'employé. Donc, un bénévole peut être dans ce rapport de subordination. Pour Viney, il s'agit d'une activité pour le compte d'autrui et plus précisément à la condition qu'autrui donne des ordres à exécuter.
Par exemple, quelqu'un rénove sa maison et nous invite à l'aider. On se retrouve dans une pièce et on nous demande de construire un mur et on nous fournit le matériel loué. Au moment où on sort la truelle du seau, le manche nous reste dans la main, mais la petite fille du voisin la reçoit dans la figure.
Une truelle, et donc une chose a blessé la victime, qui est donc le gardien ? C'est en principe le magasin, le loueur de la truelle qui en est le gardien car le propriétaire est présumé gardien. Il s'agira pour lui de prouver le transfert de garde et donc le transfert des trois éléments : usage, maitrise et direction. Quid de la maitrise ? La truelle présentait-elle un défaut qu'il eut fallu mentionner ? Car le manche ne nous reste pas dans la main, normalement. S'il y a un problème dans l'outillage lui-même, le propriétaire est présumé gardien.
Si le loueur avait prouvé le transfert des trois pouvoirs : à qui les a-t-il transférés ? Au locataire mais en tant que gardien est-il responsable ? Y a-t-il eu transfert ? Il faut vérifier comment travaillait l'ami : travaillait-il sous la direction du locataire ou pas ? La discussion reste ouverte. Si la direction n'avait pas été transférée, on serait dans un rapport de préposition, le préposé ne pouvant pas être gardien. Dans ce cas-là, on applique l'alinéa 5. Attention, cet alinéa ne peut fonctionner que s'il y a une faute du préposé.
En principe, il n'y a pas de cumul d'autorité qui est donc en principe alternative. Il est par exception des cas particuliers. Le cas particulier pour Malaurie du berger qui garde les troupeaux de différents individus et devient préposé de plusieurs commettants. De même l'infirmière au moment de l'opération est sous les ordres du chirurgien et de l'anesthésiste.
Les autres conditions de mise en oeuvre de la responsabilité des commettants
La deuxième condition est qu'il faut que préposé soit la cause du dommage mais doit avoir lui-même commis une faute. Si la chose a été l'instrument du dommage, le commettant est resté naturellement gardien. En l'absence de faute, on ne peut pas poursuivre ni le commettant ni le salarié.
La troisième condition est qu'il faut que le préposé provoque le dommage sans abus de fonction. Sur cette notion, à l'origine il y avait une solution favorable à la victime. Si l'acte avait été facilité par la fonction, le commettant pouvait être poursuivi sur le fondement de l'alinéa 5 (le violeur-ouvreur au cinéma). Dans les années 1950, une divergence apparait entre la chambre criminelle et la deuxième chambre civile. Pour cette dernière, la responsabilité du commettant ne peut pas être engagée lorsque l'acte est étranger à la fonction. Les chambres réunies en 1960 essayent de mettre fin à cette opposition. Le problème est que dans cette affaire, les chambres mixtes ne sont pas claires, estimant que "ne peut suffire pour engager la responsabilité du commettant, le seul fait que l'auteur de l'accident ait accès, en raison de son emploi, le hangar où se trouvait..." La chambre criminelle ne s'inclinera pas tellement cet arrêt est mal rédigé.
L'Assemblée plénière semblait en 1977 pencher pour la chambre civile mais le problème est qu'il s'agissait d'un accident avec un véhicule.
Une nouvelle affaire vient devant l'Assemblée plénière en 1983 : "l'article 1384 alinéa 5 du Code civil ne s'applique pas au commettant en cas de dommage causé par le préposé, agissant sans autorisation à des fins étrangères à ses attributions, s'est placé hors des fonctions auxquelles il est employé." Il y a un problème d'interprétation car on peut y voir trois conditions cumulatives ou deux conditions cumulatives...
Nouvelle réunion de l'Assemblée plénière en 1985 et la Cour de cassation semble claire : les juges du fond ont souverainement retenu que la préposée avait agi de façon délibérée à l'encontre de l'objet de sa mission à des fins étrangères à sa mission. Il n'y a alors que deux conditions ici.
L'Assemblée plénière, le 19 mai 1988 déclare que « le commettant ne s'exonère de sa responsabilité que si son employé a agi hors des fonctions auxquelles il était employé, sans autorisation et à des fins étrangères à ses attributions. Il y a bien trois conditions cumulatives ».
En 2005, il s'agit d'une gardienne de résidence de personnes âgées, qui fait croire à une personne pensionnaire de l'établissement, particulièrement vulnérable, qu'elle va être expulsée pour incontinence nocturne mais la gardienne lui dit qu'elle va tout faire pour pouvoir la garder. De petits cadeaux à gros cadeaux, beaucoup d'argent furent dépensés par la dame. La question s'est posée pour les intérêts civils. Son commettant était-il responsable ? La Cour de cassation a refusé l'abus de fonction dans le cas d'espèce car si elle n'avait pas été gardienne, elle n'aurait pas pu soustraire de l'argent ainsi.
Le 21 mai 2015, il s'agit d'une société qui a vendu du matériel informatique à une autre société. Le vendeur confie le transport à une société et le jour J un chauffeur routier se présente dans les locaux du transporteur muni d'une lettre conforme à celle utilisée habituellement. Dans l'après-midi, un deuxième chauffeur vient pour le récupérer. Un salarié est mêlé à cela et au pénal il est condamné pour complicité de vol et le client assigne en réparation de son préjudice l'employeur de son salarié sur le fondement de l'article 1384 alinéa 5. La Cour d'appel avait estimé que le vol avait été rendu possible par l'emploi qu'il occupait mais avait annoncé que l'action du préposé n'était pas dans les limites de sa fonction. La Cour de cassation casse et annule l'arrêt d'appel pour motifs impropres.
S'il y avait abus de fonction, il reste le préposé devant la victime mais s'il n'y a pas abus de fonction, elle a le commettant et le préposé.
Concernant le préposé, il y a une hypothèse où il ne peut être poursuivi par la victime : l'immunité instaurée le 25 février 2000, COSTEDOAT, par l'Assemblée plénière. Mais elle n'est pas totale car la faute pénale (intentionnelle ou non) enlève l'immunité. Il suffit d'une faute civile ou une faute pénale pour lever l'immunité.
Il faut une faute du préposé dans un rapport de subordination pour que la responsabilité du commettant puisse être engagée : la victime peut avoir deux débiteurs civils (le commettant et le préposé, condamnés in solidum) ou un seul (le commettant quand le salarié est immunisé) ou seulement le salarié dans l'hypothèse de l'abus de fonction.
Par rapport à l'immunité, la jurisprudence a considéré que cela ne voulait pas dire que le préposé n'est pas responsable : il n'est pas poursuivi mais est responsable. Concernant les recours : le commettant indemnisant la victime peut-il se retourner contre son préposé ? Le commettant n'a pas de recours contre son préposé. Le 12 juillet 2007, la Cour de Cassation a admis que l'assureur du commettant peut s'attaquer à l'assureur du préposé.
Une précision relative à la loi du 5 juillet 1985. Lorsque le salarié conducteur d'un VTM, il est possible de poursuivre le conducteur ou le gardien. Le salarié ne peut pas être gardien, or la jurisprudence de la Chambre criminelle le 27 mai 2014, il fut admis que le conducteur salarié n'ayant pas dépassé les limites de sa fonction pouvait être immunisé.