Une possibilité au bénéfice des justiciables
Les justiciables français sont en mesure de saisir le juge dès lors que ces derniers considèrent que, dans le cadre de ses missions qui lui sont attribuées, l’administration a excédé les pouvoirs qui lui sont en effet attribués.
Cette possibilité laissée aux citoyens découle d’une décision rendue par le Conseil d’Etat, le 17 février 1950, décision au cours de laquelle la Haute juridiction de l’ordre administratif français considéra qu’il existe un principe général du droit dont la portée est remarquable (cf. CE, 17/02/1950, Dame Lamotte). De la sorte, les juges considérèrent que les justiciables sont autorisés à attaquer une décision émanant de l’administration, celle-ci pouvant en effet faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir. Cette possibilité de recours est plus précisément attribuée aux citoyens français, qu’ils soient par ailleurs simples justifiables ou bien fonctionnaires, et est aussi attribuée à des ressortissants étrangers qui font l’objet de mesures limitant leurs libertés.
Dans sa décision, le juge administratif s’intéressera à deux erreurs principales, possiblement commises par l’administration française, à savoir : une erreur de droit ou bien une erreur d’appréciation. Le juge, face à ces deux types d’erreur, considérera si oui ou non elle est fondée juridiquement.
- Conseil d'État, 3 juillet 1996, Koné ; 12 juillet 2013, Fédération nationale de la pêche en France ; 17 février 1950, Dame Lamotte ; 11 mai 2016, Football Club de Nantes - Le contrôle de l'administration
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Les conditions de recevabilité
Il existe des conditions qui doivent nécessairement être rencontrées, remplies pour que le juge soit valablement saisi et qu’il puisse prendre une décision. À défaut de la rencontre d’une seule de ces conditions, la requête formée sera nécessairement rejetée par le juge. Ce dernier vérifie préalablement ces conditions avant d’éventuellement s’intéresser à l’acte faisant l’objet du recours. Quelles sont ces conditions ?
D’abord le requérant doit avoir un intérêt à agir, c’est-à-dire que la mesure critiquée doit impacter directement l’individu. En outre celui-ci doit disposer de la capacité à agir : il doit personnellement être en mesure de faire valoir ses droits (les majeurs protégés et les mineurs ne peuvent le faire sans l’appui de leur représentant légal). Concernant la représentation, il se peut que des cas commandent au requérant d’être assisté d’un avocat. D’autres cas, à l’image des actions en responsabilité de l’administration, ne l’imposent pas.
Il nous faut aussi retenir que l’acte en cause doit faire grief. Cela signifie qu’il est susceptible de produire des effets juridiques et ainsi impacter la situation juridique d’un individu. Le recours formé par le requérant doit obligatoirement être rédigé en français. Aucune forme particulière n’est nécessaire, mais le document doit comprendre des informations précises sur l’auteur.
Le requérant doit aussi produire la décision attaquée en annexe de la requête, ou du moins en cas d’absence de notification de la décision, une copie de la décision émanant de l’administration qui refuse de la transmettre. S’agissant d’annexes, il convient de noter toute pièce produite en annexe doit être numérotée mais aussi listée après l’exposé des conclusions. Enfin, le requérant doit s’assurer de transmettre la requête et des copies de celles-ci. Le cas classique est le suivant : un exemplaire original et trois copies.
Qu’en est-il des délais de recours ?
Ce délai commence à courir lorsque l’acte en cause est officiellement porté à la connaissance des individus. Il pourra s’agir d’une publication ou bien d’un affichage, concernant les actes réglementaires qui ont, pour rappel, une portée générale et impersonnelle, ou bien d’une notification concernant les décisions individuelles. À l’égard de ces dernières décisions, le délai ne démarre que lorsque la notification concernée comprend l’existence ainsi que la durée du délai et les recours pouvant être actionnés. Notons également que lorsque l’administration saisie d’une demande garde le silence pendant une durée de deux mois, par principe, celui-ci a la valeur d’une décision de rejet. Cette dernière peut faire l’objet d’un recours devant le juge administratif dans un délai fixé à deux mois, si la demande fit l’objet d’un accusé de réception et que celui-ci comprend les voies mais aussi les délais de recours attribués aux justiciables. Cette requête devra, avant que le délai ne s’achève, être adressée au greffe du tribunal compétent.
À l’égard de la situation particulière d’une réglementation, les justiciables sont en mesure d’en contester la légalité même si le délai est échu. Cela s’effectue plus précisément par une demande faite à l’administration qui a pris la réglementation en cause aux fins qu’elle abroge le texte litigieux. Si l’autorité administrative ne donne pas droit à cette demande, ce refus revêt la nature d’une décision administrative pouvant être contestée devant la juridictions compétente. Dans un délai déterminé à deux mois, la réponse de l’administration à cette demande d’abrogation (que cette réponse soit d’ailleurs explicite ou implicite) pourra être contestée devant le tribunal compétent.
En bref, le recours pour excès de pouvoir…
En bref ce recours intéresse des actes pris par une autorité administrative, peu importe finalement leur nature (aussi bien réglementaires et donc pourvus d’un caractère général et impersonnel, que des actes individuels et donc des actes dits nominatifs).
Ce recours permet in fine de contrôler la légalité de tel ou tel acte et éventuellement d’en obtenir l’annulation. Notons également que ce type de recours peut être exercé à l’encontre de toutes les décisions administratives sauf si elles sont qualifiées de mesures d’ordre intérieur. Il n’est pas non plus nécessaire qu’un texte prévoit ce recours. À la vérité, si un texte prévoit que l’acte en cause ne peut faire l’objet d’un recours, le juge administratif a considéré que le recours pour excès de pouvoir constitue une exception et peut donc valablement être exercé. Ce recours peut être exercé devant le tribunal administratif contre les décisions prises localement tandis que le Conseil d’État est pour sa part compétent pour connaître de la légalité des règles prises au niveau national (de la légalité des décrets, par exemple).
Références
https://www.conseil-etat.fr/decisions-de-justice/jurisprudence/les-grandes-decisions-depuis-1873/conseil-d-etat-17-fevrier-1950-ministre-de-l-agriculture-c-dame-lamotte
https://www.lemag-juridique.com/categories/public-15548/articles/focus-sur-le-recours-pour-exces-de-pouvoir-rep-7053.htm
https://ing-avocat.legal/article/recours-en-exces-de-pouvoir-tout-ce-qu-il-faut-savoir