Analyse de la décision d'inconstitutionnalité
La loi de finances rectificative pour 2012 avait instauré une contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés de 3% sur les montants distribués par les sociétés et organismes français ou étrangers assujettis à cet impôt en France. Cette contribution était codifiée à l'article 235 ter ZCA du Code général des impôts.
Le 17 mai 2017, la Cour de justice de l'Union européenne a déclaré cette contribution incompatible avec la directive mère fille de l'Union européenne de 2011, cette dernière s'opposant à la perception d'un impôt à l'occasion d'une décision de distribution de dividendes par une société mère dont l'assiette est constituée des montants des dividendes distribués par elle-même et ceux de ses filiales non résidentes.
Le 10 juillet 2017, le Conseil de constitutionnalité a été saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité par le Conseil d'État (CE, 7 juillet 2017). Il était demandé au Conseil constitutionnel d'examiner si l'article 235 ter ZCA créait une différence de traitement entre les sociétés mères, selon que les bénéfices qu'elles redistribuent proviennent de filiales établies en France ou dans un État membre de l'Union européenne. Plus simplement, il était soutenu que la contribution 3% méconnaissait les principes d'égalité devant la loi prévue par l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 (incluse dans le bloc de constitutionnalité par la décision DC Liberté d'association de 1971) et d'égalité devant l'impôt et les charges publiques, prévus par l'article 13 de la DDHC.
Dans sa décision, le juge constitutionnel, au terme d'un contrôle de cohérence suivi d'un contrôle de proportionnalité, décide que cette contribution viole les principes d'égalité devant la loi et d'égalité devant les charges publiques. En effet, l'objectif poursuivi par le législateur ne justifiait pas en lui-même un motif d'intérêt général de nature à justifier la différence de traitement ainsi instituée entre sociétés mères. Ainsi, le premier alinéa de l'article 235 ter ZCA du Code général des impôts a été déclaré contraire à la Constitution. Il est important de souligner que le Conseil constitutionnel a donné un effet direct et immédiat à cette décision, permettant à tout contribuable de s'en prévaloir dans le cadre d'une instance en cours ou à venir.
Portée de la décision d'inconstitutionnalité
Cette décision n'est pas surprenante et avait d'ailleurs été anticipée par le gouvernement qui avait prévu de supprimer cette contribution dans le projet de loi de finances pour 2018. Cependant, les conséquences de cette décision sont graves d'un point de vue budgétaire ! La décision étant d'effet immédiat, tout contribuable ayant acquitté cette contribution peut faire une demande de restitution dans le délai de réclamation. La perte pour l'Etat suite à cette décision a été estimée à 10 milliards d'euros. Ce dernier a prévu de combler ce manque budgétaire en instaurant dans l'urgence une nouvelle contribution dans le projet de loi de finances rectificative pour 2017. Cette contribution concernerait les entreprises réalisant un chiffre d'affaires supérieur ou égal à 1 milliard d'euros.
Sources : Conseil constitutionnel, Légifrance, Assemblée nationale
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