La force obligatoire du contrat

Ce principe est directement régi par les dispositions de l'actuel article 1103 du Code civil qui dispose que "[l]es contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits." Ces dispositions se lisent et se comprennent à l'aune des dispositions des articles 1102 et 1104 qui traite respectivement du principe de liberté contractuelle et de la bonne foi, force obligatoire du contrat et liberté contractuelle constituant un corollaire. En effet, les parties contractantes sont liées l'une à l'autre par un contrat parce que celles-ci y ont consenti librement. Ce principe de force obligatoire du contrat permet ensuite de s'intéresser aux effets résultant du contrat et donc de la loi des parties. Il se comprend également à l'aune des dispositions des articles 1193, 1194 et 1195 du Code civil, reprenant pour partie les anciennes dispositions de l'article 1134, al. 2, et 1135 dudit code.

Force obligatoire, pacta sunt servanda

Une notion est ici importante à relever : celle de l'effet relatif du contrat. En effet, en vertu de la force obligatoire du contrat, seules les parties sont visées par ces règles et non les tiers, le contrat ne créant des obligations qu'à leur charge. Toutefois, il se peut que la situation juridique qui découle du contrat soit opposée aux tiers : c'est l'opposabilité de la situation contractuelle aux tiers.

Comment se traduit cette force obligatoire du contrat concernant les parties contractantes ?

Ici intervient la notion d'exécution forcée du contrat. Celle-ci permet en fait au créancier contractuel d'avoir recours à un certain nombre de moyens qui contraindront l'autre partie, le débiteur, à exécuter ses obligations issues du contrat les liant. Les articles 1221 et 1222 traitent précisément des sanctions inhérentes à l'inexécution du contrat.

En outre, le contrat est dit irrévocable : il ne peut subir de révocation unilatérale de la part d'un contractant. Il sera nécessaire, pour sa révocation, que les volontés des parties cocontractantes soient rencontrées afin qu'elle soit valable. L'article 1193 du Code civil, reprenant les anciennes dispositions de l'article 1134, al. 2, dudit code prévoit ce principe du mutuus dissensus imposant le consentement mutuel des cocontractants dans la révocation des dispositions contractuelles. Il existe toutefois certaines dérogations de diverses natures concernant cette révocation. Elles peuvent résulter de la loi concernant les contrats à durée déterminée et les contrats à durée déterminée particuliers. Aussi, il se peut que les parties prévoient directement dans le contrat qui les lie des clauses afin de permettre cette révocation unilatérale du contrat.

De plus, le contrat est dit intangible : il ne peut donc être valablement modifié par une des parties contractantes sans le consentement exprès de l'autre partie. En effet, les dispositions de l'article 1193 du Code civil sont claires à ce sujet puisque la modification du contrat commande aux parties de produire un nouvel accord de volontés. Si elles y parviennent, alors ce nouvel accord modifiant le contrat s'impose obligatoirement à elles.

Quid enfin de l'exigence de bonne foi ? La bonne foi, au sens de l'article 1104 du Code civil, impose aux parties contractuelles de respecter ce principe à l'occasion de l'ensemble de la vie juridique du contrat, de sa formation à sa disparition de l'ordonnancement juridique. Elle se manifestera d'abord par une obligation de loyauté lors de l'exécution dudit contrat. Elle se manifestera ensuite par un devoir de coopération, résultant pour sa part de la jurisprudence (cf. par exemple, Cass. com., 03/11/1992, Huard, n° 90-18.547). La mauvaise foi, dans le contrat, est par principe sanctionnée par l'attribution de dommages et intérêts au bénéfice de la partie contractante victime. Finalement, il est intéressant de noter que le contrat ne peut être réécrit par le juge (cf. Cass. com., 10/07/2007, Société les Maréchaux, n° 06-14.768).

Le juge et la force obligatoire du contrat

Si la force obligatoire s'impose aux parties contractantes, elle s'impose également à l'égard du juge. En effet en vertu de ce principe, et lorsqu'il doit connaître de certaines clauses contractuelles, celui-ci n'est pas autorisé à les interpréter ; s'il s'y prêtait, alors il les dénaturerait (cf. Cass. Ch. civ., 15/04/1872).

Néanmoins d'après les articles 1188 et suivants du Code civil, tels qu'ils résultent de l'ordonnance de 2016, il se peut que le juge soit autorisé à ajouter certaines dispositions au contrat même si celles-ci n'ont pourtant pas été prévues par les contractants. Il faut néanmoins que ces obligations non expressément prévues par les parties soient imposées par d'autres sources, à l'image de la loi ou encore des usages, dans le but de rééquilibrer les relations qui lient les parties. L'obligation de sécurité ainsi que l'obligation d'information et de conseil sont les deux obligations qui peuvent être ajoutées par le juge lorsqu'il procède à son rééquilibre du contrat.

Enfin, l'article 1195 du Code civil s'intéresse à la révision pour imprévision, et donc à l'apparition de circonstances économiques qui sont à la fois imprévisibles au moment de la conclusion du contrat, mais qui interviennent alors que celui-ci est exécuté. En vérité, ces circonstances impactent négativement son exécution, mais ne la rendent pas impossible. La jurisprudence a interdit au juge de réviser les contrats pour imprévision (cf. Cass. Ch. civ., 06/03/1876, Canal de Craponne). Or à tout principe ses exceptions : si la loi en prévoit autrement ; s'il existe une clause contractuelle prévoyant la possibilité d'apparition de telles circonstances alors que le contrat est exécuté ; si un déséquilibre intervient lors de l'exécution du contrat et qu'une partie refuse de renégocier les clauses contractuelles concernées, alors il pourra s'agir d'un manquement à l'obligation de bonne foi permettant à l'autre partie d'obtenir le versement de dommages et intérêts en actionnant la responsabilité contractuelle de son débiteur (cf. notamment, Cass. civ., 1ère, 16/03/2004, n° 01-15.804).