Propos introductifs

Mais qu'est-ce au juste qu'un service public ?

Il est revenu à la jurisprudence du Conseil d'État de définir la notion de service public, notamment par deux arrêts de 1963, Narcy et de 2007, A.P.R.E.I.

Ainsi, le service public est défini par trois critères selon la jurisprudence Narcy : une mission d'intérêt général, la détention de prérogatives de puissance publique ainsi qu'une activité qui est exercée par la personne publique ou bien une personne privée sous le contrôle étroit de la personne publique.

En outre, la seconde jurisprudence, A.P.R.E.I complète la jurisprudence Narcy et s'intéresse aux conditions de création, d'organisation et de fonctionnement du service, ainsi que les obligations qui lui sont imposées et le contrôle de l'atteinte desdites obligations. Cette jurisprudence concerne une personne privée qui peut être regardée comme assurant en fait une mission de service public, même pour le cas où elle est dépourvue de prérogatives de puissance publique et pour le cas où ces différents critères sont effectivement rencontrés.


Les faits de l'espèce

Les faits se sont déroulés en Côte d'Ivoire. Parfois, la circulation est difficile du fait de la présence de lagunes et donc l'administration coloniale a eu l'idée de créer des bacs transportant non seulement des personnes, mais aussi des véhicules.

Or un bac se renverse, un véhicule qui appartient à la Société de l'Ouest africain est endommagé et celle-ci se dirige vers le Tribunal des conflits.


Les dispositions de la décision

Il est reconnu par le Tribunal des conflits que les critères organiques et matériels sont effectivement rencontrés en ce qu'il y a une mission d'intérêt général ainsi que la présence de l'administration (coloniale) qui exerce l'exploitation du bac par ses propres moyens.

Néanmoins, le Tribunal des conflits va retenir que le service est en réalité exploité comme l'aurait fait une personne de droit privé et plus exactement dans des conditions de droit privé.

C'est ce caractère tout à fait particulier qui entraîne la compétence des juridictions judiciaires.

C'est ainsi que la distinction entre les services publics administratifs (SPA) et les services publics industriels et commerciaux (SPIC) a pris de la force. Ces seconds services publics sont en réalité composés d'une part de droit privé et d'une part de droit public.

L'identification d'un service public à caractère industriel et commercial s'effectue notamment par un faisceau d'indices qui réside dans le financement, l'objet, mais aussi le fonctionnement dudit service. Ainsi, l'objet du service réside dans le critère finaliste ; le financement réside pour sa part dans l'origine des ressources et plus exactement la question de savoir comment est effectivement financé le service ? Ainsi, le système de prix ou de redevance fera pencher la balance en faveur d'un service public industriel et commercial tandis qu'un financement par l'impôt fera pencher la balance en faveur d'un service public administratif. Finalement, au regard du fonctionnement du service, le juge se fera sa propre opinion au regard notamment des règles de la comptabilité publique ou des pratiques des entreprises privées qui fera pencher la balance en faveur de l'un ou l'autre des services publics.

Finalement, si une personne morale de droit public est présumée exercer un service public, il convient de noter que cette présomption est simple et qu'elle peut par conséquent être renversée.


Sources : Conseil d'Etat, Legifrance


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