Cette norme juridique peut d’abord modifier l’état du droit. Elle peut le modifier en plus, comme c’est le cas d’une norme qui crée des droits ou qui impose des obligations à ses destinataires. Elle peut le modifier en moins, comme c’est le cas d’une norme qui abroge une norme existante. Cette norme peut ensuite maintenir l’état du droit. La jurisprudence assimile en effet la décision refusant de prendre une norme à la décision de prendre cette norme. C’est ainsi que le refus d’exercer le pouvoir réglementaire est un véritable acte administratif unilatéral assimilé à un règlement.
Ensuite, c’est un acte administratif. Ces actes sont généralement édictés au nom de personnes morales de droit public, par des autorités publiques. Ces autorités publiques relèvent le plus souvent du pouvoir exécutif. Mais il peut aussi s’agir d’organes parlementaires. Les actes administratifs peuvent d’abord être pris pour l’accomplissement d’une mission de police administrative. Seules les autorités publiques peuvent édicter des mesures juridiques de police. Il peut s’agir d’actes réglementaires. C’est le cas d’une réglementation prise par un maire et relative au stationnement dans sa commune. Il peut aussi s’agir de décisions individuelles. C’est le cas d’une autorisation de détention d’arme ou d’un permis de conduire. Les actes administratifs des autorités publiques peuvent également être pris pour la gestion d’un service public. Ils peuvent l’être pour la gestion d’un SPA. Il peut s’agir d’actes réglementaires, comme c’est le cas de la décision d’une commune de créer une école de musique.
I. Les effets dans le temps
De manière générale, l’acte administratif nouveau, comme la loi nouvelle est d’application immédiate y compris aux situations en cours. La réserve traditionnelle concerne les situations juridiquement constituées, qui restent régies par les dispositions en vigueur au moment où elles ont été constituées. Il s’agit ici d’opérer une conciliation entre la volonté de donner une pleine efficacité à l’action administrative et le souci d’assurer la stabilité des situations juridiques. Cela a deux conséquences : l’interdiction d’édicter des mesures rétroactives, et l’obligation d’édicter des mesures transitoires.
L’acte administratif n’a normalement d’effets que pour l’avenir : il ne peut pas rétroagir. Ce principe de non-rétroactivité de l’acte administratif a d’abord été consacré comme principe général du droit. C’est en effet sur ce fondement que le Conseil d’État annule, dans son arrêt d’assemblée du 25 juin 1948, Société du journal « L’Aurore » « L’Aurore », un arrêté du 30 décembre 1947 majorant le prix de vente de l’électricité pour les consommations figurant sur les relevés postérieurs au 1er janvier, car ces derniers devaient prendre en compte des consommations antérieures au 1er janvier. Ce principe ne bénéficie donc qu’aux situations juridiques définitivement constituées. C’est ainsi qu’une nouvelle réglementation ne peut pas s’imposer à un permis de construire déjà délivré.
Le principe de sécurité juridique impose aussi à l’Administration d’édicter « les mesures transitoires qu’implique, s’il y a lieu, une réglementation nouvelle » (CE, Ass 24 mars 2006). Il en va ainsi lorsque l’application immédiate d’une règlementation entraîne une atteinte excessive aux intérêts publics ou privés en cause (CE, 13 décembre 2006). Sur ce fondement, le Conseil d’État a par exemple annulé des arrêtés ministériels modifiant substantiellement la réglementation de certains concours du ministère des Affaires étrangères au motif qu’ils ne comportaient aucune mesure transitoire afin de permettre aux candidats de se préparer correctement aux nouvelles épreuves prévues, et qu’ils portaient dès lors atteinte au principe de sécurité juridique. Le Conseil d’État considère également que « ces mesures transitoires peuvent résider dans le report de l’entrée en vigueur de cette réglementation nouvelle » (CE, 8 juillet 2016).
II. La disparition de l’acte
L’acte administratif unilatéral peut disparaître de différentes manières. Selon la manière utilisée, la disparition peut être rétroactive : l’acte est considéré comme n’ayant jamais existé ou non rétroactive : l’acte disparaît seulement pour l’avenir. La disparition de l’acte peut d’abord être préalablement prévue par un texte. C’est le cas lorsqu’un texte prévoit la caducité ou la péremption d’un acte administratif unilatéral. L’acte disparaît alors à une date déterminée ou en conséquence de certains événements. Une ordonnance de l’article 38 de la Constitution est ainsi caduque lorsqu’un projet de loi de ratification n’a pas été déposé dans le délai prescrit par la loi d’habilitation. L’ordonnance disparaît ainsi à la date d’expiration du délai dans lequel le projet de loi de ratification aurait dû être déposé (CE, 2 avril 2003). De même, un permis de construire est périmé lorsque les travaux n’ont pas été entrepris dans un délai de trois ans à compter de la notification de l’autorisation. La caducité d’un acte peut aussi résulter de la disparition, soit des situations qu’il entendait régir (CE, 12 mars 2014), soit des dispositions qu’il entendait interpréter (CE, 12 novembre 2014), soit des dispositions auxquelles il se rapportait (CE, 23 décembre 2016). La disparition de l’acte peut notamment être prévue par son auteur qui peut fixer un terme au-delà duquel l’acte cesse de s’appliquer. Il en va ainsi des arrêtés municipaux interdisant la circulation dans une rue durant les cérémonies du 14 juillet, ou des autorisations administratives accordées pour une durée déterminée. Mais la disparition de l’acte peut aussi être décidée postérieurement à son édiction. Elle peut l’être par le juge lorsqu’il prononce son annulation. Mais elle peut aussi l’être par l’Administration qui, dans le respect des règles, peut prononcer l’abrogation ou le retrait de l’acte administratif.
Sources :
- Droit administratif, Tome I, Les actions administratives - Pierre SERRAND
- Les grands arrêts du droit administratif - Patrick Goffaux, Emmanuel Slautsky, Jérôme Sohier