- Les faits de l'espèce
- Explications de l'arrêt
- Les considérations du juge du droit bien différentes de celles des juges du fond
- En bref, que retenir de cette décision ?
Les faits de l'espèce
Une dame a vendu pendant des enchères publiques des photographies de Baldus pour un prix de mille francs l'unité.
Quelques années plus tard, la venderesse qui rencontre le même acquéreur lui vend de nouvelles photographies du même artiste pour un montant lui aussi de mille francs, prix étant par ailleurs unilatéralement fixés par elle.
Or la venderesse apprendra que Baldus est en réalité un photographe de renommée et dépose une plainte contre l'acheteur pour escroquerie, mais la demande ne prospéra pas. C'est donc tout naturellement qu'elle s'est reportée sur le terrain du droit civil.
La venderesse a donc assigné son acheteur en invoquant à cet effet le dol dont elle s'est estimé victime.
Par une décision du 5 décembre 1997, les juges du fond ont donné raison à la venderesse et demanderesse et condamné l'acheteur à verser une somme de 1 915 000 de francs.
Explications de l'arrêt
Pour apporter la preuve du bien-fondé de leur décision, les juges du fond ont estimé que l'acheteur connaissait le « juste » prix des photographies et que lors des deuxième et troisième ventes, ce dernier a contracté à un prix dérisoire. Il a en effet contracté sans rapport avec la valeur réelle desdites photographies.
Les juges du fond considèrent que l'acheteur a manqué à son obligation de contracter de bonne foi. Par sa réticence, l'acheteur a incité la venderesse à conclure une vente (contrat de vente) qui, si elle avait eu connaissance des informations, n'aurait pas eu lieu ou aurait eu lieu dans des conditions différentes.
Les considérations du juge du droit bien différentes de celles des juges du fond
La Première chambre civile de la Cour de cassation casse l'arrêt d'appel sous le visa de l'article 1116 (ancien) du Code civil qui intéressait la notion de dol avant la réforme du droit des contrats.
La Cour de cassation a considéré qu'il n'existait aucune obligation d'information qui pesait sur l'acheteur et donc qu'il n'y avait pas lieu de retenir le dol. Donc, l'acheteur n'est pas tenu d'une quelconque obligation d'information sur la valeur de la chose qu'il se procure en effet.
Cette décision doit être lue par rapport aux énonciations d'un autre arrêt de la chambre commerciale, cette fois, en date du 27 février 1996 qui considérait pour sa part que l'acheteur (dirigeant social) avait manqué au devoir de loyauté qui s'imposait à lui « à l'égard de tout associé ».
Dans le cas de l'espèce, la venderesse a unilatéralement fixé le prix des clichés mis en vente, dont le montant était d'ailleurs identique à celui pratiqué quelques années plus tôt lors des premières ventes.
En bref, que retenir de cette décision ?
L'acquéreur n'est pas tenu d'une obligation d'information. Par conséquent, celui-ci n'est tenu d'aucune obligation au regard de la valeur de la chose qu'il se procure dans le cadre du contrat de vente conclu. La demande en nullité de la vente pour réticence dolosive ne peut donc être retenue.
Sources : Actu Dalloz, Légifrance
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