Énoncé
En 2019, Olivier, animé par des doutes, décide de fouiller dans le téléphone portable de son épouse Nathalie. Quelle ne fut pas sa surprise de constater que celle-ci entretenait une relation virtuelle depuis plusieurs mois avec une femme ! Olivier ne veut cependant pas mettre fin à une relation de plus de 10 ans. Il prévient son épouse qu'il souhaite faire une « pause » dans leur relation et part vivre chez sa mère. Nathalie a mis fin à sa relation avec Clara. Néanmoins, elle voit bien que son mari n'entend pas lui pardonner de sitôt. Lassée de cette situation qui dure depuis plus de deux ans, elle souhaite divorcer. Cependant, elle sait que son mari n'acceptera aucun accord sur le principe de la dissolution, il demandera même surement à ce que le divorce soit prononcé à ses torts exclusifs. Nathalie pourra-t-elle obtenir la dissolution du mariage ? Une demande d'Olivier fondée sur la faute de Nathalie pourra-t-elle être accueillie ? Précision : la demande de divorce a lieu après le 1er janvier 2021, la réforme du divorce issue de la loi n 2019-222 du 23 mars 2019 s'applique.
Résolution
I) Les causes de dissolution du mariage pouvant être invoquées par Nathalie
Le divorce par consentement mutuel (art. 229-1 CC) et pour acceptation du principe de la rupture (art. 233 CC) supposent un accord de la part des deux époux.
Olivier n'entend pas donner son accord sur le principe de la dissolution.
Le divorce pour faute suppose des « faits constitutifs d'une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage » (art. 242 CC).
Olivier n'a pas commis de faute.
Le divorce pour altération définitive du lien conjugal. Art. 238 : les époux doivent vivre séparés depuis au moins 1 an lors de la demande en divorce.
Les époux vivent séparés depuis plus de 2 ans donc Nathalie pourrait demander le divorce sur ce fondement.
Mais Olivier risque de demander concurremment la prononciation du divorce aux torts exclusifs de Nathalie.
II) L'articulation des demandes en divorce
Art 246 : « Si une demande pour altération définitive du lien conjugal et une demande pour faute sont concurremment présentées, le juge examine en premier lieu la demande pour faute. »
Ce n'est que si la demande en divorce pour faute exercée par Olivier est rejetée que la demande pour altération définitive du lien conjugal sera examinée par le juge.
III) La recevabilité de la demande de divorce pour faute
Pour que la demande soit recevable, Olivier doit démontrer que « des faits constitutifs d'une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage sont imputables à son conjoint et rendent intolérable le maintien de la vie commune. »
L'homosexualité n'est pas fautive, mais le fait d'entretenir une relation homosexuelle l'est (Dijon, 6 juill. 2012)
L'entretien de relation avec un tiers peut être considéré comme injurieux pour le conjoint même si l'adultère n'est pas véritablement établi (Civ 1re, 18 mai 2005), et serait-ce par l'utilisation de réseaux sociaux (Versailles, 13 nov. 2014).
La faute est un fait juridique, la preuve est donc libre (art 259 CC). Cependant, le respect de la vie privée doit être respecté (art. 9 CC) et « un époux ne peut verser aux débats un élément de preuve qu'il aurait obtenu par violence ou fraude » (art. 259-1 CC).
La preuve obtenue grâce aux minimessages est recevable (Civ 1re, 17 juin 2009).
Il est donc très probable que la demande pour faute formée par Olivier aboutisse.