I. Une définition des prérogatives de la puissance publique
Le terme de prérogative est également employé au sens figuré pour désigner des capacités particulières ou des aptitudes, lorsque nous parlons de la raison et de la parole comme des prérogatives de l’Homme notamment.
La puissance publique quant à elle peut se définir selon Wikipédia comme « La puissance publique est un terme générique utilisé pour désigner les moyens qu'un État se donne pour assurer la sécurité de son territoire, la sécurité de ses citoyens, ainsi que l'application des lois et règlements. »
D’un point de vue juridique, les prérogatives publiques peuvent être définies comme étant des moyens juridiquement reconnus et dont les administrations, l’État sont dotés pour remplir complètement des missions d’intérêt général tout en imposant ces décisions à des personnes privées.
II. Comprendre les prérogatives de la puissance publique à travers les pouvoirs propres du Président de la République française, les prérogatives d’action, les prérogatives de protection et le service public
Comme précisé ci-dessus, l’administration publique dispose de pouvoirs exceptionnels de commandement, ils sont transmis par le pouvoir exécutif et permettent à l’administration d’imposer sa seule volonté dans de nombreuses situations. Les décisions prises par l’administration publique doivent en revanche être d’utilité publique.
L’administration publique est dotée d’une part de prérogatives d’action et d’autre part de prérogatives de protection que nous étudierons donc dans cette seconde partie.
A. Les prérogatives d’action
Dans le cadre de prérogatives d’action, les administrations publiques peuvent agir sans demander au préalable à un juge. On parle dans ce cas de privilège de l’exécution d’office ou de privilège de l’exécution forcée qui permettent dans ce cadre à l’administration publique d’exercer ses prérogatives d’action.
Nous pouvons trouver au sein de ces prérogatives d’action :
- Le pouvoir de direction et de contrôle
En effet, en droit administratif, on reconnaît à l’administration publique un droit de contrôle et de direction dans l’exécution du contrat. Elle a le pouvoir de vérifier en cours d’exécution que le cocontractant exécute bien les dispositions de ce contrat. Entre alors en jeu une faculté de surveillance et de direction pouvant se traduire par des actes juridiques ou matériels.
- Quelques limites
Même si la jurisprudence considère ce pouvoir comme un pouvoir normal, il est nécessaire que l’exercice de cette faculté n’aboutisse pas à une dénaturation du contrat ou à la substitution de l’administration au cocontractant.
- Le pouvoir de sanction
Les sanctions de droit privé, qui impliquent le recours au juge, se révèlent assez inadaptées aux exigences de la vie administrative publique. Nous avons ainsi dégagé un véritable pouvoir administratif de sanction ainsi que des sanctions très spécifiques. Ce pouvoir de sanction n’a pas besoin d’être prévu formellement et l’administration publique peut recourir à une sanction qui n’a pas été prévue.
Le juge administratif le limite en revanche dans sa mise en oeuvre. Le principe même des droits de la défense doit être respecté au même titre que les actes unilatéraux du Conseil d’État du 30 octobre 1959. Le juge administratif contrôle également la légalité matérielle de la sanction, il doit y avoir également un lien entre la faute et la gravité de la sanction. En principe, le juge n’annule pas la sanction.
- Le pouvoir de modification
L’administration détient le pouvoir de modifier unilatéralement les conditions d’exécution des contrats.
- Le pouvoir de résiliation unilatérale
Le pouvoir de résiliation unilatérale constitue dans l’intérêt du service public.
B. Le service public
Au sens matériel, le service public est une activité destinée à satisfaire un besoin d’intérêt général et qui doit et ne peut être assurée ainsi que contrôlée que par l’administration.
Au sens formel du terme, le service public constitue l’ensemble des moyens matériels et humains mis en oeuvre par l’État ou autre collectivité publique dans le but d’exécuter ses tâches.
Actuellement, l’État intervient dans des services non marchands et non payants que nous aborderons à travers les pouvoirs propres.
Le transport, l’énergie, l’eau potable, les services postaux et la télécommunication sont des secteurs marchands régis par une activité commerciale, mais pouvant être sous le contrôle de l’État ou d’entreprises privées.
C. Les prérogatives de protection
Ainsi le service public intervient à travers les prérogatives de protection dans les domaines suivants :
- L’enseignement public.
- La santé.
- La sécurité sociale.
- La culture.
- L’aide sociale.
D. Les pouvoirs propres
En France, il existe notamment les prérogatives du président de la République française. On parle aussi de « pouvoirs propres ». À travers le titre II et les articles 5 à 19 de la Constitution de 1958, nous pouvons y voir apparaître cinq pouvoirs, cinq prérogatives de la puissance publique :
- La nomination d’un Premier ministre.
- La présidence du Conseil des ministres.
- La promulgation de lois.
- La représentation de la France à l’étranger.
- Le titre de chef des armées.
III. Conclusion et nuances
Henri Laborit écrivait dans son ouvrage Éloge de la fuite que "Ce n'est pas l'Utopie qui est dangereuse, car elle est indispensable à l'évolution. C'est le dogmatisme, que certains utilisent pour maintenir leur pouvoir, leurs prérogatives et leur dominance."
En effet, nous pouvons penser que ces prérogatives donnent un pouvoir immense notamment au Président de la République comme nous avons pu le voir dans cette seconde partie à travers l’exemple. Cependant, il est nécessaire de se rappeler que la justice française et le pouvoir sont suffisamment encadrés. Le pouvoir du Président est assidûment réglementé et peut facilement être restreint par de grandes institutions et textes de loi avec qui il partage son pouvoir exécutif, législatif et judiciaire.
De plus, selon Maurice Hauriou, cette notion de puissance publique est fondamentale au coeur du droit administratif à l’instar même des services publics. Selon lui, le rôle de l’administration publique ne peut être réduit à l’accomplissement des services publics et l’abus administratif de la puissance publique ne serait, selon ses propres termes, « l’hérésie du socialisme judiciaire ». Cette idée même n’est pas concevable dans un État de droit.
Ces deux notions ne sont donc pas rivales, mais complémentaires : la puissance publique aidant à accomplir les services publics et le service public ayant pour objectif l’autolimitation de la puissance publique elle-même.