Le jugement de six ex-collégiens impliqués dans l’assassinat de Samuel Paty
Les six ex-collégiens dernièrement jugés par le Tribunal pour enfants de Paris encouraient une peine de deux ans et demi de prison. Le 8 décembre 2023, après quelques semaines d’audience, l’un d’entre eux fut condamné à six mois de prison ferme (aménageable cependant sous bracelet électronique), les cinq autres ayant pour leur part été condamnés à des peines comprises entre quatorze et vingt mois de prison avec sursis probatoire, ce sursis ayant été assorti de diverses obligations. Des mesures de suivi judiciaire ont par ailleurs été prononcées à leur encontre. Ils sont considérés comme ayant été impliqués dans l’assassinat de Samuel Paty, à l’automne 2020, par un islamiste alors âgé de 18 ans. Il fut en effet question de les condamner eu égard à « la gravité des faits, de [leur] personnalité [ainsi que de leur] évolution. »
Il est notamment reproché au seul ex-collégien condamné à de la prison ferme d’avoir communiqué au meurtrier de Samuel Paty « sa description physique et son trajet » contre une somme d’argent. La présidente a par ailleurs énoncé à l’encontre de chacun d’entre eux que les faits qui leur étaient reprochés ont tous permis d’établir la commission de l’infraction pour laquelle ils furent condamnés. S’il leur est possible d’interjeter appel de la décision ainsi rendue, il n’en demeure pas moins que le jugement est exécutoire depuis son prononcé.
Ce jugement constitue finalement l’occasion pour nous de revenir sur des éléments clé en matière de droit pénal des mineurs.
Le droit pénal des mineurs en France
Le droit pénal des mineurs prévoit un principe fondamental à l’égard des mineurs âgé de moins de treize ans : ces derniers bénéficient en effet du principe de l’irresponsabilité pénale absolue. Toutefois les mineurs qui sont âgés de treize à dix-huit ans sont présumés irresponsables même s’il est possible qu’ils soient l’objet d’une condamnation pénale pour le cas où non seulement les circonstances mais aussi la personnalité du mineur justifient le prononcé de cette même condamnation. Il conviendra de noter que l’ensemble des mesures qui sont applicables aux mineurs délinquants sont retrouvées au sein des dispositions de l’ordonnance n°45-174 du 02 février 1945 relative à l’enfance délinquante.
Ces premières constatations étant effectuées, se pose la question de l’âge à partir duquel un individu devient pénalement responsable. Cette responsabilité pénale prend effet le même jour que la majorité pénale, à savoir : dix-huit ans. Il est immédiatement utile de relever que cet âge peut tout à fait être réduit à treize ans dans des cas cependant bien déterminés.
Quid de l’irresponsabilité absolue dont nous avons parlé ci-dessus et qui intéresse les mineurs de moins de treize ans ? Le Code pénal prévoit que des peines de nature pénale peuvent être prononcées contre des mineurs qui sont âgés de plus de treize ans. En effet, pour les plus jeunes, des sanctions pénales peuvent être prononcés mais il s’agira les concernant de mesures de diverses natures, tenant plus spécifiquement à des « mesures de protection, d’assistance, de surveillance [ou encore] d’éducation. »
Lorsque les mineurs atteignent l’âge de treize ans, ceux-ci bénéficient d’une irresponsabilité dite relative. Cependant et par exception, l’ordonnance de 1945 ci-dessus mentionnée prévoit en son article 2 qu’il sera possible aussi bien au tribunal pour enfants qu’à la cour d’assises des mineurs de prononcer à leur encontre « une condamnation pénale ». Pour que celle-ci soit valablement prise, il conviendra néanmoins de préciser ici que non seulement « les circonstances » mais aussi « la personnalité » du mineur doivent de concours exiger cette condamnation.
En fin de compte, les mineurs délinquants peuvent se voir appliquer différentes mesures. Commençons par les mesures de nature éducative au sens des dispositions contenues à l’article 8 de l’ordonnance de 1945. De la sorte, et sans entrer dans le détail, le tribunal pour enfants peut décider par exemple une mise sous protection judiciaire (celle-ci ne pouvant valablement pas durer plus de cinq ans), une liberté surveillée ou bien encore placer le mineur délinquant au sein d’une institution ou d’un établissement « d’éducation ou de formation professionnelle ». Autrement dit, il existe au sein de cet article 8 tout un panel de mesures pouvant être prises par le juge compétent en fonction du dossier qu’il est amené à connaitre.
Qu’en est-il de la médiation-réparation ? Evoquer cette mesure revient en vérité à expliquer que le délinquant prend part de manière active à la réparation du dommage concerné et que celui-ci a causé. Soit le délinquant prend part dans une activité dans l’intérêt même de la collectivité, soit il prend part à une activité d’aide ou bien une activité de réparation au bénéficie de la victime de l’infraction commise. Notons cependant que la mesure dont il est question ici ne saurait être prononcé par le juge qu’après avoir obtenu l’accord explicite de la victime. Sous ce rapport, il conviendra aussi de relever que les mineurs délinquants âgés de seize à dix-huit pourront être soumis à l’obligation d’accomplir un travail d’intérêt général, celui-ci devant présenter « un caractère formateur » ou doit être « de nature à favoriser [leur] insertion sociale ».
Revenons en dernier lieu sur le prononcé d’une peine d’emprisonnement. Le droit pénal des mineurs français prévoit expressément que toute peine privative de liberté peut être prononcée contre un mineur délinquant âgé de plus de treize ans mais que celle-ci ne saurait être supérieure à la moitié de la peine qu’encoure effectivement un majeur pour la même infraction. Il sera toutefois possible pour le juge de prononcer la même peine que celle prononcée à l’encontre d’un majeur, pour un délinquant âgé entre seize et dix-huit et ce, en cas d’une gravité présentant un caractère extrême.