Cependant c'est à l'occasion de ce discours que le Général va jeter les bases de ce qu'il souhaite voir appliquer en France, à l'occasion de la future IVe République, et l'on retrouvera par ailleurs des éléments lors de la Ve République.

Quel est le contenu, d'un point de vue constitutionnel, de ce discours de Bayeux ?

Le général va appuyer deux points à l'occasion de ce discours, la légitimité de l'Etat (I), mais aussi ce qu'il attend des futures institutions (II).

I. La légitimité : premier point mis en avant par le Général de Gaulle

On sait que le 17 juin 1940, le gouvernement Pétain demande à Hitler les conditions qui seront celles de l'armistice. Cette date constitue pour le Général la fin de la légitimité du gouvernement. Toutefois, le 22 juin 1940, celui-ci va déclarer haut et fort que bien que la France ait perdu une bataille, elle n'a pas encore perdue la guerre.

D'ailleurs, le Général poursuivra en expliquant qu'outre l'honneur de la France, c'était également son intérêt que celui de continuer le combat pour la liberté. Ici, le Général a insisté sur le fait que l'intérêt de la nation constitue la base de la légitimité de l'Etat et du gouvernement français. Un second critère de légitimité de l'Etat mis en avant par le Général de Gaulle réside en fait dans "l'assentiment de l'immense masse française". Cela sera notamment illustré lors de l'élection présidentielle ainsi que de ses évolutions.

II. Les institutions : deuxième point avancé dans le discours de Bayeux

Dans ce second point abordé au cours du discours de Bayeux, le Général avance en réalité trois idées majeures.

Ainsi, le Général entend remédier à ce qui n'a pas fonctionné jusqu'alors, c'est-à-dire le régime d'assemblée mais aussi l'instabilité chronique dont souffrira la France de la Révolution française à la seconde moitié du XXe siècle. Il souhaite y procéder en accentuant le rôle à l'opinion mais également au suffrage, tous deux devant "orienter l'action publique et la législation". A cet égard, le général rejette le régime d'assemblée puisqu'il souhaite une véritable séparation des pouvoirs, et, cela passera par ce qu'il appelle "un arbitrage national" d'abord élu par un collège en 1958, puis au suffrage universel, en 1962.

Le Général de Gaulle va également parler du bicamérisme, c'est-à-dire la présence de deux chambres au Parlement, l'une élue au suffrage universel, l'autre par un collège d'électeurs. A cet égard, il a toujours été frileux vis-à-vis d'un gouvernement des partis qui peut, in fine, aboutir à de véritables dissensions au sein même de l'Etat. Pour lui, il est donc nécessaire que les membres du gouvernement ne soient pas le mandataire d'un parti politique. C'est en fait au cours de ce discours que Charles de Gaulle va jeter les bases de ce qui sera connu sous la Ve République, celui-ci ayant en effet déclaré que "c'est du Chef de l'Etat (...) que doit procéder le pouvoir exécutif", et, finalement, il lui revient d'incarner la continuité, d'être un arbitre et d'être le véritable gardien, le véritable "garant de l'indépendance nationale et des traités conclus par la France" en cas de péril pour l'Etat.

En bref, que retenir de ce discours de Bayeux ?

D'un point de vue strictement constitutionnel, le général avait retenu pour les institutions de la future IVe République, que le Parlement, composé de deux Chambres, disposera du pouvoir législatif. A l'exécutif revient la fonction du Président de la République, véritable arbitre et au-dessus de tout parti ; celui-ci nomme le Premier ministre, préside le Conseil des ministres et il lui revient notamment de prendre les décrets et de promulguer les lois. Il est en outre le véritable garant de l'indépendance nationale. C'est donc une conception somme toute personnelle qu'a été mise en avant par le Général et qui imprimera enfin de compte la vie de la Ve République, à partir de 1958.


Sources :

http://www.charles-de-gaulle.org/wp-content/uploads/2017/03/Discours-de-Bayeux-16-juin-1946.pdf

https://www.elysee.fr/la-presidence/le-discours-de-bayeux-194