Si le principe d'indivisibilité est aujourd'hui inscrit au sein de la Constitution de 1958, celui-ci est en fait partie intégrante de nombreuses constitutions connues par la France depuis la Révolution française. En effet, on retrouve ce principe au sein de la Constitution de 1791 qui renvoyait à l'indivisibilité du royaume ; la Constitution de 1793 qui renvoie pour la première fois à l'indivisibilité de la République française. La formule actuellement en vigueur fut reprise telle quelle de l'article premier de la Constitution de 1946.
Ce principe s'applique à l'ensemble des éléments qui constituent l'État. En effet, même si la République est indivisible, à l'intérieur même de ce territoire, il existe des nécessités qui ont contraint à créer des divisions permettant d'articuler les relations qu'entretiennent le peuple et le pouvoir central français. Le peuple, lui aussi, n'est pas en reste puisqu'il conserve son unicité. Enfin, la souveraineté étant unique, il n'existe qu'une seule et même source du pouvoir normatif en France.
Toutefois, le principe de l'indivisibilité de la République française semble être contrarié du fait de l'instauration de l'organisation décentralisée dont elle fait l'objet ; un droit à expérimentation des collectivités locales ; voire encore des statuts particuliers accordés aux territoires situés outre-mer ou bien l'existence de droits particuliers relativement à des minorités nationales.
Un État indivisible est défini par Louis Favoreu et Loïc Philip (Les grandes décisions du Conseil constitutionnel, 1975) par rapport à une autre notion de droit constitutionnel : celle de l'État divisible. Ainsi, pour eux, ce qui distingue ces deux notions « se détermine par référence à l'inexistence ou à l'existence d'un pouvoir normatif autonome ». Pour ces auteurs, cela constitue « le critère décisif » : par conséquent, si ce qu'ils appellent « la collectivité secondaire » dispose d'un pouvoir normatif et que celui-ci ne peut être « anéanti par la collectivité supérieure », alors l'Etat est divisible. Dans le cas contraire, l'État est indivisible.
Ce principe d'indivisibilité renvoie donc à l'existence d'un État unitaire au sein duquel la souveraineté nationale est indivisible : la souveraineté n'est alors pas fragmentée comme c'est précisément le cas pour l'État fédéral. Dans le cas français, la souveraineté appartient seule à l'État unitaire, à la République. Il faut alors comprendre que ce principe d'indivisibilité emporte des conséquences notamment au regard de l'unité du territoire de la République même s'il existe en fait des tempéraments à ce principe...
Il apparaît alors intéressant de se demander quelle est la signification de l'unité territoriale de la République aujourd'hui en France.
Il existe des tempéraments (II) à ce principe constitutionnel (I).
I. L'unité territoriale de la République : quelle portée pour ce principe ?
II. Un principe non exempt de tempéraments dans la pratique constitutionnelle
I. L'unité territoriale de la République : quelle portée pour ce principe ?
Ce principe de l'indivisibilité de la République est un principe constitutionnel qui intéresse traditionnellement l'ensemble des éléments qui constituent l'État, c'est-à-dire le territoire, le peuple, mais aussi l'organisation politique renvoyant pour sa part à la souveraineté.
Ce principe intéresse tout d'abord le territoire. Cela signifie, en d'autres termes, et en principe, qu'il apparaît impossible de diviser le territoire qui constitue l'État.
Aussi, ce principe intéresse la souveraineté, ou l'organisation politique, qui est uniquement : alors, il n'existe qu'une source de pouvoir normatif initial, ce qui empêche de procéder à une quelconque transformation de l'État français en État fédéral.
Par ailleurs, ce principe s'intéresse au peuple, principe qui en préserve l'unicité. En ce sens, on peut retenir les décisions 91-290DC du 9 mai 1991 et 99-412DC du 15 juin 1999, concernant respectivement la censure vis-à-vis d'une référence législative à un peuple corse ainsi que le refus du conseil de la ratification de la Charte des langues régionales ou minoritaires par la France.
On peut finalement noter qu'à l'occasion de la révision constitutionnelle intervenue en 2003 au regard de la décentralisation, que bien que l'expression « populations d'Outre-mer » fut ajoutée à l'article 72-3, alinéa premier, de la Constitution, ces mêmes populations font partie intégrante du peuple français, respectant par voie de conséquence ce principe de l'unicité.
Toutefois, il existe dans la pratique constitutionnelle des tempéraments... (II).
II. Un principe non exempt de tempéraments dans la pratique constitutionnelle
Si l'existence de ce principe constitutionnel est indéniable, il n'en reste pas moins que les membres du Conseil constitutionnel ont décidé de retenir qu'il était possible de pratiquer des sécessions à l'occasion de la décolonisation par une décision du 30 décembre 1975, 75-59DC ; ils ont même admis qu'il puisse exister une organisation administrative de l'État non homogène dans sa décision 91-290DC du 9 mai 1991.
En fait, les dispositions de l'article 53 de la Constitution de 1958 prévoient la possibilité de modifications territoriales, mais celles-ci doivent nécessairement respecter des conditions, lesquelles sont : un traité qui intervient dans cette matière ne peut être ratifié ou bien approuvé qu'en vertu d'une loi ; de même, cet article poursuit en soulignant le fait que « nulle cession, nul échange, nulle adjonction de territoire n'est valable sans le consentement des populations intéressées ». Sept référendums furent organisés sur la base de ces dispositions entre 1962 et 1998.
Finalement, le Conseil constitutionnel ne s'est pas non plus opposé à ce que des transferts de compétences soient effectués, ceux-ci intéressant l'élaboration de l'Union européenne, même si ces mêmes transferts durent être autorisés par la Constitution, selon les dispositions de son article 88-2.
Sources : Conseil constitutionnel ; Tatiana Gründler. La République française, une et indivisible ?. Revue du Droit Public, LGDJ,Paris/ Lextenso (en ligne), 2007, pp.445-477. hal-01674328 ; Le politiste
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