Dans le cas de l'espèce, un livreur à vélo avait demandé aux instances prud'homales de requalifier la relation contractuelle qui le liait à la société en contrat de travail. Alors que le Conseil des prud'hommes ainsi que la Cour d'appel se sont déclarés incompétents, la Cour de cassation a considéré qu'il existait pourtant un lien de subordination entre le livreur concerné et la plateforme en cause.
Dans quelle mesure existe-t-il un lien de subordination entre une plateforme numérique qui met en lien des consommateurs, des restaurateurs partenaires et des coursiers à vélo ?
La Cour de cassation clarifie le statut des travailleurs des plateformes numériques (II) en retenant l'absence de présomption de non-salariat des mêmes travailleurs (I).
I. L'absence de présomption de non-salariat rejeté par la Cour de cassation
II. Une clarification sur le statut des travailleurs des plateformes numériques
I. L'absence de présomption de non-salariat rejeté par la Cour de cassation
La Cour de cassation rappelle que le Code du travail modifié par la loi du 8 août 2016 n'a pas prévu de présomption de non-salariat pour les travailleurs des plateformes numériques.
Toutefois les juges, d'après leur propre standard prétorien, ont considéré que le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur, celui-ci détenant par ailleurs un pouvoir de donner des ordres ainsi que des directives et peut en contrôler l'exécution et sanctionner tout manquement de la part du préposé. La Cour retient que la société « disposait d'un pouvoir de sanction à l'égard du coursier » caractérisant un lien de subordination ; ce faisant, la relation de travail aurait dû être requalifiée en contrat de travail.
II. Une clarification sur le statut des travailleurs des plateformes numériques
La Cour de cassation retient que la requalification en contrat de travail aurait dû être effectuée par la Cour d'appel d'abord parce que la société ne procédait pas uniquement à la mise en relation des restaurateurs partenaires et des clients par des coursiers, mais surtout celle-ci disposait d'un tel pouvoir de sanction à leur encontre. Pour les juges de la Cour, ce pouvoir caractérise un lien de subordination ce qui permet de requalifier la relation entretenue entre la société et le coursier en contrat de travail: ce dernier n'est pas considéré comme indépendant, mais bien comme un salarié selon une requalification objective de la relation qui lie les deux parties.
Finalement, il est intéressant de noter que cette décision sera rappelée dans un arrêt de la Chambre commerciale de la Cour de cassation en date du 4 mars 2020, Uber (n 19-13.316) qui retiendra à l'égard des conducteurs de VTC que l'existence d'une relation de travail ne saurait utilement découler de la volonté des parties ni encore de dénomination que ces dernières lui auraient donnée, mais de conditions de faits objectifs.
Source : Cour de cassation